Sucré, coloré et tape-à-l’oeil: décliné en différents parfums, le « bubble tea » (littéralement le thé aux perles) est en Chine une boisson particulièrement prisée des jeunes, mais ces derniers regardent néanmoins à deux fois les prix sur fond de ralentissement économique.
La conjoncture dans la deuxième économie mondiale pénalise d’une manière générale la consommation des ménages, qui renoncent à certains achats et se tournent en priorité vers des produits à prix mini.
Cette tendance n’épargne pas les boissons au thé malgré leur immense popularité, au risque de fragiliser un secteur ultra concurrentiel qui pesait l’an dernier plus de 21 milliards de dollars (un peu moins de 19 millions d’euros).
Ces boissons au lait ou aux fruits sont généralement élaborées sur place et additionnées de sucre, de gelée, de crème ou encore de jus, et tapissées avec des perles de tapioca (base du fameux « thé aux perles » ou « bubble tea »).
Elles sont servies à l’emporter dans de grands gobelets en plastique avec paille.
Enseignes et points de vente se sont multipliés en un temps record dans les grandes villes et centres commerciaux.
« Le marché est saturé » en Chine, souligne Stacy Chen, une experte des thés nouvelle génération, suivie par environ 180.000 abonnés sur les réseaux sociaux chinois.
Dans ses vidéos, la jeune femme se met régulièrement en scène devant une sélection de boissons, avant de les tester, les comparer et les commenter pour ses internautes.
– Rude concurrence –
« Il y a tellement de marques et de nouveaux produits sur le marché (…) qu’on ne peut pas tous les filmer », sourit la jeune femme rencontrée par l’AFP à Hangzhou, une métropole près de Shanghai.
Face à des consommateurs désormais moins enclins à dépenser, « baisser les prix » est pour les marques le seul moyen de survivre, relève Mme Chen.
« C’est seulement 4 yuans pour un grand verre » de thé sucré, soit 50 centimes d’euros, s’étonne l’influenceuse à la recherche de nouvelles saveurs dans un commerce.
Le secteur du « bubble tea », qui compte environ 500.000 points de vente et d’innombrables marques dont certaines sont cotées en Bourse, a connu ces dernières années une ascension fulgurante.
L’enseigne Mixue Bingcheng, fondée en 1997 par deux frères et simple marque de glace à l’origine, est l’une des plus agressives en termes de prix.
Mixue a été « la première à investir le créneau des thés au lait pas chers », relève Evelyne Chang, du cabinet spécialisé en marketing China Skinny.
Ce choix est payant compte tenu de la conjoncture.
Sa mascotte, qui représente un bonhomme de neige souriant avec un cornet de glace dans la main, est omniprésente en Chine.
– Luxe à prix mini –
« Les autres thés sont trop chers », abonde Guo Jun, 21 ans.
La jeune femme, qui vit à Pékin, vient de profiter d’une réduction pour s’offrir une limonade glacée au prix dérisoire de 2,8 yuans (35 centimes d’euros).
« Le stress au travail est important, la conjoncture n’est pas bonne, les salaires ne sont pas extraordinaires donc les (jeunes) sont très rationnels » quand ils consomment, indique Guo Jun.
« De nombreux cafés et restaurants s’adaptent (en conséquence) et baissent leurs prix », relève Evelyne Chang, du cabinet spécialisé China Skinny.
L’américain Starbucks, longtemps considéré par les Chinois comme un lieu branché avec des produits haut de gamme, est désormais mis en difficulté par une multitude de chaînes locales à prix réduits (Luckin Coffee, Manner Coffee, M Stand…).
En Chine, « auparavant on considérait tous le café comme un produit importé et de luxe », rappelle l’influenceuse chinoise Stacy Chen, qiui s’est fait connaître pour ses contenus liés au bubble tea.
« Aujourd’hui je peux acheter ce même produit de luxe pour 9,9 yuans », soit environ 1,25 euro, sourit Mme Chen.
Donc « pourquoi je devrais dépenser plus de 20 yuans pour du thé au lait? », feint-elle de s’interroger.
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