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Bonne gouvernance : le NCCG invite les corps parapublics à se faire évaluer

  • Aruna Radhakeesoon (NCCG) : « La bonne gouvernance ne concerne pas que le secteur privé »
  • Les entreprises cotées progressent rapidement, mais des manquements sont observés

Un grand pas est fait au niveau de l’évaluation du degré de bonne gouvernance au sein des entreprises cotées en bourse avec la publication du tout premier “assessment report” du Scorecard par le National Committee on Corporate Governance (NCCG). Grâce à ce nouvel outil, les entités publiques ou privées seront désormais capables de mesurer leur niveau de gouvernance afin de progresser, et ce, par le biais de 66 Key Performance Indicators (KPI) gravitant autour de trois grands axes : “Board effectiveness”, “Audit oversight and effectiveness” et “Relations with Shareholders”.

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Le premier rapport d’évaluation a été compilé grâce à la participation de 21 entreprises cotées en bourse, qui se sont portées volontaires pour être évaluées par le Scorecard. L’exercice de notation a été effectué avec le soutien de la firme PwC, sélectionnée suite à un appel d’offres, et d’un jury indépendant composé de professionnels de grande expérience.

Présentant les conclusions du premier rapport d’évaluation du Scorecard, Aruna Radhakeesoon, présidente du NCCG, en profite pour faire le point sur différents manquements au sein des organisations privées et publiques en matière de gouvernance. En premier lieu, elle met les corps para-étatiques devant leurs responsabilités, les invitant à participer au deuxième round d’évaluation du Scorecard.

Insistant sur le fait que la bonne gouvernance ne concerne pas que le secteur privé, elle rappelle que le Code de bonne gouvernance s’applique également au secteur public, et trouve « étrange » que les CEO et directeurs de corps para-étatiques et SOE (State-Owned Enterprises) ne soient pas membres des conseils d’administration des entités respectives.

Aruna Radhakeesoon trouve « encore plus étrange » que les boards de ces organismes « do not cater for independent directors ». Elle plaide pour que les lois relatives à ces organisations soient revues « to bring them in line with modern governance practices », précisant que « it is not in our interest to wait for another “FATF type saga” to start making those changes ».

Abordant la question de la diversité sur les conseils d’administration, la présidente du NCCG met une fois de plus les points sur les i. Évoquant le fait que la plupart des grosses entreprises cotées en bourse sont des entreprises dites « familiales », elle met en garde contre le « over-boarding », c’est-à-dire les administrateurs qui siègent sur plusieurs boards, ainsi que le « cross-directorship ». Elle affirme que le NCCG recommande, ni plus ni moins, la « phasing out of this practice ». Il faut, dit-elle, privilégier le recrutement de nouveaux administrateurs, avec une variété de compétences et différents parcours professionnels, « to add stimulus to boardroom discussions ».

« We are not doing well »

Aruna Radhakeesoon n’a pas été tendre non plus sur la question de la diversité des genres au sein des conseils d’administration, car le constat est sans appel. « We are not doing well as a juridiction on this front », dit-elle, puisque le pays se classe 105e sur 145 pays au Global Gender Gap Index. Elle souligne que « l’excuse » qui est présentée pour expliquer le manque de femmes sur les conseils d’administration est « the pool of female directors in Mauritius is too small ».

Si tel est vraiment le cas, dit-elle, « then let’s come together to create it ». À ce stade, la présidente du NCCG évoque en détail diverses solutions pour permettre aux femmes de gravir les échelons pour atteindre les boards. Autre manquement observé : beaucoup d’administrateurs « are not taking their continuous training and development seriously », alors que la formation continue des board members est un must.

Pas moins de 21 sociétés cotées à la Bourse de Maurice ont participé volontairement à cet exercice d’évaluation, soit Ascencia, Caudan Development, Ciel, ENL, IBL, Les Gaz Industriels, Lottotech, MCB Group, Medine, MUA, National Investment Trust, New Mauritius Hotels, Promotion and Development, Quality Beverages, RHT Holding, Rogers, SBM Holdings, Semaris, Sun, Swan General et Terra Mauricia. Les principaux critères de notation du Scorecard incluent la transparence, la gestion financière, l’intégrité, les relations avec les parties prenantes de l’entreprise, le développement durable, la création d’emplois et la conformité.

Les principales conclusions de ce premier exercice de notation révèlent une image mitigée, avec un écart significatif dans la performance des entreprises, les scores atteints variant de 24 à 81%, avec une moyenne de 54%. Neuf entités ont obtenu un score supérieur à 60%, alors que huit d’entre elles n’ont pas atteint plus de 50%. L’élément marquant qui ressort est l’efficacité du conseil d’administration. La moyenne obtenue par l’ensemble des entreprises sous ce critère est de 61%.

Les sociétés obtiennent des résultats relativement corrects pour ce qui est de la divulgation de la composition, de la force et de l’expérience de leur conseil d’administration et de leurs sous-comités. La moyenne pour la surveillance et l’efficacité de l’audit est inférieure, et atteint 51%. De nombreuses entreprises ne fournissent pas suffisamment d’informations sur leur gestion des risques, leur audit interne et leur audit externe.

Où sont les administrateurs indépendants ?

La moyenne concernant les relations avec les actionnaires, les parties prenantes, le développement durable et l’inclusion est de 49%. Les entreprises sont à différents stades de leur stratégie de développement durable et de leur inclusivité, ce qui se voit d’ailleurs dans la notation. Un certain nombre d’entre elles divulguent très peu d’informations ou n’ont pas dépassé le programme CSR, tandis que d’autres excellent à démontrer l’intégration du développement durable et de l’inclusion dans leur stratégie, atteignant leur culture d’entreprise, leurs opérations commerciales et leur prise de décision.

Seulement 60% des entreprises déclarent qu’elles sont pleinement conformes au Code de gouvernance d’entreprise de 2016. Le type de non-conformité le plus courant concerne l’absence d’administrateurs indépendants (Independent Directors), d’administrateurs exécutifs (Executive Directors), d’un président indépendant (Independent Chair) ou d’une femme administratrice (Female Director). La deuxième non-conformité la plus courante concerne la divulgation de la rémunération des administrateurs. Certaines entreprises sont toujours réticentes à divulguer cette information.

Julien Tyack, associé chez PwC, est d’avis que le Scorecard est un outil pour pousser Maurice vers davantage de transparence. Il se réfère à l’importance du Code avant tout, expliquant que « the excellence of the Code of corporate governance should not be underestimated » et que, malgré ses six ans d’existence, ce code est reconnu dans la région et considéré comme un « benchmark » en Afrique.

Toutefois, il met en garde certaines organisations contre le « governance washing », indiquant que c’est notamment là où le Scorecard se révélera pertinent. Commentant le premier exercice d’évaluation et de notation, il souligne avoir déjà observé, en quelques mois, un « huge uplift in the quality of governance » au niveau des 21 entreprises participantes.

Julien Tyack explique qu’il y a même une saine compétition qui s’est installée, « where every company is trying to do better than their peers ». L’associé de PwC a rappelé que les résultats de cette première évaluation sont anonymes, selon l’accord qui avait été décidé entre le NCCG et les entreprises concernées. À noter que le rapport peut être consulté sur le site du NCCG.

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