- Rama Sithanen : « Atténuer tout risque de flambée d’inflation et s’attaquer aux pressions sur le taux de change »
Le Monetary Policy Committee a porté, hier, le taux directeur à 4,5% contre 4% en septembre dernier. « Il faut contenir l’excès de liquidités dans le système, inverser le différentiel négatif de taux d’intérêt avec les principales devises étrangères et s’attaquer aux pressions sur le taux de change », déclare le gouverneur de la Banque de Maurice, Rama Sithanen. Il a mis l’accent sur l’importance des mesures proactives afin d’atténuer une poussée inflationniste. Pour la première fois, le gouverneur de la Banque centrale a annoncé d’avance le calendrier des réunions du MPC, soit le 7 mai, le 13 août et le 12 novembre.
Rama Sithanen a expliqué que le MPC a délibéré sur la nécessité de prendre des mesures politiques proactives en vue d’atténuer tout risque de flambée d’inflation en s’attaquant de manière durable à des facteurs contributifs, à savoir contenir l’excès de liquidité dans le système, inverser le différentiel de taux d’intérêt négatif avec les principales devises étrangères et s’attaquer aux pressions sur les taux de change.
Devant une marge de manœuvre pour faire évoluer le taux directeur vers une augmentation, le Monetary Policy Committee a décidé à l’unanimité d’augmenter le taux directeur de 50 points de base, de 4 % à 4,5 % par an sans compromettre les autres objectifs macroéconomiques.
Rama Sithanen a laissé entendre que les banques devraient répercuter ce taux sur leurs clients en leur offrant des taux d’épargne plus attractifs. Il s’est dit confiant que la capacité de remboursement de la dette des ménages et des entreprises, qui était déjà solide avant la hausse des taux, devrait continuer à l’être. « Notre objectif reste la stabilité des prix, le MPC a voulu s’assurer que nous ne négligeons aucun effort pour fournir les remparts appropriés contre une éventuelle baisse de notre roupie », dit-il, ajoutant que « nous voulons nous assurer que les attentes en matière d’inflation soient solidement ancrées et que les pressions sur le taux de change soient contenues à Maurice. »
Rama Sithanen a donné la garantie que le comité de politique monétaire prendra les décisions appropriées compte tenu des circonstances auxquelles l’économie du pays sera confrontée et que gagner la bataille contre l’inflation et rétablir la stabilité des prix constituent les principales priorités.
Passant en revue la situation économique, il fait état de la croissance du PIB de 5,1 % en 2024, tirée principalement par la construction, l’hébergement et la restauration, le transport et l’entreposage, l’information et la communication, des activités financières et d’assurance et du commerce de gros et de détail.
Du côté de la demande, la consommation intérieure a continué de croître régulièrement tandis que l’investissement s’est amélioré dans un contexte de dépenses plus élevées dans la construction résidentielle et non résidentielle.
L’écart de production est resté positif en 2024, contribuant ainsi aux pressions inflationnistes. La dynamique du marché du travail s’est améliorée au troisième trimestre 2024. La hausse des salaires n’a pas été proportionnelle aux gains de productivité et cela est susceptible, selon lui, d’accentuer les pressions inflationnistes.
Le déficit de la balance courante devrait s’aggraver pour passer à 5,4 % du PIB en 2024, contre 4,6 % en 2023, principalement en raison d’un déficit commercial croissant, compensant la hausse des recettes touristiques et l’excédent du compte de revenus primaires. Il met en garde contre le fait que « les exportations continuent de susciter de vives inquiétudes. En termes de volume, les exportations nationales, c’est-à-dire les exportations totales hors provisions de bord et hors banques, sont en baisse. »
Parallèlement, le volume des importations a augmenté de manière significative, reflétant en partie la forte demande intérieure. Les réserves officielles internationales brutes du pays s’établissant à 8,5 milliards de dollars américains à fin décembre 2024, ce qui représente 13,3 mois de couverture des importations. La banque centrale prévoit une croissance du PIB variant entre 3,5 et 4 % en 2025.
D’autre part, le gouverneur a évoqué la situation de l’inflation dans le monde. Il estime par ailleurs que la guerre commerciale provoquée par les différentes mesures annoncées par la nouvelle administration américaine pourrait impacter le taux de change national alimentant ainsi l’inflation par le canal des prix importés. La Banque Centrale prévoit que l’inflation clôturera l’année 2025 au-dessus de l’objectif médian de 3,5% soit à 3,7 %. Il craint toutefois qu’avec une éventuelle guerre commerciale mondiale qui se profile en 2025, l’inflation nationale ne se révèle plus élevée que prévu actuellement.
La BoM a également mis en œuvre une série de mesures en vue de contenir la dépréciation de la roupie à compter de la mi-novembre 2024. Ainsi, le taux de change de la roupie est resté globalement stable depuis décembre 2024, malgré le renforcement significatif du dollar américain sur le marché. « La roupie s’est appréciée par rapport à l’euro de 1,9 % et par rapport à la livre sterling de 2,7 % », relève Rama Sithanen.