L’association socioculturelle rastafari (ASCR) a, lors d’une conférence de presse organisée au Café du Vieux Conseil mardi dernier, annoncé qu’elle organisera son pèlerinage annuel au Morne ce 1er février à l’occasion du 190e anniversaire de l’abolition de l’esclavage. Cette célébration symbolique et spirituelle aura pour thème “Rekonesans nou lidantite : Pou nou memwar pa efase”.
« Cette célébration symbolique et spirituelle est un moment important pour les descendants africains et malgaches, ainsi que pour la communauté créole. Elle s’inscrit dans la continuité de la marche annuelle, qui débutera à 11h devant le Village hall du Morne jusqu’à Trou-Chenille, un lieu de résistance et de mémoire, pour honorer nos ancêtres et préserver l’essence de notre histoire », explique le porte-parole de l’association, José Rose, avec à ses côtés pour l’occasion Julien Christine, président de l’ASCR, et d’autres dirigeants de l’association. « Ce sera l’occasion de réfléchir sur la situation de la communauté créole et sur l’histoire des descendants à Maurice », dit-il encore.
Il poursuit : « Cela fait 190 ans que nos ancêtres africains, malgaches et créoles ont été libérés des mains des Hollandais, des Français et des Anglais. Nous n’oublions pas ceux qui se sont rebellés au prix de leur vie pour la liberté. Ils ont refusé la loi des colons blancs. » Rappelant les atrocités que ceux-ci ont subies, allant jusqu’à passer sur l’échafaud ou être pendus, il prendra exemple sur le cas de Ratsitatane.
« Ceux qui ont accepté l’esclavage ont dû travailler pour rien afin de faire en sorte que des colons anglais et les Franco-mauriciens continuent de s’enrichir », dit-il. Pour autant, des décennies après, tout n’a pas été réglé. Ainsi, « en 2025, les Créoles continuent de subir l’injustice et le favoritisme sans qu’il y ait de reconnaissance, de récompense ou de dédommagement de la part des Franco-mauriciens et des grands capitalistes, malgré le fait que nous avons versé notre sang et nos larmes pour qu’ils réussissent ». José Rose en est persuadé : la majorité des créoles font partie des défavorisés de la société.
Le porte-parole explique qu’il a fait plusieurs demandes au gouvernement, à commencer par l’inscription de l’ancienne prison, située à l’arrière de l’Emmanuel Anquetil Building, sur la liste du patrimoine mondial de l’humanité de l’Unesco. « Cette prison est porteuse de la mémoire de beaucoup de nos ancêtres. On y trouve encore le couloir de la mort, ou encore la trappe pour les pendaisons, entre autres. Nous demandons au ministre de la Culture de prendre cela en considération, parce que c’est un patrimoine historique », reprend-il.
Il souhaite ainsi que le nouveau gouvernement favorise les projets visant à promouvoir la culture africaine et encourage le Centre culturel africain Nelson Mandela à organiser davantage d’activités. « Il faut qu’il y ait plus d’échanges avec les pays africains et que le centre crée un espace approprié pour les artistes et les Mauriciens. Ce lieu peut accueillir des concerts et devenir une plateforme artistique pour les artistes et la population. »
Il considère aussi que le gouvernement doit accélérer le travail en vue de développer le Musée intercontinental de l’esclavage. Dans ce cadre, il sollicite l’aide du public en vue de recueillir des artefacts associés à l’esclavage, comme des outils et des objets utilisés à l’époque de l’esclavage, et ce, afin de les exposer dans le musée.
« Ce musée ne doit pas avoir honte de montrer les atrocités subies et les ustensiles utilisés pour martyriser les esclaves. De plus, un musée qui se veut intercontinental doit pouvoir montrer l’histoire des pays africains qui ont été victimes de la colonisation et de l’esclavage », continue José Rose. Avant de demander au Morne Heritage Trust Fund et au gouvernement de s’assurer qu’il y ait un kiosque et des toilettes à Trou-Chenille.
Il a également fait mention du projet de l’USCR de construire un tabernacle dédié à Nyabinghi, à Tryang, à Chamarel, et a sollicité l’aide du gouvernement et des ONG pour mener à bien ce projet. Pour lui, « il s’agit d’un lieu spirituel pour ceux qui ont perdu leur culture à travers l’esclavage ».
José Rose a ensuite insisté sur le fait que Maurice est un pays indépendant et qu’à ce titre, « il ne soit pas victime du néocolonialisme pratiqué par n’importe quel pays ». Il a finalement souhaité que l’Afrique devienne un jour l’United States of Africa.