Cyclones, ouragans, typhons… Trois dénominations pour une seule et unique calamité, et dont les dégâts se font chaque année de plus en plus terribles. Récemment encore, l’ouragan Ian faisait ainsi plus de 60 morts aux États-Unis, suivi de Julia, qui en aura ajouté une trentaine rien qu’en Amérique centrale, avant que quelques autres viennent encore rejoindre cette liste morbide après le passage de Roslyn… Et pourtant, il ne s’agit pas d’une saison cyclonique extraordinaire, du moins en comparaison avec les précédentes années.
Certes, l’on pourra rappeler que ces catastrophes extrêmes ont de tout temps existé, et même de manière bien plus intense encore il y a très, très longtemps. Pour autant, il s’agissait alors de phénomènes inscrits dans des ères troublées de l’histoire de notre planète, à d’autres époques géologiques donc.
Aujourd’hui, il en est hélas autrement. Car si ce phénomène destructeur se fait de plus en plus présent, plus violent, mais aussi plus rapide, cela n’a plus rien à voir, ou alors si peu, avec une transition climatique plus ou moins naturelle, mais bien le résultat de notre insouciance générale. Autrement dit un phénomène à l’origine pour l’essentiel anthropique.
C’est d’ailleurs ce que viennent encore de démontrer des scientifiques américains qui, après avoir étudié le développement et les trajectoires de tous les ouragans à avoir touché terre aux États-Unis depuis 1979, ont mis en évidence que ces formations passaient plus facilement et plus rapidement du stade de simple dépression à celui d’ouragan. Autrement dit en quelques heures au lieu de plusieurs jours, comme c’était encore le cas il y a 40 ans.
Ce constat est quasiment identique en Asie, et plus particulièrement sur la côte est, où les typhons se font là encore à chaque fois plus violents. Quant à notre zone géographique, si les cyclones nous ont relativement épargnés chez nous depuis déjà pas mal de temps – toutes proportions gardées bien sûr, lorsque l’on les compare aux Gervaise, Hollanda et autre Dina –, ce n’est pas le cas de Madagascar, qui en paie un lourd tribut. Sans compter qu’il demeure un fait que la saison cyclonique démarre chaque année de plus en plus tôt.
Avec la crainte bien entendu que l’une de ces formations revienne faire un tour par chez nous pour tout y dévaster au passage.
Pour autant, y avait-il réellement besoin d’études pour comprendre que si ces phénomènes atteignent aujourd’hui une telle ampleur, c’est pour avoir vu entrer dans l’équation depuis des lustres maintenant un certain facteur humain ? Au vu de la mécanique de leur formation, comment pourrait-on encore en douter ? Pour qu’un cyclone se forme, il lui faut en effet de l’air chaud et de l’humidité, qu’il va puiser dans les océans. Ensuite, pour créer son vortex, il lui faut un différentiel de pressions atmosphériques entre terres et mers, et donc de températures. Des températures qui, justement, affichent une tendance générale à la hausse, avec pour effet donc de voir ce mécanisme naturel se renforcer. Ce qu’il fera au minimum jusque… 2100, avec une accentuation graduelle de la formation et de l’intensité de cyclones.
Et ce n’est pas tout, car sans que les auteurs des études entreprises jusqu’ici ne puissent en identifier les causes exactes, on doit ajouter à cela un autre constat, à savoir que les ouragans se déplacent plus lentement aujourd’hui qu’ils ne le faisaient lors des plus anciennes observations. Avec pour résultat de voir ces monstres marins se renforcer davantage au-dessus des mers, jusqu’à ce qu’ils déploient toute leur force dévastatrice une fois sur la terre ferme.
Alors, direz-vous, à quoi bon étudier les variations de tels phénomènes, puisqu’ils nous semblent de toute façon inévitables pendant un très long moment encore ? Eh bien, tout d’abord pour pouvoir s’en prévenir, ou du moins en minimiser les dégâts, sachant que certaines régions sont davantage susceptibles que d’autres d’être touchées. Ensuite, pour nous rappeler que les ouragans, au même titre que d’autres calamités – tels que les inondations soudaines ou, à l’inverse, les périodes de sécheresse – ne sont que les conséquences directes de notre système libéral, la croissance ayant tendance à multiplier nos émissions de gaz à effet de serre plus vite que les billets verts. Autant dire qu’avec tant de monstres nés de la folie dévastatrice du Dr Frankenstein, nous sommes dans de beaux draps !
Michel Jourdan