Politiciennes

Aux dernières élections générales, en dépit du fait que les femmes représentent plus de 50% des Mauriciens, seule une petite poignée de politiciennes a pu accéder au Parlement. Certaines élues directement, d’autres repêchées par le best looser system, pas en raison de leur « genre » mais sur la base de leur appartenance communale déclarée. En dépit de tous les discours adressés aux « madames et jeunes filles » et de toutes les fêtes organisées pour célébrer la Journée internationale de la Femme – où les leaders masculins sont les invités d’honneur –, la femme est toujours dramatiquement sous-représentée au Parlement. Sur 70 députés, elles sont moins d’une quinzaine et au Conseil des ministres, elles ne sont que quatre pour une vingtaine d’hommes. Ces statistiques négatifs découlent du fait que, malgré leurs discours prônant l’égalité et célébrant l’intelligence et le courage des femmes, les leaders des partis politiques continuent à considérer la femme comme une quantité négligeable. Pour ne pas dire un vase à fleur décoratif à qui l’on donne la présidence de l’aile féminine ou du comité responsable des questions féminines du parti. Au gouvernement, on lui attribue d’office le ministère de la Femme et des Enfants, ou alors ceux de la Consommation, de l’Éducation, bref, tous les domaines étiquetés comme concernant la femme. Quand on interroge les leaders sur l’absence massive des femmes dans leurs instances de direction, ils répondent que les candidates sont rares et qu’en période d’élection, on les cherche avec une bougie rouge. Ce qui fait que les rares qui étaient entrées au parti quand elles étaient jeunes filles sont toujours au poste, alors qu’elles sont devenues grand-mères. C’est un fait : les femmes qui veulent faire de la politique sont rares. C’est vrai que la manière de traiter celles qui ont franchi le pas n’est guère encourageante. C’est vrai aussi que le comportement de certaines politiques contre leurs adversaires féminins n’a rien à envier, en termes de brutalité et parfois même de vulgarité dans le discours, à ceux de leurs collègues masculins machos. D’autres se sont ridiculisées non seulement avec leurs discours, mal lus, mais également en prenant certaines initiatives, comme celle de faire écrire leurs noms sur des gâteaux distribués pour la fête de la Vierge Marie.
Si les femmes qui veulent s’engager en politique et se lancer dans la bataille électorale sont rares, il en existe, cependant, qui sont prêtes à pas mal de choses pour obtenir un ticket, comme le démontre cette histoire qui a fait le tour des sièges des partis politiques. C’est l’histoire d’une fille d’un politicien défunt qui s’est mise en tête de reprendre le siège de son père. Accompagnée de sa mère, elle est allée voir le leader du parti de son défunt père pour réclamer le siège de son père, comme si c’était un héritage transmis de père en fille. Quand le leader lui a répondu qu’il ne pouvait pas mettre dehors celui qui avait remplacé son père et avait été élu à sa place, elle s’en alla voir ailleurs. Plus précisément le leader d’un autre parti politique pour formuler la même demande de ticket. Tenté par la possibilité d’avoir une fille de sur sa liste de candidats, le deuxième leader a néanmoins demandé un temps de réflexion. Mais entretemps. les deux partis en question ayant conclu une alliance, la demande de ticket ne fut pas retenue. Ce qui ne découragea pas la demandeuse qui s’en alla voir un autre leader, d’un tout petit parti, qui lui aurait donné satisfaction. Est-ce que les électeurs du père voteront pour la fille capable de changer de parti pour obtenir un ticket ? Réponse à la proclamation des résultats des prochaines élections.
Selon des informations, dignes de foi, il n’est pas du tout certain que le nombre de députées augmente au Parlement après les prochaines élections. Cette incapacité à trouver des candidates frappe tous les grands partis ou alliances qui, jusqu’à preuve du contraire, ne pourront pas, comme ils l’ont plus ou moins promis, aligner au moins une candidate par circonscription. La situation n’est pas meilleure chez les petits partis qui, pourtant, ont visiblement plus d’éléments féminins. Par conséquent, ce n’est pas après les prochaines élections que le rêve de la parité homme/femme sera réalisé. Ni les 30% d’éléments féminins dans les instances parlementaires que réclament les institutions internationales. La femme est l’avenir de l’homme, chantait Jean Ferrat, en s’inspirant d’une ligne d’un célèbre poème de Louis Aragon. Ce n’est malheureusement pas demain la veille que cette prophétie sera réalisée au niveau de la politique mauricienne.

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Jean-Claude Antoine

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