Une onde de choc traverse actuellement la Grande Loge de Maurice (GLM) après qu’une trentaine de membres des respectables Loge St. Jacques No. 2 et et Kilwinning No. 23 ont annoncé leur démission. Week-End est en possession d’une lettre adressée au Très Respectable Grand Maître Bruno Dumazel et aux Grands Officiers de l’institution dont le siège se trouve à Petit Camp, Phoenix.
Week-End écrivait dimanche dernier, les conditions du prêt ayant permis à la Grande Loge de Maurice (GLM) de commencer la construction de son temple à Petit Camp, inquiète les frères, et il y a de quoi. Estimé à l’origine à Rs 19 millions, la construction a allègrement dépassé les Rs 49 millions. Dont Rs 35 millions venant d’un prêt accordé par un frère étranger, installé à Maurice et spécialisé dans la vente d’équipements militaires. Et qui plus est, les frères ont également appris qu’une des conditions du prêt fait que le terrain et le temple de Petit Camp sont la propriété d’un trust sur lequel siègent l’actuel Grand Maître de la GLM, un de ses fils et le frère prêteur, entre autres ! Comme quoi au lieu d’être propriétaires de leur temple maçonnique, les frères n’en seront que des locataires !
Déjà, depuis le début de l’année dernière, des informations troublantes sur la gestion et le fonctionnement de la GLM et le comportement pas du tout maçonnique de son GM avaient été publiées. En décembre, notre confrère Le Mauricien avait publié un article intitulé Enquête sur la Franc-Maçonnerie : La Grande Loge de Maurice (GLM) ou le temple de l’affairisme et de l’opacité. La publication de ces articles, surtout de celui de notre dernière édition, a provoqué pas mal de réactions dans les milieux maçonniques mauriciens et internationaux. La plus importante réaction est venue d’abord de la loge Kilwilling, une des 24 loges affiliées à la GLM. Dans un courrier envoyé le 8 janvier au Grand Maître, aux Grands Officiers et aux Secrétaires de la GLM, 15 frères de la Loge Kilwilling écrivent qu’après mûre réflexion et en citant des cas spécifiques « dont la publication d’articles de presse mettant à mal la réputation de la GLM, affectant la perception de notre institution et engendrant chez nous un profond malaise quand à l’éthique et la dignité de notre engamais par devoir de soumettre notre démission de la GLM et de ses instances affigement », ils annoncent avoir pris la décision « avec regret liés. » Les frères soulignent que cette décision est provoquée par leur « profond attachement aux idéaux de la Franc Maçonnerie – l’honneur, la dignité et l’intégrité– que nous souhaitons préserver dans toute leur pureté ».
Le même jour, la direction de la GLM envoie un communiqué à tous ses frères membres. Après les formules rituels de politesse, elle explique aux destinataires que toute communication concernant un ou plusieurs frères de la GLM doit « impérativement recevoir l’approbation préalable du Grand Secrétaire. » Faute de quoi, « tout manquement à ces règles pourrait entraîner des mesures disciplinaires, conformément à la Constitution de la GLM. » Le lendemain, soit le 9 janvier , 14 membres de la loge Alliance de St Jacques no 02 font parvenir un courrier au très Respectable Grand Maître de la GLM et aux membres de son grand conseil pour les informer de leur démission de la GML avec effet immédiat. Ils justifient cette démission par une série de raisons dont « une gestion opaque et un manque de transparence » ainsi que « d’autres situations, trop nombreuses pour être énumérées, qui ont suscité en nous des interrogations et une profonde indignation. » Donc, en quelques jours, la GLM, qui compte environ 700 membres répartis dans 24 loges, a perdu deux d’entre elles et une trentaine de frères. Est-ce que d’autres loges et d’autres frères, choqués par le fonctionnement de la GLM que certains n’hésitent pas à qualifier de « temple de l’affairisme et de l’opacité », suivront la voie initiée par les loges 02 et 23?La Grande Loge de Maurice réagit aux démissions
Dans un communiqué officiel diffusé hier , la Grande Loge de Maurice (GLM) a pris position suite aux récents articles de presse relatifs aux démissions de plusieurs membres de la Respectable Loge N°2 et No. 23.
La GLM qualifie ces départs de « regrettables », tout en soulignant qu’ils s’inscrivent dans le cadre normal de la vie institutionnelle. Toutefois, l’institution se dit surprise par le timing de ces démissions, survenues peu après l’inauguration de ses nouveaux locaux.
Le communiqué met en lumière des dynamiques internes, évoquant des « ambitions personnelles » et des « égos mal maîtrisés», qui, selon la GLM, révèlent que le travail maçonnique reste un chemin en construction pour certains frères. L’institution appelle à plus de tolérance et d’humilité dans de telles situations.
La Grande Loge de Maurice réaffirme son attachement à ses valeurs fondamentales et à ses objectifs. Selon le communiqué, ces départs ne remettent pas en cause ni l’intégrité ni le fonctionnement de l’institution. Les situations seront gérées avec sérénité et conformément aux procédures internes.
Dans un message inclus dans le communiqué, le président de la GLM, M. Dumazel s’est voulu rassurant :
« Nous demeurons sereins face à ces événements. L’expansion rapide de la Grande Loge de Maurice a pu créer un certain désarroi chez quelques membres. Toutefois, nous restons solidement ancrés dans nos valeurs et respectueux des différentes composantes de l’arc-en-ciel mauricien. »
Il a également rappelé l’ouverture de la GLM à toutes les personnes intéressées par ses travaux, dans le respect de ses traditions et de sa culture :
« La GLM est toujours ouverte à accueillir ceux qui s’intéressent à notre travail. Nous sommes fiers de partager avec le monde les réalisations de nos ateliers et les valeurs qui nous unissent. »
Le communiqué souligne également un moment marquant pour l’institution : la consécration du Grand Temple de la GLM à Petit Camp, le 21 décembre dernier. Cet événement est décrit comme un symbole de l’unité et de la progression de l’institution.
Les motifs officiels des démissions
Les signataires de la Loge Kilwinning No. 23, évoquent plusieurs faits qu’ils jugent préoccupants pour justifier leur démarche de démission:
l Ingérence dans l’autonomie de la Loge
Ils dénoncent des actions récentes interprétées comme une atteinte à la souveraineté de la Loge Kilwinning No. 23, compromettant ainsi « le respect sacré de son autonomie » et l’esprit de fraternité qui les unit.
l Manque de respect du protocole maçonnique
Des démarches administratives impliquant trois frères pétitionnaires – Sylvain Vigoureux, Romain Dumazel et Denis Grandport – auraient entraîné un sentiment d’incompréhension et de déséquilibre au sein de la Loge, en raison du non-respect des règles de courtoisie traditionnelles.
l Actes de désunion
Lors de la Grande Tenue Solennelle du 21 décembre dernier, le frère Romain Dumazel, pourtant membre de la Loge Kilwinning, aurait choisi de représenter une autre Loge, encore en voie de consécration, suscitant des interrogations sur les principes d’unité et de loyauté maçonniques.
l Réputation fragilisée
Enfin, les signataires s’inquiètent de l’impact négatif de récents articles de presse sur la réputation de la Grande Loge de Maurice, ce qui, selon eux, affecte l’éthique et la dignité de leur engagement.
Les membres démissionnaires soulignent que leur choix n’a pas été pris à la légère. Ils affirment vouloir préserver les idéaux fondamentaux de la franc-maçonnerie – l’honneur, la dignité et l’intégrité – dans leur pureté. « Cette décision, bien que regrettable, est
motivée par un profond attachement à ces valeurs », précisent-ils dans leur lettre.Une crise institutionnelle à venir?
Cette démission collective pourrait marquer un tournant pour la Grande Loge de Maurice. Elle met en lumière des tensions internes et pose des questions sur l’unité et la gouvernance de cette institution historique.
La Loge Kilwinning No. 23 occupe depuis longtemps une position révérée à Maurice, avec une influence notable dans dans le domaine politique et des affaires Faisant partie d’un réseau de loges similaires, elle a toujours maintenu un voile de secret, rendant cette démission publique d’autant plus significative.
Ces révélations ont suscité des réactions variées. Tandis que certains considèrent ces démissions comme un simple ajustement interne, d’autres y voient le symptôme de problèmes plus profonds au sein de la loge. « C’est un moment charnière pour la Loge Kilwinning No. 23. Une démission collective de cette ampleur est rare et indique de possibles tensions sous-jacentes qui méritent d’être explorées, » a déclaré l’un des démissionnaires
Conséquences futures
De nombreuses voix du GLM s’élèvent désormais pour demander une transparence accrue afin de mieux comprendre la dynamique interne de ces organisations, étant donné leur influence historique dans divers domaines.