— Les Rs 314, 4 milliards de la fin d’avril représentent moins de 15 mois d’importations contre 17 il y a à peine un mois
— Dans le Budget Memorandum 2022, la MBA brandit la hantise d’un Furher Downgrade du Sovereign Rating de Maurice avec les Highly Reputable Institutional Investors s’éloignant de l’économie
— La concurrence de la MIC, assujettie à « fewer regulatory and prudential constraints than banks » mise en exergue avec une proposition de Risk-Sharing Formula au titre du Working Capital
À presque cinq semaines de la présentation du budget 2022-23 à l’Assemblée nationale, probablement le vendredi 10 juin, un indicateur majeur de la performance économique est venu saper le moral à l’Hôtel du Gouvernement. S’il en fallait un encore. En tout cas, Lakwizinn du Prime Minister’s Office aura bien du mal à démêler l’écheveau sur le plan de la gestion des finances publiques avec les derniers chiffres publiés par la Banque de Maurice en fin de semaine. Depuis ces neuf derniers mois, la tendance baissière du niveau de réserves en devises étrangères s’est confirmée pour s’afficher au plus bas à Rs 314,4 milliards au cours de cette période après avoir flirté avec une pointe de Rs 372,7 milliards à la fin de décembre de l’année dernière. De son côté, la Mauritius Bankers Association (MBA), dans son Budget Memorandum 2022 en date du 26 avril, soumis au ministre des Finances, Renganaden Padayachy, met en garde contre un risque potentiel hors de tout contrôle, à savoir les conséquences désastreuses d’un further downgrade du Sovereign Rating de Maurice par la société de notation internationale Moody’s, qui vient techniquement de boucler son exercice annuel d’évaluation. Et surtout, en embuscade, les concluding remarks de la mission du Fonds monétaire international sur les Article IV Consultations avec pour préoccupation majeure l’évolution de la dette publique.
La Banque centrale n’a pu que concéder la baisse de Rs 47,3 milliards du niveau des réserves en devises étrangères d’un mois à l’autre. Cet indicateur, sur lequel s’appuie d’habitude l’Hôtel du Gouvernement pour contredire les opposants au sujet de la gestion économique, n’est que de Rs 314,4 milliards à la fin d’avril, contre une pointe de Rs 372,7 milliards au 31 décembre dernier.
Le relevé des douze derniers mois accessible sur le site web de la Banque de Maurice indique que c’est le niveau le plus bas de ces neuf derniers mois. Certes, les promoteurs de la thèse Tou Korek Lakaz Mama peuvent se prévaloir du fait que, comparativement à avril de l’année dernière, les Gross Official International Reserves (GOIR) restent en progression, soit les Rs 314,4 milliards contre les Rs 302,3 milliards d’il y a un an. D’ailleurs, le bulletin relatif de la Banque centrale ne se garde pas pour relever que « compared to April 2021, the GOIR rose by Rs 12,2 billion. »
Il n’empêche que ce niveau de réserves enregistré à la fin d’avril représente 14,8 mois d’importations, soit presque le même que celui prévalant avant le mois d’août de l’année dernière. Pour le mois de mars dernier, il était de 17 mois d’importation, soit deux mois de plus. Toutefois, la situation pourrait s’avérer encore plus difficile dans la mesure où « the monthly import cover is based on imports of goods and services for calendar year 2021. »
Ainsi, si l’on tient compte de la flambée des cours du pétrole, des céréales et des produits alimentaires sur le marché mondial depuis le début de l’année, avec la perte du pouvoir… d’achat des ménages, les réserves de Rs 314,4 milliards devraient couvrir bien moins que les 14,8 mois d’importations annoncés officiellement.
Néanmoins, dans la conjoncture, d’autres zones d’ombre se profilent à l’horizon du secteur financier et des banques. Cet avertissement n’émane de nulle autre organisation que de la Mauritius Bankers Association dans son état des lieux de l’économie en marge des consultations budgétaires orchestrées par le ministre des Finances.
« Negative outlook »
Au titre des Significant challenges to financial services, la Mauritius Bankers Association souligne que « Moody’s currently maintains a negative outlook on Mauritius, which carries the risk of a downgrade of the Sovereign Rating, fragilising our Investment Grade status. » L’association des banquiers note que dans le sillage du précédent downgrade de Maurice à Baa2 le 3 mars 2021, seule une banque, le MCBGroup, avait gardé son Investment Grade Status. « On the current trajectory, there is a risk that the Sovereign Rating of Mauritius could be further downgraded toi Baa3, the last Investment Grade Notation », avance la MBA, qui craint que dans une telle éventualité, « no local bank holds an Investment Grade Rating. »
Les conséquences de cette étape se traduiront par « a loss of existing and new business », avec des « highly reputable Institutional investors likely to migrate, potentially denting the deposit base of banks and affecting the foreign currency liquidity within the system. » De ce fait, le portefeuille des institutional investors, constitué par les banques commerciales et préservé en dépit de l’élimination de l’India-Mauritius Capital Gains Tax Provision, sera dilapidé.
Avec les financial and insurance activities, représentant 12,3% du PIB, soit un montant de Rs 50,4 milliards, dont Rs 31,3 milliards, sous forme de monetary intermediation (banques), la MBA fait un plaidoyer à l’effet que « it is of fundamental importance that Mauritius take all necessary steps to avoid losing its Investment-Grade », tout en soulignant avec force que « Mauritius is currently the only Investment Grade international financial centre in Sub-Saharan Africa. This unique feature is fundamental to its attractiveness. »
La MBA sort le carton rouge en faisant état de la performance peu reluisante de Maurice dans la dernière édition du Global Financial Centres Index rendue publique le 24 mars dernier. Alors qu’en septembre 2019, soit à la veille des dernières élections générales, Maurice occupait la 40e place à cet indice, en 2022, elle a dégringolé à la 87e place, loin derrière Kigali (6e place), Dubayy (17e), Abu Dhabi (31e), Mumbai (50e), Casablanca (54e) Cape Town (55e) et Johannesburg (56e).
« Obsolete business model »
À partir de ce postulat, la MBA affirme que depuis ces quatre dernières années l’obsolete business model en matière de Global Business Sector a été dénoncé. « There has been no fundamental review of the sector in light of recent market dynamics. With the imminent implementation of a Global Minimum Tax rate, as promoted by IMF, World Bank, OECD and now the USA, the sector faces an existential threat and the prospect of contraction », anticipe l’association des banquiers.
Revenant sur le front local, la Mauritius Bankers’ Association, tout en se félicitant de l’intervention de la Mauritius Investment Corporation sous forme de « fresh source of capital to systemically important businesses where bank exposure was already high », réclame un level playing field pour ses affiliés, notamment en ce qui concerne les facilités bancaires en faveur des emerging sectors, dont les énergies renouvelables et la blue economy.
« There is an element of overlap between the roles of MIC and commercial banks in relation to emerging sectors. We appreciate the importance for MIC to stabilise its portfolio, and the strategic need to stimulate emerging sectors. At the same time, there must also be a level playing-field. MIC has fewer regulatory and prudential constraints than banks, and has been seen to outcompete banks on certain deals. This could result in a situation where banks are effectively excluded from emerging sectors and greenfield projects », note le Budget Memorandum des banquiers.
Dans une tentative de mettre en place une collaboration entre la MIC et les banques commerciales, la MBA propose une risk-sharing formula, avec la filiale de la Banque de Maurice assurant un guichet pour alimenter les banques en « wholesale financing, especially for the deployment of working capital financing facilities and the subsidising of sustainable financing to economic operators. »
À la fin de mars dernier, les interventions de la Mauritius Investment Corporation (MIC) dans diffrents secteurs de l’économie avaient littéralement crevé la barre de 50% du War Chest de Rs 82 milliards en devises étrangères. Ainsi, 37 entités économiques ont bénéficié de Rs 44,6 milliards de financement avec des demandes, représentant 27%, venant du secteur de l’hospitality, notamment l’hôtellerie en particulier.