Que d’histoires ne se raconte-t-on pas sur le paradis et l’enfer. Mythe ou réalité, à chacun sa vision, dépendant de ses croyances. Mais quoique le concept soit né avec les religions, il est une évidence certaine : l’équilibre fragile entre ces deux endroits extrêmes, au sens propre ou au figuré (ou les deux, à vous de voir), pourrait bien pencher plus rapidement que prévu en faveur des ténèbres. Ceux suivant l’actualité internationale n’auront d’ailleurs certainement pas manqué cette information qui fait « froid dans le dos », à savoir que le mois de septembre dernier aura été hors-norme en termes d’élévation de températures. Et ce n’est hélas que le début, les experts du service européen Copernicus nous prévenant que bien que caniculaire, le mois de septembre sera plus que probablement le moins chaud… du reste de notre vie.
L’information a pourtant été relativement passée sous silence, banalisée, reléguée le plus souvent en fin de JT, bien après donc d’autres titres que nous jugeons éminemment plus importants, tels que les combats au Proche-Orient ou encore la guerre en Ukraine. Certes, il nous faut bien reconnaître que le changement climatique n’est pas très « vendeur », et qu’à force de nous ressasser que le climat déraille, le public commence sérieusement à en avoir ras le bol. Après tout, quoi d’étonnant ? Cela fait maintenant plus de dix ans que l’on nous ressort les mêmes discours, les mêmes tristes records, chaque année étant plus chaude que la précédente. Et cela ne nous empêche pourtant pas de vivre, pas vrai ? Oui, mais pour combien de temps encore ?
Ce que les journaux ne disent pas, ou du moins très peu, c’est que le mois de septembre ne se sera pas simplement contenté d’être plus chaud que la normale (+2,51 °C que les normales en Europe); il regorge en plus de cela d’anomalies climatiques. Notamment lorsque l’on compare la température enregistrée à la moyenne des mêmes mois de 1850 à 1900, avec un effrayant constat : septembre 2023 aura été en moyenne 1,75 °C plus chaud. Sachant que l’objectif de l’Accord de Paris, à l’issue de la COP 21, visait à contenir les hausses de températures sous le seuil critique des +1,5 °C par rapport à l’ère préindustrielle, et que pour la totalité de cette année, le réchauffement mondial est estimé à +1,4 °C, on commence à comprendre que la situation est loin d’être réjouissante. Et comme pour enfoncer un nouveau clou dans le cercueil de l’humanité, les scientifiques vont jusqu’à affirmer que la barre fatidique des +1,5 °C sera franchie d’ici les prochaines années. Sic !
On l’aura compris, l’enfer sur Terre, c’est pour demain. Et ce, quand bien même nous arrêterions immédiatement de polluer l’atmosphère. Ce qui ne signifie pour autant pas (encore) que l’humanité et le reste du vivant (dont nous ne représentons qu’une infime partie) finissent par disparaître, même si les années à venir promettent d’être pénibles. La solution ? Ramener sans tarder nos émissions de gaz à effet de serre au fameux « net zéro ». Ce qui semble mal embarqué au vu du peu d’enthousiasme que nous témoignons à nous sortir de cette dangereuse spirale.
Certes, on nous fera remarquer que la traditionnelle grand-messe du climat s’ouvre dans quelques semaines à Dubaï, et que dès lors, tous les espoirs sont permis. A cela, nous ferons remarquer que ce n’est pas d’espoir dont nous avons aujourd’hui besoin, mais d’actions, et que selon toutes probabilités, la COP 28 ne sera pas bien différente des autres éditions. Car outre le fait d’être organisée dans la ville-émirat de tous les excès, véritable symbole du gaspillage de nos maigres ressources, tout semble en effet pour l’heure indiquer que cette montagne onusienne accouchera, une fois de plus, d’une souris. Autant dire de quelques timides concessions çà et là, qui plus est non contraignantes.
Cette timidité à agir face à l’urgence climatique paraît paradoxale, sachant qu’il y va de notre survie, mais peut en réalité se comprendre, tant l’ordre du monde est depuis longtemps déjà sous le joug d’une dictature économique institutionnalisée. Avec comme seul mot d’ordre de ne jamais toucher au développement et à la croissance. Or, aucune sortie de crise ne peut être possible sans un changement radical de paradigme social. Problème : l’humanité n’est pas prête à négocier ce tournant. Quand bien même nous nous retrouvions tous en enfer !