Avec des Landing Rights, cette société de courrier international s’apprête à exploiter deux preighters, avions passagers transformés en avions-cargo, par semaine sur la ligne Maurice-Addis-Abeba
Probable transformation du Nenuphar et du Trochetia d’Air Mauritius sous administration pour des opérations passagers-cargo
Sealogair, un partenariat Maurice-Réunion-Madagascar-Mayotte, mis en service dans l’océan Indien à partir de 2021
L’introduction de la filière manufacturière dans le régime du Freeport avec pour ambition d’accroître le chiffre d’affaires de Rs 26 milliards à Rs 40 milliards d’ici 2025
Les délibérations sur le thème Glocalisation : Re-Engineering Regional Trade sous l’égide du ministère des Finances de mardi dernier souligne l’urgence et le poids du fret aérien dans cette stratégie de reprise de l’économie Post-COVID-19. Ainsi, l’une des décisions stratégiques arrêtées devrait voir Maurice se lancer dans des opérations de preighters avec des avions passagers transformés en avions-cargos à la manière des géants de l’aviation internationale, comme Lufthansa, Emirates, KLM, voire Ethiopian Airlines, pour conjurer la plus grave crise dans ce secteur. À cet effet, dans un premier temps, la compagnie spécialisée dans le service courrier international DHL, qui est dans l’attente de landing rights du département de l’aviation civile, est sur la ligne de départ pour assurer la desserte d’une nouvelle ligne à partir de Maurice vers Addis-Abeba.
En parallèle, le gouvernement travaille sur le projet d’incorporation d’une Mauritius Air Cargo Company (MAAC) avec la conversion des avions d’Air Mauritius, placée sous administration depuis le22 avril dernier, pour des opérations conjointes passagers-cargo. D’autre part, l’introduction de la filière manufacturière dans le régime du freeport vise une progression du chiffre d’affaires de l’ordre de 50% pour atteindre Rs 40 milliards d’ici 2025.
À l’ouverture de cette brainstorming session, le ministre des Finances, Renganaden Padayachy, devait concéder que « the manufacturing sector has not been given due consideration over the past years ». Il a ajouté que « due to lockdown imposed as a result of COVID-19 outbreak, there is a need to have a strong and vibrant industrial base in Mauritius encompassing emerging sectors such as agro-industry, pharmaceuticals and biotechnology ».
Du côté de l’Economic Development Board, chevauchant le nouveau buzzword Glocalisaion, dont l’objectif est de « secure a steady supply chain whilst ensuring a healthy trade balance », privilégie une triple ligne d’interventions, à savoir l’exploitation de Regional Air Cargo and Logistics Services, la mise en opération d’un Western Indian Ocean Maritime Service et un réseau de distribution en Afrique pour desservir le marché régional. Avec l’une des plus importantes enseignes de distribution d’équipements sportifs en France, Decathlon, servant de Maurice en tant que Regional Logistics Platform pour l’Afrique et la région à partir d’octobre prochain, le port franc est appelé à assumer un rôle de premier plan dans la stratégie économique Post-COVID-19.
Au chapitre des air cargo services, Maurice pourra compter sur l’expérience et le réseau dont dispose DHL Global Forwarding Mauritius Ltd, représentée à la séance de travail par le Chief Executive Officer, Pramod Bagalwadi. Le projet envisagé est de permettre à Maurice de bénéficier du joint venture entre le groupe DHL et Ethiopian Airlines conclu en 2018 pour des «Post-COVID-19 Cargo Solutions in bringing the connectivity to the country to become the regional hub ». Ce cheminement devra être réalisé en phases.
Des recoupements auprès des différents participants au brainstorming de mardi indiquent que les procédures ont atteint un stade bien avancé pour l’entrée en scène de DHL en prélude à la Mauritius Air Cargo Company. Une demande pour des droits d’atterrissage au Sir Seewoosagur Ramgoolam International Airport a déjà été déposée auprès du département de l’aviation civile et tout semble indiquer que les rotations des avions aux couleurs de DHL sur le secteur Maurice/Addis-Abeba, avec deux dessertes par semaine dans un premier temps, pourraient débuter au plus tôt à la fin de ce mois et la possibilité d’accroître la fréquence hebdomadaire dépendant du volume de fret disponible.
La prochaine étape devrait être enclenchée dès le mois prochain avec l’incorporation d’un Special Purpose Vehicle (SPV) pour la conversion des avions d’Air Mauritius en preighters pour les besoins de la Mauritius Air Cargo Company.
Les premières indications sont que les deux Airbus A330-200, soit le Trochetia et le Nénuphar, sont les plus adaptés que les Airbus A-340 pour cette nouvelle mission avec le DHL Addis-Abeba Gateway pour les transhipment services. La target date pour la concrétisation de ce projet est au plus tard en décembre de cette année compte tenu des négociations à être engagées avec les administrateurs nommés d’Air Mauritius, Sattar Hajee Abdoula et Arvindsing Gokhool, et la watershed meeting des créanciers de la compagnie aérienne nationale fixée pour le mois de novembre.
Situation compliquée
Sur le plan maritime, la société mauricienne Sealogair, constituée suite à un partenariat avec La Réunion, Madagascar et Mayotte, prévoit d’opérer un service maritime sur La Réunion et Mayotte l’année prochaine et une extension vers Madagascar, l’Afrique du Sud et le Mozambique à partir de 2022. Bruno Dubarry, de l’Association of Mauritian Manufacurers (AMM), promoteur de cette initiative, a fait comprendre que la State Investment Corporation a été invitée à être partenaire, alors que l’ADIR de La Réunion et SIM de Madagascar en font déjà partie.
Pour ce qui est du financement, Sealogair peut déjà compter sur une enveloppe de cinq millions de dollars, soit quelque Rs 200 millions, d’une banque de La Réunion. L’assistance financière de l’Agence Française de Développement (AFD) a été sollicitée par le Club Industrie du Futur.
À ce même chapitre, la directrice de la Mauritius Export Association, Lilowtee Rajmun-Joosery, a remué le couteau dans la plaie en affirmant que « in terms of regional trade, maritime connectivity has worsened over the last five years, with a freight increase of 50% in the last three years ». Elle cite en exemple le fait que la connexion entre Maurice et Mombassa, soit via Durban soit via Colombo, prend en moyenne 35 jours et coûte 2 000 dollars américains, alors que de l’Inde à Mombassa la durée n’est que de sept jours à $ 900.
Dans la conjoncture, avec le drame du remorqueur Sir Gaëtan, causant la mort de trois employés de la Mauritius Ports Authority, en l’occurrence Hemant Seewoo, Sylvain Addison et Lindsay Plassan, alors que le capitaine Moswadeck Bheenick est toujours porté manquant en mer au large de La Pointe Roches-Noires, la situation dans le port est devenue encore plus compliquée. En raison d’un problème de manque d’équipements, les attentes en tête de rade s’allongent. Ainsi, le MSC Livorno, qui était arrivé à Port-Louis depuis, est reparti pour Colombo en fin de semaine avec sa cargaison de conteneurs destinés à Port-Louis.
La conférence de lignes maritimes, MSC, anticipe des répétitions dans les jours à venir en soulignant dans une notice to clients que « this unfortunate incident in Mauritius will consequently bring further berthing delays in Port Louis of which we will keep you updated. We apologise for any inconvenience caused. »
Par contre, à l’Hôtel du gouvernement, l’on mise sur la production manufacturière en tant que « new cluster of activities in the freeport » comme la planche de la salut du processus de Glocalisation. Mais des étapes cruciales devront être franchies dans les meilleurs délais. Dans un premier temps, un comité institué par l’Economic Development Board (EDB) se penche sur « a third party Freeport Developer to accommodate potential manufacturers as a non-Freeport activity within the Freeport area shortly ».
À cet effet, des drafts regulations, des letters of authorisation et les conditions d’opération ont été élaborées conjointement par l’Economic Dvelopment Board et la Mauritius Revenue Authority en vue d’être avalisées par le ministère des Finances dans les jours à venir. Les participants à la brainstorming session ont également pris note que « over the long term, a technical committee comprising of officers from the ministry of Finance, the ministry of Foreign Affairs, the MRA and EDB will work towards the full inclusion of manufacturing as an authorized Freeport activity ».
Nouveau souffle
Les ambitions de cette nouvelle étape dans le secteur du freeport s’articulent autour des opéraions manufacturières, dont Industry 4.0, la High Precision Engineering, la robotique, l’électronique, l’automobile aussi bien que l’aéronautique, le secteur de la distribution de produits pharmaceutiques, d’équipements sportifs, de produits alimentaires, les services avec le freight forwarding sans oublier les ICT Related Acitvities (Freeport and Logistics) et des display showrooms (art gallery, gold, precious stones et autres articles hors-taxes).
L’objectif avec la relance des activités dans le port est de générer des recettes brutes de l’ordre de Rs 40 milliards d’ici à 2025 contre Rs 26 milliards actuellement. Avec ce nouveau souffle, la contribution du port franc au Produit intérieur Brut (PIB) devrait passer à 10%, dont un gain de 3,6 points comparativement à 2019. Le nombre d’emplois pourrait augmenter à 5 000 contre 3 500 aujourd’hui.
Par ailleurs, le projet de Western Indian Ocean Maritime Service semble être un long shot dans le plan d’action agréé après les échanges de mardi dernier au ministère des Finances. L’encadrement de la Commission de l’Océan Indien est considéré comme étant crucial pour la signature d’une charte par les chefs d’État et de gouvernement de la région. «The charter will enable all regional states (Tanzania, Kenya, Mozambique, Madagascar, Mauritius and potentially Seychelles) to launch a subsidised maritime service linking Port-Louis to Western Indian Ocean ports weekly ».
L’une des conditions sine qua non pour le démarrage du Western Indian Ocean Maritime Service est que les gouvernements devront allouer des subsides à cette desserte maritime régionale. « The governments will subsidise for five years through a special fund/trust with a clear exit strategy when economies of scale are reached », note Port-Louis, qui ajoute que « to make the regional shipping service and air cargo service sustainable, we also need, in parallel to develop an intra-regional trade strategy. COVID-19 has shown a clear shift from Globalisation to Glolocalisation tendencies ».
Profitant de ces échanges, le ministre Padayachy a lancé un appel à l’effet que « all stakeholders need to join hands together to face the myriad of challenges coming ahead and work hard to overcome the setbacks therein. » Il devait aussi s’appesantir sur la nécessité d’un « plan on the industrialisation strategy to trade with the African continent » avec un budget de Rs 10 milliards alloué pour financer les compagnies mauriciennes tentées par l’aventure d’investir et de s’engager dans des échanges commerciaux avec l’Afrique.