Tous les Mauriciens ne sont pas anesthésiés par la propagande gouvernementale ou les matches du mondial diffusés par la MBC, qui n’en revient pas d’avoir obtenu les droits de retransmission. Ils ne sont pas tous tombés dans ce chacun-pour-soi qui se développe insidieusement pour créer une société qui accepte tout et évite de protester, même quand ses droits sont spoliés. Des centaines de Mauriciens encore capables de s’indigner, pas seulement en postant un message sur les réseaux sociaux, ont manifesté, hier, leur solidarité à l’action de Nishal Joyram. Cela a fait douze jours, hier, que ce citoyen mauricien, par ailleurs éducateur, s’est installé sur le parvis de la cathédrale St Louis pour entamer une grève de la faim. Nishal Joyram met volontairement sa vie en danger afin que le gouvernement accède à une requête qui concerne l’ensemble de la population mauricienne : une baisse de quelques roupies sur le prix de l’essence et du diesel. En effet, malgré le fait que le prix des produits pétroliers soit en baisse sur le marché mondial, le gouvernement mauricien a décidé de maintenir les prix de l’essence et du diesel à un niveau très élevé. Ce qui crée une situation inflationniste provoquant une augmentation de prix sur tous les autres produits de consommation courante et les services. Depuis le début de son action, Nishal Joyram a envoyé au Premier ministre des courriers qui sont restés sans réponse, sans même un accusé de réception. Ce gouvernement qui se qualifie de « caring » dans les meetings du MSM n’a pas hésité pendant le Covid à puiser des milliards des caisses de l’État pour venir en aide au secteur privé. Il semble avoir une oreille plus attentive et compatissante pour les entreprises du secteur privé qui brassent des millions que pour prendre une mesure qui va bénéficier à l’ensemble de la population mauricienne, qui arrive difficilement à boucler ses fins de mois. On pensait savoir dans quel camp se rangeaient Pravind Jugnauth et son gouvernement. L’absence de réaction à l’action de Nishal Joyram le confirme : ce n’est pas un « caring government » pour la population. Il faudra se le rappeler aux prochaines élections.
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Même si on n’est pas un fan de Bruneau Laurette — son comportement, ses actions et déclarations peuvent énerver —, il faut reconnaître que la manière dont la police le traite depuis son arrestation laisse à désirer. Cela fait trois semaines que Bruneau Laurette a été arrêté suite à une perquisition policière de la Special Striking Team. Au cours de cette perquisition, très médiatisée comme toutes les actions de cette unité, de la drogue, une somme d’argent et des armes ont été trouvées dans le coffre de la voiture de l’activiste politique. Les armes seraient des antiquités, datant de la bataille de Grand-Port, en 1810, disent certains. Mais le plus troublant, c’est que trois semaines après son arrestation, et à chaque passage en cour du présumé trafiquant de drogue, la police est incapable de produire des preuves pour justifier l’accusation provisoire. Parce que, selon certaines mauvaises langues, ces preuves n’existent pas ? Ou, comme l’affirment d’autres langues, plus mauvaises encore, parce que ces preuves seraient au stade de la fabrication ? La récente révélation d’un plantage de drogue lors d’une autre perquisition/arrestation est susceptible de provoquer toutes sortes de rumeurs et surtout des interrogations sur la solidité des accusations de la police. Comme déjà écrit quelques jours après l’arrestation, cette affaire va établir en cour la culpabilité de Bruneau Laurette ou faire perdre à la Special Striking Team ce qui lui restait de crédibilité.
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La crédibilité des départements de la police chargées de surveiller les réseaux sociaux est, elle aussi, sujette à questionnement. Quand un internaute chicane Pravind Jugnauth, la police réagit vitesse TGV — pas le métro mauricien — et se lance comme un lièvre ! Quand d’autres personnes, surtout celles qui ne font pas partie des cercles du pouvoir, sont insultées sur les réseaux sociaux, la police prend son temps, adopte l’allure d’une tortue. C’est ainsi qu’à la fin de cette semaine, des menaces contre plusieurs personnes, dont des journalistes, étaient encore visibles sur certains sites. En dépit du fait que des déclarations ont été faites à la police, celle-ci ne semble nullement pressée d’ouvrir une enquête et surtout d’effectuer ce qu’elle a l’habitude de faire en temps record dans d’autres cas : faire enlever de la toile les posts litigieux, insultants et les menaces. Et l’on s’étonnera que de plus en plus de personnes disent que la police fonctionne à au moins deux vitesses…