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Négligence médicale alléguée — Après 2 ans de lutte sans vraie prise en charge à l’hôpital : Kumaree Tulloo s’est éteinte dimanche dernier

l Le courriel envoyé au ministère de la Santé par sa sœur Sweety pour décrier les manquements médicaux ne trouve aucun correspondant l L’hôpital Victoria appelle la famille le mardi suivant son décès pour parler « à la patiente »

C’est une mère dévastée qui crie à l’injustice et à l’indifférence. Inconsolable depuis dimanche dernier, Chandnee Tulloo, déplore la perte de sa fille aînée, Kumaree, âgée de 53 ans. Celle-là même dont on faisait état dans nos colonnes dimanche dernier, car faisant face à de graves problèmes de santé, avec des tumeurs dans différentes parties de son corps, sans pour autant être véritablement prise en charge par les services hospitaliers publics. La sœur de Kumaree, Sweety, se dit « indignée » par cette indifférence dont a fait preuve l’hôpital Victoria, où la quinquagénaire était en traitement. D’autant qu’alors que la famille attend des explications depuis deux ans, ce n’est qu’après l’article publié par Week-End dimanche que le mardi, « l’assistant d’un assistant du médecin » a téléphoné à la mère de Kumaree pour « parler à la patiente ». Il était alors trop tard. Kumaree est décédée aux petites heures dimanche, dans une atroce souffrance.

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Le cri de colère et de désespoir lancé par Sweety Tulloo aux autorités à travers nos colonnes en sus du courriel qu’elle leur avait fait parvenir réclamant des explications et une vraie prise en charge pour sa sœur Kumaree n’ont pas suffi. C’était déjà trop tard. C’est dans une douleur indescriptible que Kumaree s’en est allée aux petites heures dimanche, alors que notre article était publié. « L’appel à l’aide au SAMU a été vain », confie sa mère Chandnee, déplorant qu’on lui aurait répondu que le SAMU « pa vinn sers dimounn malad. Nou pran dimoun aksidan ». Jusqu’à sa dernière minute, on aura laissé Kumaree dans la souffrance. Finalement, ce sont sa mère et sœur qui sont restées à ses côtés pour un peu de réconfort.

« Mo leker segne », dit Chandnee, pensant à « kouma zot finn tret mo zanfan ». Ou plutôt, comment on n’a pas traité son enfant. Car cela faisait deux ans que Kumaree faisait des allers-retours à l’hôpital Victoria. Le cauchemar de la quinquagénaire a démarré en août 2022 alors qu’elle a dû subir une chirurgie pour enlever une grosseur à l’aine droite. Cette opération n’a jamais été suivie d’investigations nécessaires pour déterminer la nature de la grosseur retirée. En l’absence de traitement salvateur, l’état de santé de Kumaree Tulloo s’est par la suite rapidement détérioré avec l’apparition d’autres grosseurs inquiétantes sur différentes parties de son corps. D’abord au niveau de son sein gauche, puis, celui de droite. Si après plusieurs mois, en février dernier, l’hôpital Victoria lui fait subir une biopsie, là encore elle ne recevra ni résultat ni traitement approprié, mis à part des antibiotiques prescrits par le médecin traitant. En dépit des maintes sollicitations de ses proches auprès des services hospitaliers pour savoir de quoi souffrait exactement Kumaree, ils ne recevront aucune indication. Cela, alors que la santé de la quinquagénaire se détériorait de jour en jour.

Faute de moyens, la famille s’appuie toujours sur les services de l’hôpital Victoria. Fin mai 2024, Kumaree observe l’apparition d’une autre grosseur à la base de son cou. Elle est alors hospitalisée et subit divers examens, dont un scanner, une gastroscopie et une endoscopie. Mais là encore, les résultats ne sont pas communiqués aux proches de Kumaree, qui est renvoyée chez elle après trois semaines d’hospitalisation, alors même qu’une persistance des lumps et d’autres symptômes supplémentaires s’ajoutaient à ses douleurs grandissantes.

Si bien qu’en juillet dernier Kumaree est de nouveau admise à l’hôpital Victoria où elle subit une nouvelle biopsie au niveau de la jambe gauche, elle passera trois jours à l’hôpital avant d’être renvoyée chez elle malgré un état de santé suspicieux. « Koumadir zot pe dir pran ou malad ale. Nou pa pou fer narye isi », dit Sweety Tulloo. Sa mère poursuit : « Mo’nn inplor zot gard li, me zot inn donn li desarz aswar lamem. Lerla lanbilans inn amenn nou lakaz », raconte sa mère. « Lanbilans ti pe roul vit. Mo zanfan pe vomi. Mo dir sofer pa roul vit, li dir mwa li prese, ena boukou pasian… »

Si Kumaree est rentrée chez elle, elle ne sait toujours pas de quoi elle souffrait. Ses proches auront toutefois pu entendre du bout des lèvres d’un des médecins qui s’étaient occupés d’elle la suspicion de la présence d’une grosseur près des reins, perturbant leur fonctionnement. Raison pour laquelle Kumaree a été mise sous dialyse « à l’essai ». À l’hôpital, on lui posera un cathéter au cou pour sa dialyse malgré les risques d’infections. « Zot pa finn met fistil. Si inn les li soufer li soufer ar sa kateter-la, zot inn retourn li lakaz ek so lasonn tou », raconte Sweety Tulloo. Et sa mère de renchérir : « Zot inn dir li bizin fer dializ trwa fwa par semenn, pandan enn semenn, apre nou gete ».

Mais cette semaine, du 22 au 26 juillet, aura été fatidique. « Lindi, mercredi, vandredi, Kumaree inn al fer dializ. Sak fwa li ale, kan li retourne, li ti pli malad », confie sa sœur. Après son retour à la maison vendredi suivant sa session de dialyse, son état s’est empiré. « Li ti extra feb. Samdi enn zourne li pa’nn bien », raconte Sweety. La soirée sera encore plus pénible. « Mo ser ti pe toufe, so lipie ki ti extra anfle, ti pe brile. Li pa ti pe trouv kler ousi. Zot vant ti pe extra fermal. Li ti pe dir nou Frote, Frote », dit-elle.

Devant la détérioration de l’état de Kumaree, sa mère appelle le SAMU. « SAMU inn refiz pou vini. Zot dir zot pa vinn sers malad. Zot pran zis dimounn aksidan », dit Chandnee. Seules avec la malade, les deux femmes tentent de réconforter comme elles le pouvaient Kumaree en lui frottant le ventre et les pieds. Après une nuit atroce, dans la douleur, Kumaree s’est éteinte aux petites heures, dimanche matin. Un départ difficile à accepter pour sa mère et sa sœur. D’autant qu’il y a à peine sept mois, le père de Kumaree et de Sweety est décédé. « Li pa fasil, lespas set mwa, mo’nn perdi mo misie ek mo tifi. Enn douler pa ankor fini, lot douler pe segn mo leker », pleure Chandnee.

Au-delà de sa douleur d’avoir perdu sa sœur, Sweety elle indignée. « Kitfwa mo ser ti pou kit nou mem. Me avek tretman lopital inn donn li, avek zot lindiferans, zot inn presipit so depar”. Elle a de nombreuses interrogations qui sont sans réponses depuis deux ans, dit-elle. Pourquoi la famille n’a jamais été mise au courant de la maladie dont souffrait Kumaree ? Pourquoi n’a-t-on jamais administré un traitement adéquat ? Pourquoi il n’y a pas eu une vraie prise en charge ? Pourquoi aucun des trois médecins qui “se sont occupés” du cas de Kumaree n’ont pas assumé leurs responsabilité envers la patiente et la famille ? Où sont passés les résultats de ses biopsies et autres examens ? Eaten by rats ? se demande-t-elle estimant « inacceptable qu’une prolifération de lumps, souvent synonyme de cancer, ne soit pas rapidement investiguée et traitée ».

Des réponses et explications qu’elle espère obtenir la semaine prochaine lors du rendez-vous fixé à l’hôpital. Pour cause, alors que Kumaree était décédée depuis dimanche, mardi, après la parution de l’article de Week-End, un médecin a téléphoné à Chandnee et a réclamé à parler “à la patiente pour lui expliquer son cas qui est compliqué”. En apprend la mort de Kumaree, le médecin, confus, devait expliquer qu’il n’est pas forcément au courant, étant seulement « l’assistant de l’assistant-médecin traitant qui, lui, est en congé ». Ce coup de téléphone de l’hôpital indigne la famille car, d’une part, il était déjà trop tard, mais aussi parce que “aster ki zot pe rod vinn expliquer.” Et surtout, dit la sœur de Kumaree, “si mo ser ti encore là, kouma zot ti pou koz ar li, parski depi li’nn koumans fer dializ, mo ser pa ti pe konpran narye mem”.

Vendredi dernier, Chandnee s’est rendue à l’hôpital souhaitant savoir ce que les médecins avaient à dire. Cependant, comme elle n’avait pas de rendez-vous, on lui a fait comprendre que “dosie pa la. Bizin revini”. Ce n’est qu’en fin de semaine prochaine qu’elle a obtenu un rendez-vous avec le médecin. Des explications que la famille a tenté d’obtenir à travers le ministère de la Santé par le biais d’un courriel envoyé par Sweety la semaine dernière interpellant les autorités sur les manquements criants qui ont caractérisé la prise en charge de Kumaree. Cependant, ce courriel lui est revenu. “On attend les explications de l’hôpital et nous décidons ensuite de la marche à suivre”, dit Sweety Tulloo. Chandnee, elle, déplorant cette indifférence dont a été victime sa fille, et criant à la négligence médicale, dit espérer que “okenn lot para pa pas par sa soufrans trouv zot zanfan pe agonize, alor ki lopital pa finn fer narye pou li”.

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