Rappel des faits. Depuis des années, une bande de terre encerclée par la mer et la frontière avec l’Égypte et Israël a été transformée en plus grande prison à ciel ouvert du monde, où l’État israélien avait parqué plus de deux millions de Palestiniens.
Un enfermement de toute une population qui avait été tacitement accepté par les grandes puissances de ce monde, puisqu’il les débarrassait du problème « palestinien » que personne ne voulait régler. Le Hamas, un mouvement de résistance soutenu et financé par Israël, a remporté les élections pour devenir le représentant légitime de Gaza. Le 7 octobre 2023, sa branche armée a perpétré en Israël une attaque qui n’a rien à envier aux pires opérations terroristes, tuant des centaines d’Israéliens et en capturant comme otages des dizaines. Depuis la mi-octobre, la réaction — il serait peut-être plus indiqué d’écrire la vengeance — de l’État israélien a dépassé en ampleur et en horreur les pires attentats terroristes. Une pluie de bombes est en train de détruire tous les bâtiments de Gaza pour « exterminer » les soldats du Hamas, mais en fin de compte, ce sont les civils — y compris les enfants — qui sont les victimes de la vengeance israélienne. Des victimes qui se comptent par dizaines de milliers. Le gouvernement israélien a décidé — et son Premier ministre le répète sans arrêt — que l’opération ne s’arrêtera que quand Gaza aura été totalement rasé. Et tous ses habitants tués ?
Après le 7 octobre, les grandes puissances ont soutenu Israël, lui reconnaissant le droit de venger ses morts. Des présidents, des Premiers ministres et des ministres ont même fait le voyage à Tel Aviv pour soutenir Benjamin Netanyahu, en oubliant le traitement réservé aux Palestiniens vivant en Israël, plus particulièrement la politique d’annexion et d’occupation des terres menées par les « colons ». Certains d’entre eux pratiquent des méthodes qui n’ont rien à envier aux terroristes. Mais quand la vengeance « légitime » a commencé à tourner au massacre, les grandes puissances ont demandé un cessez-le-feu à Israël, sans insister et sans faire pression pour l’obtenir. Aux Nations Unies, les débats se sont suivis en se ressemblant — comme ceux sur la guerre Russie/Ukraine — sans aboutir, puisque les règlements — dépassés — accordent un droit de veto à certaines « grandes puissances » qui en usent et abusent en bloquant les résolutions pour un cessez-le-feu. On aurait continué le jeu des résolutions bloquées, alors que le massacre continue si l’Afrique du Sud n’avait pas contourné les difficultés institutionnelles en s’adressant à la Cour Internationale de Justice. Ce pays africain a accusé l’État israélien de pratiquer à Gaza ce qui pourrait être qualifié de génocide si l’on se réfère à la convention internationale du même nom. Il va sans dire que le Premier ministre israélien s’est dit profondément choqué que l’on ose qualifier l’opération de son armée à Gaza de génocide et a accusé l’Afrique du Sud de tous les péchés… d’Israël en oubliant que ce pays possède une longue et douloureuse expérience en matière d’apartheid et de génocide.
La Cour Internationale de Justice a étudié la plainte de l’Afrique du Sud et a rendu l’avis provisoire suivant, vendredi dernier. « The International Court of Justice has found it is « plausible » that Israel has committed acts that violate the Genocide Convention. In a provisional order delivered by the court’s president, Joan Donoghue, the court said Israel must ensure « with immediate effect » that its forces not commit any of the acts prohibited by the convention. Donoghue said the court cannot make a final determination right now on whether Israel is guilty of genocide. But she said that given the deteriorating situation in Gaza, the court has jurisdiction to order measures to protect Gaza’s population from further risk of genocide. » Voici la réaction du Premier ministre israélien, Benjamin Netanyahu, à l’arrêt provisoire de la Cour Internationale de Justice : « Like every country, Israel has an inherent right to defend itself. The vile attempt to deny Israel this fundamental right is blatant discrimination against the Jewish state, and it was justly rejected.… We will continue to do what is necessary to defend our country and defend our people. » Faut-il comprendre que le droit fondamental d’Israël de se défendre comprend également des actes violant la convention internationale sur le génocide ?
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Les hasards du calendrier ont fait que l’avis provisoire de la Cour Internationale de Justice a été publié vendredi dernier, jour de la célébration du 79e anniversaire de la libération du camp de concentration et d’extermination d’Auschwitz. Où plus d’un million d’hommes, de femmes et d’enfants juifs ont trouvé la mort dans le cadre de la politique de génocide nazie…
Jean-Claude Antoine