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Marronnage : lancement du film « Ni chaînes, 
ni maîtres »

Le film Ni chaînes, ni maîtres, du réalisateur franco-béninois Simon Moutaïrou, tourné à Maurice avec 70% de talents locaux,  lancé ce mercredi dans le circuit cinématographique, a annoncé Nine Pictures. Le film, décrit comme « un geste politique » du réalisateur, parle de l’esclavage et du marronnage, et raconte « la reconstruction d’un homme et à travers lui, d’un peuple ». Plusieurs séances, en version originale ou française, sont prévues dans des salles.

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« 1759. Isle de France (actuellement île Maurice). Massamba et Mati, esclaves dans la plantation d’Eugène Larcenet vivent dans la peur et le labeur. Lui rêve que sa fille soit affranchie; elle de quitter l’enfer vert de la canne à sucre. Une nuit, elle s’enfuit. Madame La Victoire, célèbre chasseuse d’esclaves, est engagée pour la traquer. Massamba n’a d’autre choix que de s’évader à son tour. Par cet acte, il devient un marron, un fugitif qui rompt à jamais avec l’ordre colonial. » Le synopsis donne un aperçu de la teneur du film avec, à l’affiche, Ibrahima Mbaye, Camille Cottin, Anna Diakhéré Thiandoum et Benoît Magimel.

Simon Moutaïrou, qui a découvert la montagne du Morne Brabant, haut lieu du marronnage et site mauricien classé patrimoine mondial par l’Unesco, lors d’un séjour à Maurice, explique que le film montre que « la figure de l’esclave, un symbole de souffrance, est remplacée par celle du marron fier et brave ». Ce faisant, il voulait « iconiser les acteurs noirs; leur visage, leur corps, leur voix, et en faire des héros de cinéma », dit-il. « C’était un geste politique », fait-il ressortir dans une interview qui figure dans le dossier de presse diffusé pour l’occasion.

Simon Moutaïrou souligne que « Frantz Fanon a montré que la destruction mentale du colonisé est d’abord la destruction de sa fierté et de son amour de soi ». Ainsi, par ce film, il a voulu « raconter la reconstruction d’un homme et, à travers lui, d’un peuple », affirme-t-il. « Je désire transmettre cet amour et cette fierté ! » Depuis toujours marqué par « la porte de pierre rouge face à l’océan, la Porte de Non-retour », au Bénin, le réalisateur nourrissait le désir de faire de son premier film une histoire qui traiterait de l’esclavage, voire du marronnage, soit des « marrons-esclaves fugitifs qui ont eu le courage de briser leurs chaînes ».

Suite à sa découverte de ce lieu idyllique, avec ses couleurs « bleue et verte », en opposition au « rouge sang de l’histoire », Simon Moutaïrou a passé deux années à se documenter sur cette période de l’histoire de Maurice. C’est ainsi qu’il a eu des discussions avec l’historienne mauricienne Vijaya Teelock, d’abord, avant de se pencher ensuite sur l’ouvrage d’Amédée Nagapen, Le marronnage à l’Isle de France : rêve ou riposte de l’esclave ?, lequel a été une mine d’or pour lui, notamment pour la création de ses personnages.

Il découvrira ainsi Marie-Christine Bulle, connue comme Mme La victoire, une femme considérée comme la plus grande chasseuse d’esclaves de l’époque. « Elle chassait avec ses deux fils », dit-il. Et c’est Camille Cottin qui incarnera le personnage.

Dans sa phase de documentation, le réalisateur s’est aussi entretenu avec des spécialistes de la question, à Maurice comme en France, à l’instar de Thomas Vernet, Khadim Sylla, Gabriella Batour, Stéphanie Tambie, Elodie Laurent Volcy ou encore Flossie Coosnapa. Il s’est aussi beaucoup inspiré de Patrick Chamoiseau, Frantz Fanon, Toni Morisson, Aimé Césaire, Maryse Condé, Birago Diop et Edouard Glissant.

Pour lui, un des moments les plus délicats dans la tâche aura été de savoir « comment parler de la violence qui a accompagné l’esclavage pour ne pas la laisser hors champ, tout en faisant en sorte de ne pas trop en montrer et tomber dans l’écueil de la complaisance ». Le film, dit-il, comporte également une dimension spirituelle.

Et là, il note que l’idée lui est venue de la lecture de Glissant, qui écrivait : « Lorsque l’Esclave entre dans la cale du bateau négrier, il y a un effondrement de toutes ses certitudes. Aucune cosmogonie, aucun dieu, aucune scarification ne peut expliquer ce qui se passe. ». Il doit ainsi l’accès à des informations précises sur la pratique spirituelle dans la culture wolof à Khadim Sylla, « qui en est un spécialiste », affirme-t-il. Simon Matouraï voulait faire un film avec « une texture de réalisme magique », avance-t-il encore.

Ni chaînes, ni maîtres s’inscrit aussi dans une « démarche mémorielle » où le réalisateur souhaite « éveiller les consciences ». Il explique : « L’idée était que ce film puisse introduire dans le débat public le terme de marronnage. Qu’il nous aide à penser la lutte contre l’oppression. » Outre à Maurice, Simon Moutaïrou souhaite que le film soit diffusé en France, aux Antilles, en Guyane, à La Réunion, au Sénégal, au Bénin, ainsi que sur tout le continent africain.

Le film, d’une durée de 98 minutes, est une coproduction de Chi-Fou-Mi productions, les Autres films, Studiocanal et France2 cinéma, avec le soutien de Canal+, entre autres.

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