Poonish Sham, L’unique lauréat du RCPL : « Le jour le plus difficile reste à venir…

… celui de quitter mes parents pour aller poursuivre mes études ailleurs.»
Chaque élève, chaque lauréat, porte en lui une histoire, une épopée tissée de sacrifices et de résilience. Derrière chaque réussite se cachent des nuits blanches, des doutes et des espoirs, des renoncements et des triomphes. Aujourd’hui, c’est celle de Poonish Sham que nous vous racontons, parce que son parcours est une source d’inspiration. Il vient d’un tout petit village du Nord, Cottage, un endroit modeste à côté de Forbach, où les rêves semblent parfois plus lointains… et pourtant.

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Son père, Vinay Sham, est messenger au Mauritius Turf Club. Sa mère, Poornima, bien que diplômée, a fait le choix de tout mettre entre parenthèses pour se consacrer pleinement à son fils, l’accompagner, le soutenir, lui donner toutes les chances de réaliser le rêve que caresse tout élève studieux : devenir LAUREAT !

Poonish Sham n’est pas le premier à faire briller le vollage deCottage. Avant lui, Hans Soobhash Balgobin en 2007 et Ghanish Soogary en 2016 avaient déjà inscrit le village dans cette histoire d’excellence. Tous deux avaient fréquenté le Collège Royal de Port-Louis. Alors, peut-être fallait-il s’attendre à cette répétition du destin, à ce « jamais deux sans trois » toujours aussi vrai quand un belle histoire est en train de s’écrire « Non, non, je ne suis pas le tout premier lauréat à Cottage. Avant moi, il y en a eu deux. Pour le village, c’est tout un honneur et une fierté. Non seulement je suis allé à l’école maternelle du quartier, mais j’ai aussi fréquenté l’école du gouvernement du village, là où j’ai terminé avec brio ma primaire pour être dirigé au Collège Royal de Port-Louis.»

«Mon père s’est beaucoup sacrifié»
Son père se souvient encore du rituel quotidien : le déposer chaque matin à Cassis, veillant sur lui, lui insufflant cette confiance qui lui serait indispensable dans ce long cheminement académique. Mais derrière cette apparente stabilité se cachait une inquiétude profonde, une précarité menaçante.« Mon père s’est beaucoup sacrifié. Nous avons eu des moments très difficiles, surtout lorsque le MTC Sports and Leisure a dû fermer ses portes dans les conditions que l’on connaît. C’était l’incertitude, l’inquiétude, le stress pour toute la famille. Comment faire pour payer mes leçons ? Ensemble, nous avons pu nous en sortir. Ma mère a commencé à travailler, mais elle n’a pas tenu longtemps. Voyant que je n’étais plus moi-même, elle a rebroussé chemin pour donner sa démission afin de s’occuper de moi. Il n’y a jamais eu de dispute, mais Dieu merci, ensemble, nous avons pris les bonnes décisions. Mes parents ont toujours été d’un apport extraordinaire. Leurs moyens étaient modestes, très modestes, mais ils n’ont jamais baissé les bras et ils ont cru en moi. C’est ce qui fait la beauté de mon succès qui est aussi et surtout le leur. »

Vinay Sham, le père, parle de ces années d’incertitude comme d’une tempête traversée à l’aveugle. Il aurait pu, lui aussi, se retrouver sur le pavé, comme tant d’autres employés congédiés du jour au lendemain.« J’ai vu des centaines d’employés être mis à la porte. Certains avaient 10, voire 15 ou 20 ans de service. Ils ont été contraints de partir sans le sou du jour au lendemain. Heureusement que le Bon Dieu avait un plan pour moi. Il est venu à ma rescousse et à celle de ma famille. Durant trois ans, nous avons navigué avec les Rs 20,000. Ce n’était pas énorme, mais tout juste suffisant pour nous permettre d’aider notre fils unique à poursuivre ses études. Oui, nous avons galéré et c’est pourquoi nous étions tous émotionnés lorsque nous avons su qu’il avait réussi. C’est un immense plaisir, un plaisir indescriptible pour toute la famille. »

« Le parcours éducatif d’un enfant est aussi celui des parents»
Poornima, elle, est encore sous le choc, oscillant entre la joie immense et la sidération d’avoir touché du doigt ce rêve qui paraissait, parfois, impossible…fragile.« Vous savez, dès qu’il a commencé l’école, j’ai dit à mon époux que je serais femme au foyer, car je ne voulais pas confier mon fils unique à quiconque. En tant que maman, c’était à moi de prendre soin de lui et de m’occuper de son éducation. Je n’étais pas professeur, mais je m’assurais qu’il faisait ses devoirs, qu’il assimilait ce qu’il apprenait et qu’il avait tout ce dont il avait besoin pour qu’il reste motivé. J’aurais pu aller travailler, mais je ne l’ai pas fait, car le parcours éducatif d’un enfant est aussi celui des parents. La preuve, aujourd’hui, nous partageons son succès. »

Ce succès, ils l’attendaient. Ils y croyaient, mais avec cette humilité qui leur a toujours dicté la prudence. Le jour des résultats, toute la famille était suspendue aux annonces à la radio. Les noms défilaient… un, deux, trois… mais tous du Royal College of Curepipe. L’attente devenait insoutenable. « Tous les noms qu’on entendait venaient du Collège Royal de Curepipe. RCC, RCC, RCC et la liste n’en finissait pas. »

Puis, enfin, l’appel. Une voix au bout du fil, des mots simples mais électrisants.  «Félicitations, ou garçon fine sorti. » Vinay explose de joie. Poornima, submergée par l’émotion, enlace son fils et les larmes ont effacé en moins de deux . « J’étais émotionnée et j’avais les larmes aux yeux. Je l’ai serré dans mes bras pour l’embrasser, car il le mérite bien. Il s’est tant sacrifié. Parfois, le stress le gagnait et il s’énervait pour un oui ou pour un non. Mais il revenait toujours à de meilleurs sentiments, car ce que j’aime avec lui, c’est qu’il nous obéit toujours. C’est un bon garçon, et je ne le dirai jamais assez. Il doit savoir que nous l’aimons beaucoup et nous sommes très fiers de lui. »

«Piti la pou lauréat. Pena zes. Pli banker ki sa pena»
Son père, figure bien connue au Champ de Mars, l’avait toujours dit : « Ekout moi ki mo dire ou. Piti la pou lauréat. Pena zes. Pli banker ki sa pena. Li stresse mais moi mo relax. Mo kone kuma line travay et mo kone ki li pou reussi. » Ironie du sort, si Vinay est un fervent passionné des courses hippiques, Poonish, lui, reste indifférent aux sabots battant la poussière du Champ de Mars. Son cœur bat pour un autre terrain. « Mo guet souval galoupe mais mo pas kone narien dans lekurs. Mais mo content football. Mo supporte Manchester United… » Le père et le fils, unis aussi par cette ferveur pour les Diables Rouges.

Aujourd’hui, Poonish regarde vers l’avenir, avec une certitude : il ne sera pas Messenger. Les horizons sont vastes, les opportunités, nombreuses.« Les opportunités sont là. Les portes se sont ouvertes. Je vais prendre mon temps avant de faire mon choix. Toutefois, permettez-moi de remercier mes professeurs, mes amis et tous ceux qui m’ont aidé d’une façon ou d’une autre. » Mais l’avenir, aussi radieux soit-il, recèle une ombre…« Le seul souci, c’est que j’aurai à quitter mes parents, ma mère, mon père et tous ceux que j’aime. Ce jour-là, ce sera le jour le plus difficile de ma vie… »
Et ce sera aussi un Noël bien particulier. Car Poonish est né un 24 décembre, le jour où le Petit Papa Noël descend toujours du ciel avec des jouets par milliers…

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