Pour une fois, la fameuse phrase longtemps répétée par Paul Bérenger donne l’impression de sonner juste : les élections sont derrière la porte. Depuis quelques mois déjà, on sent que les choses s’activent, que les préparatifs se multiplient du côté du MSM et de sa kwizinn, qui fonctionne 24/7, dimanches et congés publics compris. En sus des cadeaux qu’il a faits, ces temps derniers, en puisant dans les fonds publics, on dit qu’il a demandé un audit de la performance des ministres et députés au Parlement et sur le terrain.
Ce sont les résultats de cet exercice qui lui serviront de base pour attribuer les tickets. On laisse entendre que le leader du MSM profitera de l’occasion pour procéder à un grand nettoyage et que seront rejetés dans le carreau canne tous ceux qui traînent des casseroles ou ont été mêlés à des scandales. C’est-à-dire pas mal de ministres et de députés qui ont, pour reprendre la formule connue, « zot natte dans coup de vent. »
C’est également le cas des « alliés » du MSM dont la performance au gouvernement et la force électorale sur le terrain seront mesurées. Selon certaines informations, c’est l’annonce de cet audit qui aurait poussé, dans la précipitation et l’affolement, à la création d’une nouvelle alliance.
Au départ, c’était une plateforme qui devait réunir les trois alliés du MSM pour négocier plus de tickets, mais à l’arrivée ils ne seront que deux, Ivan Collendavello ayant préféré claquer la porte qui, paraît-il, lui reste ouverte. Mauvais départ pour une plateforme qui s’est baptisé l’unité militant.
Le leader du MSM ne fait pas que faire un grand nettoyage dans ses rangs, il est pratiquement tous les jours sur le terrain. Les inaugurations et les opérations coupe-rubans se multiplient comme toutes les prises de parole dans des activités socioculturelles, retransmises par la MBC, au cours desquelles Pravind Jugnauth ne rate pas une occasion pour critiquer ses adversaires. Vendredi, il a passé la journée devant le Samadhi de son père à Pamplemousses pour lui rendre hommage, mais également pour recevoir les responsables des branches orange des 20 circonscriptions.
A aussi été mis en circulation sur les réseaux sociaux, ce vendredi, un clip à la gloire du leader du MSM montré en interaction avec divers publics mauriciens. Qu’on le veuille ou non, Pravind Jugnauth est en campagne et s’agite, comme le lièvre de la fable.
Pendant ce temps, que fait l’opposition parlementaire qui a réussi, après deux ans d’efforts, à accoucher d’une alliance ? Pas grand-chose. Les trois leaders se contentent de donner, de temps à autre, une conférence de presse pour dire et répéter tout le mal qu’ils pensent du premier ministre, du gouvernement et de ses mesures.
Sinon, ils se voient de temps à autre, pas toujours les trois en même temps, pour on ne sait pas trop pourquoi. Tout comme on ne sait pas où en sont les travaux de la commission chargée de rédiger le programme gouvernemental. Quand on demande des détails à un des rédacteurs, il explique que les leaders ont demandé le secret absolu sur leurs travaux pour que le gouvernement ne vienne pas « gorer » leurs idées. L’alliance avait commencé par organiser des congrès-meetings qui avaient été des succès.
Masi il aura suffi d’un peu de pluie pour que le dernier congrès soit renvoyé l’année dernière et au début de 2024 car, au prétexte du mauvais temps, se sont ajoutés les carêmes qui se sont succédés, ces dernières semaines. Du coup, la prochaine activité publique de l’alliance de l’opposition aura lieu… le 1er Mai. Un comité conjoint a même été mis sur pied pour son organisation. En attendant, Navin Ramgoolam a réussi à créer un mécontentement chez ses partenaires et même son propre camp en annonçant, lors d’une des rares réunions politiques rouge, la répartition des tickets.
S’il se taille la part du lion, 37 tickets, il n’est pas sûr que les états-majors du MMM et du PMSD soient satisfaits du nombre qui leur a été attribué : respectivement 17 et 8. De quoi fragiliser les fondations d’une alliance déjà fragile et dont certains observateurs se demandent si elles pourront tenir jusqu’aux élections. Résumé de la situation du côté de l’opposition : pendant que Pravind joue au lièvre, les leaders de l’alliance font la tortue. Je sais, vous allez me dire que dans la fable de la Fontaine, la tortue finit par l’emporter sur le lièvre avec la morale suivante : rien ne sert de courir, il faut partir à point. Mais le problème est que les dirigeants de l’alliance de l’opposition sont inertes, se complaisent dans une position entre le sur-place et l’immobilité. Dans la fable, la tortue s’était mise en marche. Ce n’est pas encore le cas de l’alliance de l’opposition, alors que les élections peuvent avoir lieu n’importe quand. Est-ce que d’ici là, les tortues seront sorties de leur sommeil ?