Avec la prérogative du PM sous la constitution – élections : chiffres et signes en prélude au signal de la dissolution du Parlement

— National Minimum Wage à Rs 17 000 : financement sous forme d’une ponction de Rs 3,5 milliards de la CSG de la moyenne de Rs 10 milliards collectées annuellement

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— En six mois, deux emprunts publics majeurs de Rs 17 milliards ; soit Rs 8 milliards ($ 184 millions) de la Banque mondiale et Rs 8,9 milliards (200 millions d’euros) auprès de l’Agence Française de Développement

— GM Business, le Financial Crimes Commission Bill, avec les pouvoirs d’instituer des Criminal Proceedings octroyés au nominé politiqué désigné en tant que DG de la FCC aux dépens des attributions constitutionnelles du DPP, met le feu aux poudres

— Redécoupage électoral : le GM déterre le rapport de 2020 de l’Electoral Boundaries Commission avec l’introduction annoncée au Parlement d’une résolution sous la section 39 (4) de la Constitution

Les délibérations du conseil des ministres de vendredi dernier, présidées par le Premier ministre, Pravind Jugnauth, comportent des signes et des chiffres susceptibles d’être interprétés comme des éléments en prélude au signal constitutionnel de la dissolution de l’Assemblée nationale. Certes, comme le Leader of the House et du MSM l’a confirmé lors de la réunion du comité central de la circonscription de Piton/Rivière-du-Rempart (N°7) mercredi, les prérogatives sous la Constitution pour décider des échéances électorales lui reviennent de droit. Donc, nullement question de spéculer sur les dates éventuelles menant à ce prochain scrutin législatif. Sauf que ces chiffres et ces signes, décodés de la série de mesures et d’initiatives parlementaires, revêtent toute leur importance stratégique dans cette conjoncture préélectorale. D’abord, en termes de signes et également de chiffres, l’annonce de la révision à la hausse, soit de Rs 15 000 à Rs 17 000 par mois, du National Minimum Monthly Wage se présente comme un argument principal de campagne électorale pour le compte du MSM et de ses alliés, notamment les groupuscules du Deputy Prime Minister, Steven Obeegadoo, du ministre Alan Ganoo, ou encore d’Ivan Collendavelloo, toujours en attente dans l’antichambre du pouvoir au Treasury Building.

Le chiffre de Rs 17 000, avec un apport complémentaire des Rs 2 000 puisées de la taxe Padayachy sous forme de la Contribution Sociale Généralisée (CSG), se prête volontiers à la controverse. Commentant cette mesure, le leader de l’opposition, Xavier-Luc Duval, de même que d’autres observateurs économiques et syndicaux ne ratent pas de faire comprendre que cette révision du National Wage Minimum, donc une partie de la masse salariale du secteur privé, est financée par les contribuables, avec des cotisations mensuelles à la CSG. Toujours en ce qui concerne les chiffres, avec un potentiel d’alimenter la chronique politique et économique, la dette publique s’invite aux débats. Ainsi, depuis le début du présent exercice financier, le gouvernement a contracté deux emprunts majeurs pour un montant global de l’ordre de Rs 17 milliards, venant se greffer à la Gross Public Sector Debt de Rs 497,8 milliards, chiffres officiels du ministère des Finances au 30 septembre dernier.

En tout cas, le bouclage de l’unfinished government business se résume à la présentation et l’adoption, avant la fin des prochaines vacances parlementaires, du Financial Crimes Commission Bill, un texte de loi de 154 pages et comptant 169 clauses, sonnant le glas de la Prevention of Corruption Act et de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC), à peine ayant fêté ses 20 ans — la fleur de l’âge, dira-t-on. Ce projet de loi, qui sera introduit en première lecture par le Premer ministre ce mardi, laisse entrevoir que des débats marathon du mardi 12 s’annoncent des plus acharnés, avec l’opposition dénonçant la ruse du gouvernement pour octroyer des pouvoirs à un nominé politique, installé en tant que Director General de la Financial Crimes Commission aux dépens des attributions constitutionnelles du Directer des Poursuites publiques (DPP).

Mais attention, une autre initiative du gouvernement jette encore de l’huile sur le feu au début de la dernière année du présent mandat législatif. Le conseil des ministres confirme la démarche du gouvernement de déterrer le rapport de l’Electoral Boundaries Commission de 2020 avec une résolution sous la clause 39 (4) de la Constitution pour présenter une résolution sans débats à l’Assemblée nationale. Au cas où cette résolution est adoptée, de nouvelles configurations des circonscriptions s’afficheront pour la prochaine joute électorale (voir les détails plus loin), dont la date est toujours en suspens, avec le Premier ministre réitérant à chaque occasion qu’il ira jusqu’à la fin de son mandat.

Dans l’immédiat, la question des salaires retient l’attention. Et cela en deux temps. D’abord, comme indiqué das l’édition de dimanche dernier de Week-End, le ministre du Travail et des Relations industrielles, Soodesh Callichurn, a dévoilé le nouveau seuil salarial devant être en vigueur à partir du 1er janvier prochain. Le National Minimum Monthly Wage est porté de Rs 15 000 à Rs 17 000 sans grands frais pour les opérateurs économiques réalisant des profits post-Covid-19 par milliards. Ainsi, les Rs 2 000 addionnelles seront financées à partir de la taxe collectée sous le cachet de la Contribution Social Généralisée (CSG).

Du jamais-vu

Le MSM n’a laissé aucun doute que cette révision du National Minimum Wage fera partie de l’arsenal politique pour la campagne électorale face à l’alliance PTr-MMM-PMSD. « Aujourd’hui, c’est une augmentation de l’ordre de 161%. Du jamais-vu en l’espace de 6 ans ! La preuve que ce gouvernement a à cœur l’intérêt des travailleurs », a déclaré Soodesh Callichurn à l’annonce de cette décision du gouvernement vendredi.
Ainsi, 141 700 salariés se qualifient pour cette révision salariale de base, nécessitant la distribution de quelque Rs 3,5 milliards des quelque Rs 10 milliards de CSG, la taxe Padayachy, collectées annuellement. Par ailleurs, à titre d’indication pour chaque Rs 1 000 d’augmentation de prestations sociales au titre de la Basic Retirement Pension, il faudra prévoir Rs 3 milliards additionnelles pour les quelques 250 000 bénéficiaires. Ce qui fait que la caisse de la CSG devra être encore vide à la fin de cet exercice financier au 30 juin prochain.

Que ce soit du côté du leader de l’opposition ou dans les rangs des syndicalistes, la formule de financement du National Minimum Monthy Wage est dénoncée, dans la mesure où le secteur privé est épargné avec le CSG Cushion. « Eski se pa ankor enn fwa salarie/konsomater mem ki pou sibsidie enn parti peyman saler minimal ? Pou lane 2021 ek 2022, se salarie/konsomater ki finn finanse plis ki Rs 500 miyon saler minimal, o’lie bann gro patron. Si gard mem mekanism pou finans nouvo saler minimal, li for posib ki sibsid ki pou alwe a gro-kapital pou depass Rs 1,5/2 miliar anielman », se demande Ashok Subron après l’annonce du ministre Callichurn.

Toujours en ce qui concerne les salaires, la seconde mi-temps se jouera jeudi, avec le coup de sifflet final du Grand Argentier, Renganaden Padayachy, sur le quantum de la compensation salariale payable à partir du 1er janvier prochain. D’aucuns estiment que la fourchette magique de Rs 1 500 à Rs 2 000 pourrait être de mise en faveur de ceux touchant au moins Rs 25 000 par mois, débordant du même coup les revendications des syndicats.

Néanmoins, l’agenda politique du gouvernement en cette fin d’année fait que les préoccupations sociopolitiques sont partagées entre l’urgence de rétablir en partie le pouvoir d’achat des salariés et les velléités de l’Hôtel du Gouvernement en matière de lutte contre la fraude, la corruption et le blanchiment. Le Financial Crimes Commission Bill de 154 pages, soit 169 clauses, est actuellement épluché au sein des états-majors des partis politiques de l’opposition. Dans le camp du gouvernement, l’on repousse toute thèse de Sinister Motive dans cette démarche.

L’Explanatory Memorandum souligne que « the object of the bill would be, inter alia, to provide for the establishment of the Financial Crimes Commission which would be the apex agency in Mauritius to detect, investigate and prosecute financial crimes, such as corruption offences, money laundering offences, fraud offences, the financing of drug dealing offences and any other ancillary offence connected thereto. »

La définition du profil du premier Director General de la Financial Crimes Commission est sans équivoque quant au choix de Navin Beekarry, l’actuel directeur général de l’ICAC. La clause 10 (e) du texte de loi stipule que « the Director General shall be a person who has served in an anti-corruption body at a senior level for a period of at least 5 years and has wide knowledge and experience at national and international level in the field of financial crimes ». L’autre dira que « the message is loud and clear ». Le contrat du directeur général de la FCC sera d’une durée minimale de trois ans et ne dépassant pas cinq ans. Mais il peut êre reconduit dans ses fonctions.

De ces 169 clauses, la section 142 à la page 114 du texte de loi, avec pour tête de chapitre Prosecution (voir extraits plus loin), retient l’attention des politiques et aussi des milieux légaux avisés. Ainsi, la Financial Crimes Commission sera investie de pouvoirs exceptionnels pour instituer proprio motu des criminal proceedings à la conclusion des enquêtes sous les dispositions de la loi sans passer par le Directeur des Poursuites publiques (DPP). Même si ce dernier peut décider de « discontinue before any Court the criminal proceedings instituted by the Commission. »

Pouvoirs vertement critiqués

Ces pouvoirs conférés au directeur général de la Financial Crimes Commission sont vertement critiqués dans les rangs de l’opposition. Dans une première réaction, en attendant une analyse plus élaborée du texte de loi, Xavier-Luc Duval s’élève contre « cette tentative déguisée de substituer les pouvoirs et prérogatives du DPP sous la Constitution au profit d’un nominé politique à la tête de la Financial Crimes Commission. C’est un attempt de revenir avec la Prosecution Commission Bill d’avant. Nous comptons nous élever avec force ces manigances du gouvernement. »

De son côté, l’ancien Premier ministre, Navin Ramgoolam, maintient que, déjà, lors du congrès de l’alliance PTR-MMM-PMSD à Vacoas le 18 août dernier, il avait évoqué les intentions du gouvernement de venir de l’avant avec une nouvelle loi en vue de permettre à la FCC d’initier des poursuites au pénal sans l’aval du DPP. « Mo ti fini dir sa, ki zot pe rod vini pou by-pass DPP parey kouma zot ti rod fer avec Prosecution Commission », souligne-t-il, faisant ressortir qu’il avait aussi prévenu que « li pou enn lalwa bien danzere e anti-konstitisionel. »

Navin Ramgoolam s’insurge contre le fait que « ki zot pe prepar pou diminie prérogativ DPP ek fer enn lot konplo pou anpes mwa kandida dan prosenn eleksion. » À ce stade toutefois, avant de faire des commentaires plus approfondis sur le projet de loi, il souhaite prendre connaissance du texte plus en détail.
Sans nul doute, ce dossier de Financial Crimes Commission Bill, présenté comme « une arme politique du gouvernement contre ses adversaires politiques », constituera le plat de résistance au rassemblement politique de l’alliance PTr-MMM-PMSD de ce matin à Edward VII, Rose-Hill, en prélude à la séance de l’Assemblée nationale du mardi 12, potentiellement une No Question Time Sitting vu l’adoption d’un Appropriation Bill de Rs 50 millions pour l’exercice financier 2021-22 inscrit au nom de Renganaden Padayachy.

La clause 142 — Prosecution
(1) (a) Following the conclusion of an investigation and the receipt of a report under section 58, the Commission may institute such criminal proceedings as it may consider appropriate for any offence under this Act or the Declaration of Assets Act.
(b) The institution of criminal proceedings by the Commission under paragraph (a) shall be without prejudice to the powers of the Director of Public Prosecutions vested in him to the exclusion of any other person or authority under section 72 (3) (b) and (c) of the Constitution to take over, continue or discontinue such criminal proceedings.
(c) The Director of Public Prosecutions may discontinue before any Court the criminal proceedings instituted by the Commission under paragraph (a) giving such reasons as he may deem fit for such discontinuance before the Court.
(d) Where any aggrieved party is dissatisfied with the decision of the Director of Public Prosecutions under paragraph (c), the aggrieved party may apply to the Supreme Court for a judicial review of the decision. 115
(e) The aggrieved party shall, within 21 days of the date of the decision of the Director of Public Prosecutions under paragraph (c) –
(i) lodge the application for judicial review and the grounds thereof at the Registry of the Supreme Court ;
(ii) at the same time, serve a notice of the application to the Director of Public Prosecutions.
(f) The Chief Justice may make such rules as may be appropriate for the purpose of an application for judicial review under paragraph (d).

2) Notwithstanding any other enactment, an officer designated in writing by the Commission may swear or affirm and file an information for the institution of criminal proceedings before the Supreme Court or any other competent Court for any offence under this Act or the Declaration of Assets Act.

(3) This section shall be without prejudice to the Chief Legal Adviser, or any officer of the Legal Division designated by him, conducting the prosecution for any offence under this Act or the Declaration of Assets Act.

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