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Kevin Ramkaloan, CEO de Business Mauritius : « Les sujets fondamentaux devraient être placés au-dessus de la politique »

Dans le sillage de la publication des nouveaux Remuneration Orders par le ministère du Travail cette semaine, Le-Mauricien a rencontré le Chief Executive Officer de Business Mauritius, Kevin Ramkaloan, qui explique que la nouvelle formule proposée contient des incertitudes. « Il faut vraiment l’étudier, le comprendre, se consulter », explique-t-il. Il parle également de ce que Business Mauritius considère comme des priorités pour l’année prochaine, à savoir la régénération côtière, la connectivité portuaire et aérienne, la connectivité digitale et l’inclusion.

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Lorsque Business Mauritius exprime des réserves sur un sujet, cela a une grande résonance. Cela peut vouloir dire insatisfaction. Comment peut-on lire les réserves exprimées par Business Mauritius au sujet des réalignements salariaux ?
Cela veut dire ce que cela veut dire. C’est une question qui nécessite beaucoup de consultations, d’analyses. Concernant les Remuneration Regulations, il faut bien clarifier les choses. D’abord, il y a eu des annonces, il y a plusieurs semaines, à travers une conférence de presse.
À l’époque, nous avions expliqué qu’il fallait qu’il y ait une législation pour vraiment analyser en profondeur et mieux comprendre. Entre-temps, il y a eu les Remuneration Orders qui ont apparu, mais sans la loi. C’était un peu compliqué pour comprendre. Mais la copie officielle des Remuneration Orders n’a été mise sur le site du ministère du Travail que mardi. Ce n’est qu’à ce moment que nous avons vraiment vu la version officielle de ces Remuneration Regulations. Ce qui est proposé est différent de ce qui a été effectué dans le passé.
Nous avons déjà eu un réajustement des salaires suite à la révision du salaire minimum en 2020. Lorsque le réajustement par rapport à la relativité a été effectué, il y avait un tableau qui nous permettait de comprendre les nouveaux Remuneration Orders. Aujourd’hui, il y a deux formules. Une première formule porte sur les Remuneration Orders tels qu’ils étaient l’année dernière et sur les changements apportés cette année-ci. C’est encore lisible. Mais il y a aussi une nouvelle formule qui est appliquée. Et cette nouvelle formule comprend un tableau qui contient des incertitudes. Il faut vraiment l’étudier, le comprendre, se consulter pour cela.
Normalement, les Remuneration Orders stipulent un minimum légal qu’il faut payer. Cela a été le cas pour le salaire minimum. L’idée consistait à mettre un Basic Floor, et ensuite à laisser le reste se débrouiller. Malheureusement, ce n’est pas le cas. Maintenant, on nous dit que pour ce personnel qui touche un salaire supérieur que celui prévu per le RO, il y a encore une formule. Il faut quand même augmenter leurs salaires. Pour nous, ce n’est pas un sujet de montant à payer ou que les entreprises paient ou ne paient pas. C’est une question de compréhension d’une obligation, parce que ce sont des obligations légales. Il y a des réserves dessus parce qu’il faut qu’on analyse pour mieux comprendre ces sujets-là. Une loi doit être claire. Il y a des choses aussi qu’il faut bien comprendre. C’est que c’est important. Enfin, les entreprises qui sont membres de Business Mauritius sont déjà bien avancées dessus.
Aujourd’hui, nous parlons de Remuneration Strategies. Or la relation entre un employeur et un employé doit plutôt être dirigée par rapport à la productivité, à la compétence. C’est ce que nous voulons. Nous voulons retenir, nous voulons engager l’employé. Et c’est pour cela, par exemple, que l’année dernière, Business Mauritius a fait une étude avec un cabinet international sur la National Employer Engagement Strategy. Comment est-ce que nous continuons dans notre objectif consistant à avoir un monde du travail où nous nous sommes engagés, où nous nous sentons engagés ? Et ça, ce sont des sujets de rémunération, des sujets de compétence. C’est vraiment une stratégie de rémunération qui anime tout cela. Et quand nous avons des dispositions qui ne prennent pas en compte le fait que les employeurs ont une stratégie, un engagement avec leurs employés, nous perdons à ce moment-là toute cette richesse qui existe au sein des entreprises, au sein justement de ces Remuneration Strategies. Nous devrions garder ces bons principes de tripartite.
Ces idées acquises de tripartisme consistent à comprendre, à analyser et à trouver des solutions. Ensuite il faut comprendre que les Remuneration Strategies sont riches et sont larges. Il y a des employeurs qui ont entrepris des efforts pour payer au-dessus des RO et d’autres qui se sont engagés dans des accords collectifs. Toute cette richesse devrait être bien comprise et être préservée afin de vraiment engager quelque chose qui soit fort, pérenne et apporte la compétitivité. Il faudrait qu’il y ait un progrès économique, et ce progrès économique demande que tous les facteurs de production soient Rewarded Accordingly, par rapport à la productivité, à la valeur ajoutée, à cette transformation dont je parlais au début. Donc, finalement, c’est cela le vrai défi consistant à créer cette employabilité.

Quelle est la date de la mise en œuvre ?
Aujourd’hui, nous avons demandé aux employeurs de payer pour septembre et ils ont jusqu’à décembre pour payer les mois de juillet et d’août. En sachant que là, ce sont des secteurs qui sont couverts par les Remuneration Regulations, il y a une partie qui est pour les secteurs non couverts, qui sont en train d’être revus par le National Remuneration Board qui est, quand même, une entité tripartite.

Est-ce que vous souhaitez un report dans la mise en œuvre des nouvelles recommandations ou comment ça se passe ?
Pour nous, nous venons d’avoir les Regulations, donc il est important que nous l’étudions en détail, il y a des analyses à faire, nous avons beaucoup de questions venant de nos membres. Nous reviendrons assez rapidement vers nos membres pour des réponses. Ceux qui ont des Administrative Burdens, il faudra voir comment les aider. Mais il est prévu dans cette loi que les ajustements soient faits en septembre, nous ne sommes pas nécessairement là.

Est-ce que les membres de Business Mauritius se sentent bousculés du fait que les élections sont proches ?
En fait, comme je l’ai dit avant, il faut vraiment que les sujets qui sont fondamentaux ne soient pas des sujets électoraux, ce sont des sujets qui sont liés à l’économie du pays, des sujets qui doivent être placés au-delà de la politique. Il y a des sujets sur lesquels il faut travailler ensemble avec toutes les parties prenantes. Pour nous, les questions concernant les salaires, les pensions sont importantes et sur lesquelles il y a besoin de trouver des solutions pérennes à long terme.
Finalement, puisque vous avez fait mention des élections, un sujet qui nous tient à cœur à Business Mauritius est le financement des partis politiques. La dernière fois, juste avant les élections, un texte de loi avait été présenté et a été rejeté. À nouveau cette fois, un projet de loi a été représenté et qui a été rejeté. Il serait important que nous ayons un cadre autour du financement des partis politiques à Maurice. Business Mauritius est en faveur de cela parce que cela permettrait que tous les acteurs, toutes les parties prenantes, le secteur privé leurs propres règles. Aujourd’hui, les ONG sont de plus en plus challengées, notamment avec toutes ces nouvelles régulations, Donc, il serait important que nous ayons cette loi. C’est vraiment un sujet qui dépasse un parti ou une élection, c’est un sujet encore pour la pérennité.

Comment vivez-vous cette situation de hausse des prix, qui est un souci majeur en ce moment ?
N’oubliez pas, quand il y a eu la hausse des prix post-Covid, les entreprises, les membres de Business Mauritius avaient immédiatement pensé à leurs employés. À l’époque, nous avions créé un système qui s’appelait Maurice Solidaire, avec des Vouchers pour aider, etc. Quand il s’agit de compétitivité, quand nous parlons du marché international, d’export et d’import, le sujet devient macroéconomique parce que c’est un sujet qui est lié au taux de change, à la dépréciation, à l’appréciation de la roupie par rapport aux autres devises, et là nous rentrons dans des sujets macroéconomiques et tous les fondamentaux.
N’oublions pas que le premier objectif des banques centrales, c’est de s’assurer de la stabilité des prix. Donc, il y a un Target pour Maurice de garder l’inflation à un certain pourcentage. Il faut vraiment qu’on se donne les moyens de pouvoir le faire. Ce modèle a été testé en Afrique du Sud, économie qui a connu beaucoup de fluctuations des prix et qui a essayé de gérer les prix avec les outils traditionnels. Et dans une conférence récemment, les Sud-Africains ont expliqué que quand ils ont bougé autour de Key Rate pour maintenir le taux d’inflation, cela les a beaucoup aidés. C’est là où il faut se donner tous les moyens pour réussir.

Quel regard jetez-vous sur l’économie en général ?
Maurice connaîtra une croissance économique raisonnable cette année. Le FMI prévoir une croissance de 5% alors que le budget prévoit une croissance de 7%. L’un tient compte de l’année calendaire et l’autre de l’année fiscale. Toutes ces projections prises en compte, nous devrions retourner au niveau de 2019 en termes de croissance.

Quels sont les principaux enjeux auxquels le pays est confronté ?
Pour nous, à Business Mauritius, les réels enjeux s’articulent autour des sujets fondamentaux. Nous parlons de quatre priorités à commencer par la Coastal Regeneration. Le budget propose qu’un fonds soit mis en place assez rapidement. Nous commençons à travailler d’une façon systémique sur ce sujet très important. Nous devons avoir une réponse à l’érosion et à une montée des mers. L’identité de l’île Maurice est liée à nos plages, à nos mers. Par conséquent, c’est très important.
La deuxième priorité est la connectivité aussi bien portuaire qu’aérienne qui est essentielle. La connectivité portuaire est essentielle par rapport au marché des produits et par rapport à comment nous devons envisager notre rôle géographique entre une Asie et une Afrique en pleine croissance. Avec tous ces accords préférentiels que nous avons contractés, nous avons ce maillon important de la procédure du port. Nous notons qu’il y a eu récemment quelques améliorations au niveau portuaire. Le développement portuaire s’inscrit également dans l’économie bleue dans un sens plus large.
D’autre part, nous considérons que les coûts de transport aérien ont beaucoup augmenté aussi et il y a besoin d’améliorer la connectivité pour pouvoir adresser cela.
Le troisième point est la connectivité digitale qui est étroitement liée à l’innovation et au nouveau secteur de FinTech. Le secteur digital et financier est aujourd’hui en plein essor avec l’intelligence artificielle qui a donné lieu à quelques conférences nationales à Maurice ces derniers temps. Toutefois, ces conférences se sont concentrées sur les entreprises technologiques et les universitaires. Il est important que les entreprises mauriciennes, le comité des affaires généralement, puissent travailler ensemble pour d’innovation et l’utilisation de l’IA dans nos processus. Et de l’autre côté, c’est extrêmement important que le RegTech soit mis en place, parce qu’être bien régulé aujourd’hui est une force. Donc pour nous, cette connectivité digitale, financière, avec cette transformation grâce à l’IA est extrêmement importante.
Et la quatrième priorité qui nous tient beaucoup à cœur, c’est celle de l’inclusion. Nous venons de célébrer le Recognition Award la semaine dernière, qui s’appelle l’Inclusive Growth Recognition Award. Une centaine des entreprises mauriciennes, de grands groupes et de petites entreprises s’engagent aujourd’hui à travers les Guidelines to Business Mauritius sur des pans très précis en vue d’apporter de l’inclusion dans les entreprises. Généralement, nous travaillons avec les ONG à travers la Capacity Building et l’aide financière aux ONG.
En parlant de Gender, nous parlons de Diversity, Equity and Inclusion (DEI). Une des priorités consiste à pouvoir emmener ceux qui se retrouvent en dehors de l’Active Labour Force dans le monde économique. Il faut bien savoir que le taux de chômage en Maurice est calculé par rapport à ceux qui sont actifs, donc qui recherchent active de l’emploi. C’est différent des programmes qui existent pour augmenter l’employabilité. Nous devons tous à Maurice avoir cette vision d’inclusion. La communauté des affaires s’y engage.
Globalement, par rapport à nos trois axes, l’économie ; le capital social et le développement durable et inclusif, nous avons des programmes et des projets souvent en partenariat avec l’État et le secteur privé ou avec des agences internationales pour pouvoir ces types de programmes.

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