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Constitution bilingue anglais/KM : Un pas de plus vers l’institutionnalisation de la langue maternelle

50 articles en Kreol Morisien seront en ligne et la totalité avant le 28 octobre

Après une année de travail intensif de traduction, la Constitution de Maurice est désormais disponible dans la langue maternelle de la quasi totalité des Mauriciens. La version bilingue anglais/Kreol Morisien (KM) sera présentée, à l’Université de Maurice. Financé par la Higher Education Commission, ce projet colossal intitulé Promoting Institutional Democracy through Language Access in Kreol Repiblik Moris and Digital Media s’étendra avec d’autres initiatives, comme annoncé plus loin. Plusieurs Trainee Project Assistants ont été recrutés pour épauler des linguistes et constituer une équipe sous la houlette du Pr Arnaud Carpooran, afin de traduire les 122 articles de la Constitution, ainsi que des extraits des transcriptions du Hansard et des Standing Orders. La partie digitale du projet a abouti à la création d’un correcteur orthographique et d’un corpus écrit d’au moins 300,000 mots en KM. La mise en ligne de la Constitution en version créole donnera la possibilité à de nombreux citoyens d’avoir une meilleure compréhension de leurs droits fondamentaux dans une langue qui leur est proche. Ainsi, après l’entrée du KM dans le cursus scolaire et à l’université, la traduction de la Constitution constitue une autre étape vers l’institutionnalisation de la langue maternelle des Mauriciens. La participation du ministère de l’Éducation, de l’Akademi Kreol Repiblik Moris, de l’Université de Maurice, du Mauritius Institute of Education, de l’Université de Technologie, de l’Open University, ainsi que du Creole Speaking Union valide cette démarche.

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La traduction des 120 pages de la Constitution de Maurice en langue créole est bouclée. Sa version bilingue anglais/Kreol Morisien sera présentée, demain, à l’Université de Maurice. Le jour du lancement coïncide avec la Journée internationale de la traduction. Pour le Pr Arnaud Carpooran, de la faculté des sciences sociales et humaines de l’UoM et président du Creole Speaking Union, il n’y a pas meilleure occasion pour présenter “le document le plus important du pays” aux Mauriciens. Ajouté à ce détail – qui est loin d’être infime –, les citoyens du pays pourront, dès ce lundi 30 septembre 2024, avoir accès aux 50 premiers articles en Kreol Morisien de la Constitution. Ces articles seront mis en ligne sur un site dédié à la Constitution en langue créole, et le lien sera communiqué au public demain. Le Pr Carpooran indique qu’au 28 octobre prochain, la totalité des articles de la Constitution sera disponible sur ce site. Autre date symbolique, le 28 octobre marque la Journée internationale de la langue créole.

Visiblement heureux, après l’aboutissement d’un travail colossal d’une année, Arnaud Carpooran confie être également impatient de commencer une autre étape de ce projet. Il s’agit de l’enregistrement audio des articles de la Constitution, en langue créole. Toutefois, la particularité de cette initiative réside dans la participation des citoyens mauriciens à la conception de ce projet audio. Le Pr Carpooran indique qu’un appel sera lancé à la population : “Pou sa lanrezistreman odio-la, nou pou invit bann Morisien ki volonter pou vinn lir konstitision an Kreol. Nou anvi ki tou bann Morisien dan zot diversite : zenn, vie, zom, fam, ki zot res dan lavil oubien dan vilaz kapav poz zot lavwa dan sa proze ki inplik inovasion dizital.”

200 volontaires seront appelés à lire les articles de la Constitution. Cette étape vise à rendre la Constitution en version créole plus accessible aux citoyens et se fera l’année prochaine. Par ailleurs, Arnaud Carpooran précise qu’en termes de validation de la traduction, il reviendra aux Mauriciens de faire part de leur appréciation. “Nou pa pe get spesialis. Me nou pe get popilasion. Li pou enn validasion popiler. Rodrig ti fer sa lexersis-la kan li ti fer so lortograf”, ajoute le Pr Carpooran.

Dans un autre temps, il sera question d’une présentation de la Constitution par thème. Chaque thématique sera développée dans des explications en Kreol Morisien. D’autre part, la version créole mauricien de la Constitution sera sujette à des changements lorsque la situation le nécessitera, comme en cas d’amendement.

Traduire la Constitution a été un exercice jalonné de défis, principalement en matière de terminologie dans le registre juridique. Le Kreol Morisien comprend de nombreux emprunts à l’anglais et qui, au fil des années, ont trouvé leur place dans son vocabulaire. De plus, ces emprunts n’ont pas toujours le même sens en français. C’est ainsi, par exemple, qu’après réflexion, l’équipe traductrice a pris le parti de ne pas toucher au mot custody. Il en a été de même pour des noms d’institutions ayant des sigles. “Nou finn kas nou latet ek miray”, soutient Arnaud Carpooran, évoquant les exercices d’équilibriste pour rester fidèle à chaque mot figurant dans la Constitution. “Notre plus gros défi a été la syntaxe lors de la rédaction. Dans la Constitution, les phrases sont extrêmement longues. Or, on n’écrit pas aussi long en créole, et les phrases ne sont pas aussi complexes, d’autant plus que c’est une langue plus orale qu’écrite”, précise l’universitaire.

En cas d’amendement constitutionnel :

La traduction en KM suivra

Avec la campagne électorale en toile de fond, l’amendement de la Constitution est largement évoqué, ces derniers temps. L’alliance contractée (mais pas encore scellée) par le bloc PTr/MMM/ND avec le parti de gauche Rezistans ek Alternativ repose sur un accord qui inclut des changements constitutionnels, en cas de victoire aux prochaines législatives. À l’avenir, tout amendement de la Constitution sera, bien évidemment, suivi par la traduction des textes concernés en Kreol Morisien. Le Pr Arnaud Carpooran se dit prêt à se remettre au travail, si cette éventualité se concrétise. Ashok Soubron, de Rezistans ek Alternativ, donne un aperçu de ce qui attend l’équipe des traducteurs si la Constitution doit être amendée. Le parti milite pour que celle-ci intègre le droit de la nature et souhaite amender la section 1 pour inclure trois des valeurs de l’hymne national : la paix, la justice et la liberté. Ashok Soubron précise que la codification des droits économiques, sociaux et culturels, prenant en compte le travail, le logement et l’éducation, devra également être considérée dans la refonte de la loi fondamentale du pays. Un agencement des sections 31 à 44, dit-il, sera effectué pour faire place au droit de révocation d’un membre de l’Assemblée nationale par les électeurs de sa circonscription. Rezistans ek Alternativ plaide pour la révision de la section sur la discrimination et pour inscrire les élections villageoises et municipales dans la Constitution. Le parti souhaite également introduire une nouvelle section, The right to stand as a candidate, qui permettra aux Mauriciens de se présenter aux élections sans avoir à déclarer leur appartenance ethnique.

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