Au cours de la semaine écoulée, les manifestations marquant l’International Day Against Drug Abuse and Illicit Trafficking ont débouché sur une floraison pléthorique de réflexions, de commentaires et de réactions. Chacun y va de son petit couplet de satisfaction. Légitime, dira-t-on sans plus grande prétention. Puisque l’heure était au bilan.
Dans le camp des autorités, à tort ou à raison, l’étalon de l’offensive contre la prolifération des drogues synthétiques demeure la valeur marchande des stupéfiants saisis. Le Premier ministre, Pravind Jugnauth, s’appuyant sur l’analyse de ses services, se fait fort d’annoncer que depuis 2014, soit ces dix dernières années, de la drogue de Rs 16 milliards a été saisie lors des opérations les unes plus spectaculaires que les autres.
Une performance à inscrire dans la colonne énumérant des actions positives. Oui, autant de doses de drogue enlevées du circuit des marchands de la mort, dont le visage ou même l’ombre, les autorités arrivent difficilement à saisir de manière concrète.
Sinon, depuis longtemps déjà, la stratégie de Kas Lerin Trafikan aura rapporté des dividendes politiquement rémunérateurs, voire l’extermination complète de ces parasites, minant le bien-être de la société.
Mais quelle pertinence compte ce chiffre de Rs 16 milliards pour ces parents et grands-parents, qui vivent le cauchemar d’être assaillis et agressés, moralement et physiquement, pour Rs 500, montant réclamé par des êtres qui leur sont chers et permettant à ceux-ci d’assouvir leur manque.
Une fois cet épisode passé, l’angoisse et la peur de voir tout recommencer l’instant d’après remontent à la surface. « Nou anvi dir ase », de ces mamans accablées, trouve un écho sans commune mesure.
La situation se présente de manière encore plus dramatique quand la société, déjà sous l’emprise du Ticking Time Bomb du vieillissement de la population, fait face à un réveil brutal devant le détonateur du rajeunissement du profil des accros aux drogues synthétiques.
À peine sont-ils éveillés au sens de la vie, qu’ils sont engagés dans la voie sans issue de l’enfer de la drogue. Les travailleurs sociaux engagés sur le terrain avancent que l’âge moyen est dans la fourchette de 17 à 22 ans. Aucune raison de mettre en doute cette affirmation.
Un autre chiffre qui donne froid dans le dos est la réalité, loin d’être synthétique – artificielle. Quelque 60 000 jeunes déjà tentés par le diable des drogues de synthèse. Avec un Average Household Size de 3,3, selon le dernier recensement, l’on parvient facilement à un chiffre de 200 000 touchés de près ou de loin par ce fléau.
À titre de comparaison, avec les dernières mesures budgétaires, le gouvernement a voulu atteindre 310 000 bénéficiaires des prestations sociales ou encore 320 000 salariés avec une CSG Income Allowance plus élevée. Sans compter les 100 000 jeunes, âgés de 18 à 25 ans, ciblés par le forfait mensuel de données gratuit sur le mobile.
À se demander si électoralement, le jeu en vaut la chandelle. Sans aucun doute, la problématique du fléau de la drogue s’installera aux premières loges de la campagne électorale, qui se profile déjà. Même en faisant du Gatecrashing. Nul besoin de se voiler la face devant cette équation.
Le luxe de faire l’économie d’une démagogie déplacée peut s’avérer onéreux. La détresse inconsolable des familles affectées par ladrog pa get figir, parodiant le slogan de la défunte Independent Commission Against Corruption dans son combat perdu d’avance contre la fraude et la corruption, n’a pas de prix.
L’antidote de la campagne axée sur le slogan Tous Unis Contre la Drogue, dans une tentative de mobilisation des jeunes, est-il suffisamment puissant pour renverser la tendance ? Il y a urgence à protéger les jeunes, faisant toujours preuve d’une inclinaison à vouloir tout essayer avec des risques non-mesurés ?
La baisse de 6,6 % dans le nombre de délits liés à la drogue enregistrée l’année dernière au niveau des instances judiciaires ne peut être interprétée comme un signe positif. Avec le danger qui rôde, la méfiance, soit beaucoup plus que la vigilance, s’impose.
Pour une fois, la vice-Première ministre et ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun-Luchoomun, n’est pas dans le déni. Ses propos devant les jeunes venant de collèges, triés sur le volet, au Côte d’Or Sports Complex, mercredi, concèdent de manière synthétique « the growing problem of drug abuse and its profound impact on families and society, underlining the necessity of preventive measures, especially among young people, to protect their future well-being. »
Il y va de ce demain, qui n’est pas à nous…