Plus ça change…

Semaine après semaine, le gouvernement procède à des nominations à la tête des institutions de l’État pour remplacer les nominés politiques de l’ancien gouvernement, qui considérait ces postes comme des récompenses, payés de l’argent public, pour remercier ses agents pour services politiques rendus. Cette pratique que les quatre partis qui composent l’alliance gouvernementale avaient dénoncée à longueur de meetings et de conférences de presse, ils sont en train de la pratiquer de plus belle. On l’a vu lors de la nomination du conseil des ministres où la part belle a été faite aux aînés au détriment des jeunes. Pour justifier ce choix, les porte-parole officieux des partis ont martelé que les ministres sont choisis pour refléter les circonscriptions, donc les électeurs. Il suffit de savoir que seulement deux femmes et quelques jeunes seulement font partie du cabinet pour se dire que l’électorat jeune et l’électorat féminin, qui ont voté massivement pour l’Alliance du Changement sont, pour dire le moins, sous-représentés. Les pratiques dont on ne parle pas mais qui sont scrupuleusement pratiquées, ce sont les « réalités électorales » qui ont pesé de tout leur poids communal dans la balance pour le choix des ministres. Ce qui permet de se demander si la promesse de décommunaliser le pays en commençant par son système électoral — et le Best Loser System officiellement décrié mais plus que jamais en vigueur officieusement — sera tenue ou renvoyée aux calendes grecques.
Ce sont sans doute ces réalités électorales — en plus de ce qu’il faut de loyauté et de fidélité absolue au leader et de liens familiaux qui ont été à la base de certaines nominations. Des critères qui, il faut le rappeler, étaient utilisés par le gouvernement sortant. Le leader du MMM, qui a été un grand dénonciateur de ces méthodes de sélection, n’a pas hésité à les utiliser pour ses propres nominations. Ce ministre sans portefeuille, donc sans responsabilités définies, a déjà quatre conseillers qui, sans doute par pure coïncidence, appartiennent à quatre communautés distinctes. Sans doute une manière de montrer qu’en dépit des grands discours, les règles des mathématiques communales sont respectées. Il faut noter par ailleurs que les trois premiers nommés font partie des instances mauves et ont activement participé à la dernière campagne électorale. Contrairement à ce que chantait feu Siven Chinien en 2025, « dan lalit ena rekonpans ! » Le dernier des quatre conseillers du Premier ministre adjoint est présenté comme ayant été « un des architectes de l’Alliance du Changement, celui qui a été le lien entre les leaders du PTr et du MMM. » Est-ce l’éventualité d’une cassure rouge-mauve qui justifie la nomination de ce conseiller qui sera payé des fonds publics comme les autres ? On peut comprendre que face à ce spectacle, certains commencent à être déçus. D’autant que — cerise sur le gâteau ? — on vient d’apprendre que l’épouse d’un des quatre nommés comme conseillers du DPM a été nommée à la tête d’une institution financière relevant d’une ministre MMM. Quelle est la différence entre ce qu’ils dénonçaient hier et ce qu’ils font aujourd’hui ?
On l’avait dit, répété et surtout espéré : Rezistans ek Alternativ allait être la touche jeune et progressiste, l’aiguillon qui allait inciter les trois « vieux partis » à appliquer ses promesses de changement et de rupture avec le passé. Il semblerait que ses trois élus soient en train de se rendre compte que les dynamiques du passé sont beaucoup résistantes que les idées novatrices. Et que ceux qui gèrent la machine gouvernementale, le fameux appareil d’État, ne sont pas des adeptes de la remise en cause et ne sont pas là pour suivre les directives — surtout les nouvelles —, mais pour perpétuer le système en place, même si ses recettes sont obsolètes. Et dont ils ont su tirer profit au fil des années. Effectivement, ceux qu’Ashok Subron vient de qualifier « de profiteurs, de spéculateurs et autres parasites, qui gravitent autour de l’État » et qui « feront tout pour bloquer et détourner le changement que le peuple a choisi en novembre 2024 » sont toujours en place. Et comme ils maîtrisent les rouages du système au contraire des nouveaux ministres, ils sont en train de se rendre indispensables, ce qui va leur permettre de continuer à gérer — d’autres diraient à tirer les ficelles — comme avant. Donc, pour ce changement que tout le monde espérait et qui a été un des moteurs de la campagne de l’Alliance… du Changement, il faudra repasser. Parce qu’en ce qui concerne la majorité des nominations, plus ça change, plus c’est la même chose…
Jean-Claude Antoine

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