Un monument s’en est allé. Serge Lebrasse a tiré sa révérence. La scène musicale locale perd encore un autre de ses grands. Ce ne sont pas que les artistes qui le pleurent, mais toute la nation. Quand passe “Madame Eugène” à la radio, c’est toute la nostalgie d’une période qui semble bien révolue qui revient en mémoire. Souvenirs de ces jours où ni Internet ni Netflix ne régnaient en maître, et où ces ségas suffisaient à inviter la chaleur dans les foyers modestes.
C’était au temps d’une île Maurice qui cultivait de vraies valeurs. Pas celles de s’en mettre plein les poches en s’adonnant à quelque trafic ou de blanchir des sous mal gagnés. Le temps où les citoyens se nourrissaient de convictions réelles comme la force du travail et la promotion méritée pour avoir fourni des efforts. Et ne se servaient pas de prête-noms ou de proximité avec des groupuscules et des socioculturels pour gravir des échelons. Les jours où l’entraide et le vivre-ensemble se moquaient bien des appartenances ethniques. C’était le temps où nos racines prenaient leurs assises fermes et solides dans le sol riche et dense de nos cultures mélangées. Un temps où nos parents nous couvaient, certes, mais nous donnaient aussi la fessée !
L’autre monument qui a défrayé la chronique, cette semaine, c’est sans conteste le cardinal Maurice Piat. L’annonce faite en la cathédrale Saint-Louis, qu’il célébrait peut-être sa dernière messe chrismale en tant qu’évêque de Port-Louis, a sonné comme le glas. Ses mots ont rempli une foule de cœurs de peine, peu importe les religions.
Depuis plusieurs années, le chef de l’Église catholique a pris son bâton de pèlerin. Conscient des fléaux sociaux qui gangrènent le pays et qui rongent gravement nos jeunes, surtout la drogue qui détruit et déchire d’innombrables foyers, Maurice Piat a inlassablement lancé des avertissements et mis en place des structures d’encadrement. Aux décideurs politiques, mais aussi aux autres chefs religieux de toutes les communautés cohabitant ici, il a martelé sa détresse.
L’évêque de Port-Louis est allé encore plus loin. Avec la pandémie de Covid-19, le conflit russo-ukrainien et les autres raisons qui ont fait grimper le coût de la vie, le religieux a souvent axé ses interventions sur les injustices répercutées sur le peuple. Et dimanche dernier, le cardinal Piat en a bouleversé plus d’un. Égratignant au passage politiques et autorités, soulignant leurs manquements dans de nombreux dossiers brûlants, comme l’affaire Franklin et la chanson controversée d’un groupe d’élèves du RCC. Bien évidemment, ses prises de positions et ses mots sans vernis font mouche, voire dérangent.
La preuve ? Lors de sa rencontre avec Pravind Jugnauth cette semaine, celui-ci a « reproché à l’Église de réagir à partir de faits non avérés », lit-on dans le communiqué de l’Évêché. Pourtant, tant le chef du gouvernement que Maurice Piat ont évoqué le même cancer qui ronge notre pays : la mafia qui gangrène et pourrit nos institutions et ses hommes.
Piat s’est démarqué. En descendant sur le terrain et pratiquant la proximité avec tout le peuple mauricien, il s’est distingué en étant présent auprès de toutes les composantes de la nation. Résultat : le religieux fait l’unanimité dans les cœurs. Chose qui manque cruellement au chef du gouvernement, trop engoncé dans ses entourages socioculturels, surtout.
Pravind Jugnauth gagnerait à changer de tactique. Non pas en se la jouant populiste, mais en faisant preuve de fermeté face à ceux qui fautent. Dans les scandales éclaboussant ses ministres, qu’il s’agisse de Yogida Sawmynaden (l’affaire Kistnen), ou de Maneesh Gobin (l’affaire Franklin), ce Premier ministre peine encore et toujours à prendre des décisions franches et finales. Donnant ainsi l’impression d’être l’otage des uns et des autres. Sa fermeté, il la traduit davantage par la répression.
L’ambiance au Parlement, qui n’en est qu’à sa deuxième séance, ne s’arrange nullement. Chaque nouvelle séance semble une aubaine pour le Speaker d’illustrer à quel point il peut être… “loud”.
Et pendant ce temps-là : « To amize aster, to zanfan ki pou soufer. To mantalite pankor sanz to manier. Kan rasinn pe brile, pye antier pou tonbe, tou zwazo pou bizin pran lezer… »