Du sud souffle un vent infatigable qui s’écrase aux remparts protégeant la capitale. Du sud se laisse emporter un reggae d’une fraîcheur reposante, qui ramène aux racines d’une île déboussolée par les salves de modernisme. Cette mélodie de conscientisation résonnera ce vendredi lors du Rising’Up South Festival, qui accueille comme tête d’affiche le reggaeman ivoirien Tiken Jah Fakoly, porte voix des causes africaines.
Et pour assurer sa première partie, un discret fils du sud, de l’Escalier plus précisément. Enfant d’un père laboureur et d’une mère exerçant dans des usines textile, Oeson a cultivé toute sa vie l’amour pour la musique. Ce vendredi représente ainsi une consécration pour l’interprète de Healer, qui cumule plus de 400 000 vues sur YouTube.
« A la base, je suis un fan de Tiken Jah Fakoly. Aujourd’hui, c’est un honneur et une fierté pour moi d’assurer sa première partie », confie-t-il dans les hauteurs de La-Gaulette, où il réside avec sa compagne.
De raides escaliers ou un sentier escarpé mènent à leur domicile perché au-dessus du village côtier. Sur son balcon, le café se délecte avec une vue saisissante sur l’ouest, jusqu’à la montagne du Morne. La mer dévoile des nuances de bleus inédites qui relèvent la majesté de l’île au Bénitiers.
Oeson a grandi dans les terres du sud et ses paysages paisibles. « Mo tousel santer dan mo fami », relate celui qui a tiré son premier album (Done Faya) en 2009, à seulement 17 ans. De la génération Y, il a découvert la musique notamment à travers la radio et les cassettes. Ses souvenirs le ramènent vers l’album de Kaya qui reprend du Bob Marley sur du seggae. Ou encore l’ivoirien Alpha Blondy et son ode à Jérusalem.
« A un moment j’ai dû faire un choix », relate l’ancien élève de SSS St Aubin. « J’ai quitté l’école pour me lancer dans la musique ».
Cette passion apprise « lor koltar » ne suffit cependant à le soutenir financièrement. Lui qui était récemment au Kerveguen, à la Réunion, pour assurer la première partie du populaire Kaf Malbar, le sait très bien : les artistes mauriciens ne sont guère aussi bien encadrés qu’à l’île soeur. Raison pour laquelle il exerce également comme charpentier.
C’est à compter de 2020 que l’île découvre la musique de celui qui se qualifie comme « un apprenti rasta », ouvert aux leçons de la vie. « Mo sort depi enn fami kreol. Apre mo’nn dekouver kiltir rasta », explique-t-il.
Son deuxième opus, Ghetto Messiah, prend vie entre les studios de Plaine-Magnien et de l’Escalier. Ce « premier album live » porte l’hommage d’un enfant à sa mère (Petite Reine, plus de 700 000 vues), les arguments pour la légalisation du cannabis (Tir Sa Dossier La, plus de 300 000 vues). Et se veut une revendication sonore pour une liberté d’être.
« Des fois je me sens bien, des fois mal à l’aise. Nous vivons dans un pays où les enfants de cité font face à beaucoup de blocages. Que ce soit au niveau de n’importe quelle démarche à entreprendre, ou même socialement… nous sentons des regards sur nous », relate-t-il en admirant la mer s’effaçer derrière l’horizon.
« Nous sommes dans un pays multiracial. Sa konba-la, li enn konba intern », ajoute-t-il.
Son rêve d’unité, de « met tou barier de kote », transpire à travers sa musique, où le reggae roots revêt des teintes novatrices. Tantôt arborant du seggae, ou encore des bribes de style newskool, particulièrement populaire.
A cet effet se rappelle-t-on d’une soirée d’hiver à Jam Inn, Petite-Rivière, où le trentenaire avait vu une foule entière reprendre en coeur ses morceaux les plus connus. Cette nuit-là, il avait indéniablement présenté la meilleure performance sur scène, et ce, malgré une sono qui laissait à désirer.
Ce vendredi soir, c’est le groupe de Plaine-Magnien, The Prophecy, qui l’accompagnera. Oeson se rappelle avoir assisté au concert de Tiken Jah Fakoly, au stade Anjalay. Cette fois, il se dit « motivé » de représenter le sud en prélude de la performance de la légende ivoirienne.
Rising’Up South Festival
Le festival qui se tient ce vendredi 14 octobre au Beau-Vallon Mall, à compter de 19h, vise à valoriser la région du sud. Les autres artistes annoncés sont The Prophecy, Lion Vibe (un artiste montant), OSB ainsi que Dj King Dom. Les billets sont en prévente à Rs 600 et à Rs 800 à la port. La place VIP est, elle, à Rs 1 200.