D’ici la reprise des travaux de l’Assemblée nationale, l’énigme de la réforme électorale, avec notamment l’élimination de la déclaration ethnique des candidats et l’introduction d’une dose de proportionnelle, continuera à hanter les états-majors politiques. La dernière position en date adoptée par le Premier ministre et leader du parti travailliste, Navin Ramgoolam, à l’effet que la réforme électorale n’est possible qu’après les prochaines élections générales, doit surmonter deux obstacles majeurs hors de son contrôle avec Rezistans ek Alternativ veillant au grain. D’ailleurs, dans un commentaire sur les derniers développements politiques, Ashok Subron, animateur de Rezistans ek Alternativ, souligne que le volet de la réforme électorale doit être dissocié des autres changements constitutionnels majeurs, dont l’avènement d’une IIe République.
Comme il a été prévu, les dossiers de la réforme électorale et le projet de IIe République ont fait l’objet de discussions lors de la réunion du Conseil des ministres hier, qui était présidée par le Premier ministre. Ce dernier a passé en revue les discussions et échanges politiques de ces derniers jours avec le leader de l’opposition et du MMM, Paul Bérenger, et a évoqué le « gros macadam » que constitue le mode d’élection du Président de la République avec des pouvoirs accrus.
Sur le chapitre de la réforme électorale, Navin Ramgoolam est revenu de manière systématique sur le fait que « pour pouvoir faire adopter les amendements constitutionnels au sujet de la réforme, les deux principaux politiques doivent être ensemble ». Or, après les dernières discussions de la Clarisse House de jeudi après-midi, les chances de voir « le PTr et le MMM ensemble » se sont nettement amenuisées, poussant le gouvernement à adopter la “Fall-Back Position” à l’effet que la décision sur la réforme devra revenir à l’électorat, sa mise en place intervenant après les prochaines élections générales.
Néanmoins, cette éventuelle approche politique par rapport à la réforme électorale est irrémédiablement sous la menace d’une double épée de Damoclès. « Le gouvernement est conscient qu’il y a un engagement formel pris dans le sillage du “pronoucement” du Comité des Nations Unies sur les Droits de l’Homme exigeant un “effective remedy” à cette question de déclaration communale des candidats à des élections générales. Une véritable épée de Damoclès au cas où le changement n’interviendrait pas avant les prochaines élections. Puis, il y a également le “Main Constitutional Case” logé en Cour suprême par Rezistans ek Alternativ suite au “ruling” du Privy Council sur cette même question de déclaration ethnique », font comprendre des sources ministérielles, comme pour mieux situer l’enjeu politique et diplomatique de la réforme électorale après la réunion du Conseil des ministres d’hier.
De son côté, Rezistans ek Alternativ ne compte pas rester les bras croisés face aux dernières manoeuvres engagées par le Premier ministre. Le “Main Constitutional Case”, qui sera appelé en Cour suprême le 8 mai prochain, soit en tenaille avec la clôture du dialogue national sur le “Consultation Paper on Electoral Reform” du 5 et les travaux de l’Assemblée nationale du 13, constituera une véritable épine dans les pieds du gouvernement. Rezistans ek Alternativ compte continuer à exercer des pressions pour un “Early Trial” vu l’importance de la question en litige dans la conjoncture politique.
Ashok Subron est catégorique sur le sujet du devoir de Navin Ramgoolam d’apporter les amendements nécessaires en conformité avec le “Pronouncement” du Comité des Nations Unies pour les Droits de l’Homme. « Rezistans ek Alternativ dir ki bizin disosye reform elektoral avek ninport ki lezot sanzman konstitisyonel, sirtu disosye li avek “fame” dezyem Repiblik versyon Ramgoolam-Bérenger. Reform elektoral ena pu fer avek “ruling” UN lor klasifikasyon kominal kandida ek bann inperatif demokratik. Partaz puvwar PM/Prezidan ena pu fer avek ban inperativ pirman politik dan kad bann akomodman lalyans électoral », soutient-il.
Rezistans ek Alternativ s’interroge sur la question de la nouvelle posture politique du Premier ministre, qui avait rejeté toute proposition de greffer la question de financement des partis politiques à la réforme électorale, et qui aujourd’hui fait du projet de IIe République une condition sine qua non pour adopter cette même réforme électorale. « La dernière déclaration de Navin Ramgoolam est des plus grotesques. Le 15 avril dernier, il décide de fermer le Parlement pour une période d’un mois en vue de mettre au point les derniers détails du projet de loi sur la réforme. Paul Bérenger et lui décident d’annuler leurs rassemblements politiques du 1er-Mai pour la même raison. Aujourd’hui, il vient pondre des raisons des plus ridicules pour tenter de justifier ce volte-face sur la réforme », ajoute-t-il en faisant part d’un « dégoût amplifié » de l’électorat vis-à-vis des partis politiques traditionnels.
Intervenant lors des délibérations au Conseil des ministres, Navin Ramgoolam a répété que les négociations politiques avec Paul Bérenger ont été rompues sur un point fondamental, en l’occurrence le mode de scrutin pour l’élection du Président de la République avec des pouvoirs accrus. Des ministres ont cru savoir que ce scrutin au suffrage universel, visant à rendre le président “accountable” envers l’électorat, allait être probablement à deux tours.
Toutefois, aucune confirmation officielle n’était disponible quant à ces deux tours, comme c’est le cas pour les élections présidentielles en France. Le Premier ministre a réitéré sa préférence pour cette élection présidentielle au suffrage universel, prenant à contre-pied le leader du MMM, confiant jusqu’à jeudi avant 15 heures qu’il « n’y allait avoir aucun changement » dans la formule du choix du Président avec des pouvoirs accrus, dont la dissolution de l’Assemblée nationale.
Outre la formule révisée pour le seuil de qualification pour la représentation proportionnelle, soit 8% plus un élu, éliminant quasiment tous les petits partis politiques, la “Hit List” politique avec les noms de ministres, parlementaires, présidents de board ou Chief Executive Officers de corps para-étatiques a également pesé de tout son poids dans l’échec des négociations en vue d’une alliance PTr/MMM.
Dans les milieux autorisés du MMM, on confirme qu’il n’était nullement question de cohabiter au sein du gouvernement avec des ministres du calibre de Rajesh Jeetah, Cader Sayed-Hossen, Vasant Bunwaree, Devanand Ritoo ou encore des transfuges comme Jim Seetaram, Pratibha Bholah et Mireille Martin. La question de « caser Rashid Beebeejaun » n’était également pas du goût de l’opposition.
Toujours dans le cadre de « l’opération nettoyage » envisagé, un exercice « efasé-refer » à la direction générale de l’Independent Commission against Corruption et au sein de cette même institution était programmé au lendemain des élections générales anticipées avortées. Les responsables de la Beach Authority, Subash Seeruttun, du Central Electricity Board, Balraj Narroo, de la Mauritius Broadcasting Corporation, Dan Callikan, ou de la Gambling Regulatory Authority et de l’Independent Broasdcasting Authority avaient été identifiés pour une opération « Lev Pake, alle » version revue et corrigée avant la fin de cette année.
Ces noms, qui figuraient sur une longue liste avec d’autres, ne sont que cités au hasard mais évoqués lors de ces quatre heures de discussions entre Paul Bérenger et Navin Ramgoolam le lundi 14 avril, au moment où avait été décidée la “Cooling Down Period” avec le MSM avant que le Remake 2000 MSM/MMM ne fût déclaré “Out” après le tête-à-tête de la Clarisse House de jeudi dernier, 11 jours qui ont tenu l’échiquier politique en haleine avec des rebondissements les plus invraisemblables alors que le déclic politique du 1er-Mai était derrière la porte…
ÉCHIQUIER POLITIQUE: L’énigme de la réforme électorale à résoudre
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