L’hôpital public de Balasore, le plus proche du site de la pire catastrophe ferroviaire de ces dernières décennies en Inde survenue vendredi soir, a été le théâtre de décisions cornéliennes, de vie ou de mort, prises par le personnel médical.
Presque toutes les minutes, la sirène d’une ambulance à l’extérieur du Fakir Mohan Medical College and Hospital annonçait l’arrivée aux urgences d’un nouveau groupe de blessés, pour la plupart grièvement dans l’Etat de l’Odisha, dans l’est du pays.
Les médecins ont dû poser des diagnostics dans l’urgence, espérant sauver les uns et baissant les bras pour d’autres.
– « Situation de guerre » –
C’était « une situation de guerre, au flux incessant », confie à l’AFP le docteur Sibanand Ratha, trois jours après la tragédie.
« Tous les patients présentaient de graves traumatismes, avec des blessures à la tête, des membres amputés, des blessures à la poitrine et des difficultés respiratoires », raconte le médecin de 35 ans.
D’autres étaient au bord du trépas quand certains avaient déjà expiré. Sauver des vies, c’était la priorité. « Mais il y a eu trop de précipitation », regrette-t-il.
Les équipes « devaient décider à qui accorder la priorité la plus élevée », admet-il, c’est-à-dire à ceux qui avaient les plus grandes chances de survie.
« On ne doit pas le dire mais, en tant que médecin, on sait bien quand un patient ne survivra pas », confie-t-il.
La journée de vendredi s’était déroulée comme à l’ordinaire quand tout le personnel médical a reçu un message de réquisition, appelant même les personnes en congés à se rendre immédiatement à l’hôpital.
Le médecin savait qu’il s’agissait d’un accident de train mais il ne s’attendait pas à cette ampleur, « n’aurait pu l’imaginer ».
Il a « travaillé sans relâche pendant que la soirée se transformait en nuit puis le lendemain aussi ».
Les équipes médicales ont pris en charge de « 400 à 500 » personnes dans la nuit de vendredi, dit-il, « bien que nous n’ayons pas compté mais les ambulances affluaient ».
« Nous stabilisions les patients et les envoyons en soins intensifs. Les cas les moins critiques étaient transférés en orthopédie », continue-t-il, « quiconque présentait des blessures à la tête et à la poitrine était transporté en chirurgie ».
– Dons de sang salvateurs –
Les dons de sang par les habitants de la ville organisé à minuit « ont vraiment aidé », souligne-t-il, ainsi que le service d’approvisionnement qui a travaillé toute la nuit pour s’assurer que tous les médicaments nécessaires étaient disponibles.
Au moins 275 personnes ont perdu la vie dans l’accident et sur les 1.175 blessés, 382 étaient toujours soignés dans différents hôpitaux de l’Etat lundi.
Les personnes dans un état critique ont été transférées dans des grands hôpitaux, mieux équipés, dans la région de Bhubaneswar, la capitale de l’Etat mais beaucoup ont été admis à l’hôpital de Balasore.
Lundi, il était encore bondé de survivants et de parents à la recherche d’êtres chers, outre les malades ordinaires.
Le personnel médical local continue de faire des heures supplémentaires depuis la collision et il faudra encore quelques jours avant que la situation ne se stabilise.
C’était le jour de congé de Kshitiz Guglani, un orthopédiste de 25 ans, réquisitionné comme les autres personnels. Il s’est à peine accordé une pause depuis.
La plupart « des patients présentent des polytraumatismes », dit-il.
Anil Marandi, 29 ans, un ouvrier d’une tribu du Jharkhand, a montré au personnel du bureau d’assistance principal des photos d’identité de son frère, son beau-frère et d’un ami, qui voyageaient dans l’un des trains express.
« Je n’ai trouvé que deux corps pour l’instant », confie-t-il en larmes. « Je cherche toujours le troisième. »