Scénario inépuisable puisque répété tous les ans : ce n’est que quand les réservoirs commencent à se vider que l’on découvre que nous sommes en situation de sécheresse. C’est alors que l’on se met à contempler le ciel en priant que tombent les pluies d’été. Et quand elles finiront par tomber, des millions de mètres cubes d’eau traverseront le pays, des montages à la plage, dans des ruisseaux sortis de leurs lits et ressemblant à des rivières en crue pour aller se perdre dans l’océan. C’est à la fin de l’année, quand les rivières sont réduites à la dimension de ruisseaux et que les nappes souterraines sont asséchées que l’on sortira cet « argument » inépuisable : au moins la moitié de l’eau transportée par la CWA se perd en cours de route en raison de la vétusté des tuyaux. Cela fait des années que ce refrain est chanté au consommateur qui doit faire la queue pour remplir ses seaux de l’eau que distribuent les camions-citernes loués par la CWA. Une eau dont il vaut mieux ne pas demander la provenance… Et pendant que les habitants des quartiers, des villages et des cités ouvrières feront la queue avec les seaux, ils verront passer d’autres camions-citernes. Ceux qui, eux, vont remplir les piscines des résidences IRS. D’un côté, le seau, de l’autre, la piscine : une autre image de l’été mauricien. Cela fait des années que le Dr Beebeejaun, alors ministre de l’Eau – distribuée au compte-gouttes – avait expliqué que la faute en incombait aux tuyaux usés, tellement vieux qu’on ne savait même plus où ils avaient été enterrés. Dans cette déclaration qui remonte à des années — le ministre avait dit que Port-Louis perdait la moitié de l’eau qui était acheminée par les tuyaux de la CWA. Il serait intéressant de savoir à combien se monte aujourd’hui le pourcentage des pertes. Juste pour avoir une idée des progrès accomplis depuis — s’il y en a eu — dans la chasse aux tuyaux percés.
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Les opérations de la Special Striking Unit de la police sont effectuées, a-t-il été expliqué, à partir d’un protocole rigoureux. Scientifique même. Première étape : des renseignements sûrs, obtenus d’une source fiable, sur les agissements d’individus louches, de trafiquants en puissance, font l’objet d’un briefing où, après analyse, l’opération est décidée. L’étape suivante est celle du branchement du radar — celui de la police, pas du Premier ministre ! — sur les suspects potentiels. Une surveillance discrète est alors organisée et au cours de laquelle les suspects sont pris en filature. Leurs allées et venues sont enregistrées par les caméras du système Safe City – quand ils sont en état de fonctionnement. Puis, quand l’unité est certaine que les suspects sont des trafiquants, que les produits qu’ils trafiquent sont en leur possession et que, donc, tous les éléments sont réunis pour une descente des lieux, la perquisition est décidée. Comme dans les séries télé, les membres de l’unité encerclent le domicile des suspects — qui sont alors considérés comme des trafiquants — et éloignent les voisins. Ils pénètrent dans la maison, menottent les trafiquants et saisissent les produits illicites qui seront produits comme des preuves accablantes devant le tribunal. Et pour que la population sache que l’unité fait son travail en arrêtant les trafiquants et qu’elle peut donc dormir sur ses deux oreilles, des informations de l’arrestation et des produits saisis — et surtout leur valeur marchande — sont communiquées à la presse. Dans certains cas, des images de l’opération secrète sont même données à la MBC. Mais si l’opération — vous avez deviné de laquelle il est question — a été montée dans les règles de l’art, pourquoi est-ce qu’à la place de la drogue synthétique on a trouvé des graines de tokmaria, des répliques de vieux pistolets de collection à la place d’armes d’assaut, et aucune empreinte du supposé trafiquant en chef sur le sac de haschish ? Est-ce que la Special Striking Team aurait monté toute cette opération sur la base de tuyaux percés ?
Jean-Claude Antoine
PS : Cette semaine, Réunion la 1ère a diffusé « gratter la mer et repeindre le ciel » un documentaire sur le naufrage du Wakashio et sa vague noire, vu par des habitants du sud. Réalisé par David Constantin, ce documentaire financé par des institutions mauriciennes a été diffusé sur une chaîne de télévision étrangère. Cela rappelle les jours Kaya, où pour suivre l’actualité mauricienne, il fallait se brancher sur RFO Réunion, la MBC ayant eu pour consigne d’ignorer ce qui se passait à Maurice.