Et s’il était déjà trop tard ?

La question mérite d’être posée, même si, de notre humble avis – partagé cependant par un grand nombre d’experts –, les jeux semblent déjà faits. Alors réponds-y d’emblée : oui, il est trop tard ! Trop tard pour enrayer cette mécanique infernale. Mais de quoi parle-t-on ? Du réchauffement climatique ? Oui… et non. Oui, parce qu’il s’agit bien du problème de fond, celui qui, comme tout mariage de raison, nous promet surtout le pire, avec son lot de catastrophes pour l’humanité et le reste du vivant. Et non, car pour survivre au désastre annoncé, et avant cela de tenter d’en minimiser l’impact, il est un autre fléau, bien plus pernicieux encore, que l’on se devrait d’endiguer, mais que l’on se refuse pourtant de voir comme tel : notre appareil économique !

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C’est un fait : la tragédie planétaire a déjà commencé, et rien ne l’arrêtera. Car notre vision est obstruée, depuis trop longtemps certainement que nous sommes à porter les ornières de notre confort. Du coup, certains ignorent le danger, ne le comprennent pas. Tandis que d’autres se refusent de le voir, enfermés dans le déni. Se forçant à croire que l’on peut toujours « faire quelque chose ». Et donc à remettre à plus tard ce que l’on aurait donc dû déjà faire depuis longtemps. « Après tout, on a encore le temps, non ? Il ne fait pas encore trop chaud pour la saison… »

Alors oui, il est trop tard. Trop tard pour mettre en branle une nouvelle mécanique sociétale, un changement de paradigme si rapide et radical qu’il est devenu tout simplement inenvisageable, et encore plus à l’échelle mondiale. Pendant ce temps, nous continuons de larguer dans l’atmosphère des dizaines de milliards de CO2 chaque année. Sans s’en rendre compte, car on ne le voit pas. Nul doute que si l’on pouvait un instant donner une couleur à ce dangereux gaz, nous serions alors contraints de comprendre que « finalement, ça ne va pas si bien que ça » ! Hélas, le ciel reste aussi bleu qu’il l’a toujours été. Même souillé de notre insouciance.

Dans le même ordre d’idée, l’on ne mesure toujours pas la signification des « +1,5 », « +2 » et « +3 °C » que l’on nous serine à chaque fois qu’il est question de changement climatique. « Deux ou trois degrés de plus ? Et alors, ça va changer quoi ? Il fera un peu plus chaud, c’est tout ! » Pourtant, les signes sont déjà là : tempêtes et ouragans, sécheresses et canicules, inondations, grêle, feux de forêts… De quelles autres informations avons-nous besoin ? Que le réchauffement global soit aussi vaste, lent et invisible ne nous dédouane pas de notre cécité. Pas plus que de notre responsabilité, en tant qu’espèce « intelligente », quant à la survie de l’écosystème global.

Notre désinvolture vis-à-vis du défi climatique – bien que somme toute calquée sur le message renvoyé par ceux aux manettes du système – résulte de l’extrême lenteur et l’invisibilité de la menace, et qui ont pour effet de rendre cette dernière peu convaincante. Sapiens ne peut tout bonnement pas composer avec le caractère dynamique, inexorable et planétaire des phénomènes. Excepté bien entendu lorsque l’ennemi frappe violemment, comme l’aura fait par exemple le virus de la Covid.

Imaginons cependant (pure utopie) que nous ayons tous conscience de l’urgence, qu’aucun humain ne la mette en doute. Que ferions-nous ? Que feraient nos gouvernements, nos États ? Créeraient-ils une COP afin de penser un système plus vertueux, plus équitable, où les concepts de profitabilité et de croissance seraient absents ? Reverait-on notre copie 100 fois pour en proposer une débarrassée de toute notre vanité et notre appétit insatiable ? Et même… Comment s’y prendraient nos politiques pour nous « vendre » cette nouvelle manière de voir ? Pure utopie, nous vous le disions. D’autant que nous n’en avons de toute façon plus le temps.

Posons autrement le problème ! À la question de savoir si nous pouvons encore enrayer le changement climatique, la réponse est « oui ». Le fera-t-on ? Cette fois, c’est clairement « non » ! Car pour y arriver, il nous faudrait jeter aux orties notre système – seul garant selon nous de la stabilité et de la sécurité mondiales. Or, il est évident, pour peu que l’on suive un peu l’actualité internationale, que les signes du changement sont aussi invisibles que ne l’est le dioxyde de carbone, la quantité en moins. Dit autrement : « Se débarrasser de l’autobroyeur économique ? Il n’en est foutrement pas question ! » On vous avait prévenu; il est déjà trop tard !

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