Le sourire éclatant et les yeux pétillants capturés par la caméra alors que, depuis la loge royale, elle regardait sa pouliche Estimate, un cadeau de l’Aga Khan pour ses 80 ans, remporter la Gold Cup d’Ascot 2013 était la preuve, s’il en était besoin, que Sa Majesté la reine Elizabeth II n’a jamais été aussi heureuse que lorsqu’elle était sur un hippodrome en regardant courir ses chevaux. Mais ceux qui étaient proches d’elle et qui travaillent dans le sport savaient depuis longtemps où se trouvait vraiment le cœur du défunt monarque.
Tout au long de sa vie, le sens du devoir de la reine n’a jamais failli. Au cours de ce qui devait parfois être des engagements officiels mornes, il n’y avait jamais le moindre signe qu’elle souhaitait pouvoir être ailleurs. John Warren, son conseiller de course, a dit un jour : « Si la reine n’était pas la reine, elle aurait fait un merveilleux entraîneur. Elle a une telle affinité avec ses chevaux et est si perspicace. »
Les seuls jours inscrits chaque année dans son journal étaient le Derby Day et Royal Ascot. Le Racing Post, le quotidien dédié au sport hippique, était une lecture régulière du matin. La reine aimait ses chevaux. Elle aimait les voir courir et faire des plans d’élevage pour ses juments aux Royal Studs. Elle envoyait des lettres manuscrites chaque automne à ses entraîneurs détaillant les yearlings qui leur étaient envoyés.
Elle allait voir ses chevaux au printemps ainsi que leurs entraîneurs. Et elle passait des heures à bavarder avec les personnes qui s’occupaient de ses chevaux. Ces gens ont pu voir la reine sous un jour différent et plus détendue. Il n’y avait pas de cérémonial. Elizabeth II avait une merveilleuse mémoire pour un visage, mais ce qui a également surpris plus d’un, c’est sa remarquable mémoire pour ses chevaux.
Les courses de plat étaient au centre de l’opération équine de la reine, mais son premier vainqueur est venu sur les obstacles en 1949. En course de plat, c’est Astrakhan, qui lui avait été offert par l’Aga Khan en 1947 comme cadeau de mariage, qui lui a offert son premier succès.
Son grand regret est de n’avoir jamais gagné le Derby d’Epsom. Elle y a cru quand Aureole, monté par Sir Gordon Richards, en 1953, son premier partant dans la grande course, a terminé deuxième derrière Pinza. Aureole, entraînée par Cecil Boyd Rochfort, est probablement le meilleur poulain que la reine n’ait jamais possédé avec 11 victoires sur 14 sorties, dont le King George de 1954, la saison où la reine a été la propriétaire championne de l’année.
Il était écrit qu’elle ne gagnerait jamais la course la plus prestigieuse de la British Flat Racing, bien que Carlton House, un autre cadeau pour ses 80 ans, cette fois du Sheik Mohamed, entraîné par Sir Michael Stoute et monté par Ryan Moore, fit monter l’adrénaline de la souveraine pour le Derby de 2011. En effet, à 50 mètres de l’arrivée, Carlton House fit illusion pour la victoire, mais au final, il prit une brillante troisième place à ¾ de longueur derrière le vainqueur Pour Moi, revenu des derniers rangs pour coiffer d’une tête Treasure Beach.
Parmi ses autres bons chevaux figure Dunfermline, qui a remporté les Oaks et St Leger, monté par Willie Carson, en 1977, l’année des célébrations du jubilé d’argent de la reine. Rappelant sa fierté de porter les couleurs royales, le jockey Willie Carson a déclaré à l’époque : « Lorsque vous portez les couleurs de la reine, en particulier à Epsom, un jockey grandit de six pouces. Vous êtes juste beaucoup plus grand et plus important. La reine est la femme la plus célèbre du monde entier, vous êtes donc privilégié. Vous voulez faire de votre mieux pour elle. Je n’appellerai pas ça sa vie, mais c’est sa passion, son passe-temps et elle l’apprécie vraiment. Au haras, elle adorait toucher ses poulains et les caresser. C’est un grand moment pour elle, juste profiter de voir l’avenir de ses chevaux. » Son plus récent vainqueur classique était Tactical, qui a remporté les Windsor Castle Stakes pendant le Royal Ascot de 2020.
S’il y avait un gagnant de la passion de la reine pour les courses, c’était le sport hippique lui-même. Il n’était pas possible d’avoir une meilleure ambassadrice. Le patronage royal a contribué à élever le statut des courses de chevaux en Grande-Bretagne. Cela est illustré par le statut mondial accru détenu par Royal Ascot, qui attire désormais régulièrement des coureurs d’Amérique, d’Australie et d’Extrême-Orient désireux de vivre un événement britannique unique avec la Elizabeth II en son cœur.
Les gagnants royaux étaient invariablement ramenés à la maison — en particulier à Ascot, son hippodrome ! Les amateurs de courses semblaient apprécier qu’une femme qui avait consacré sa vie au service de son pays puisse profiter d’un moment de sa passion personnelle et privée. C’était ce que la course semblait être. Une brève pause du calendrier strict des fonctions officielles. Une chance de se détendre et de rire. La reine était dans son élément. Sa passion et sa profonde connaissance des chevaux étaient inégalées et ses conseils étaient toujours très perspicaces.
Malgré son rang, malgré son influence, elle a toujours eu un grand respect pour le sport des rois… pardon des reines. Elle n’a bénéficié d’aucune faveur, elle respectait les courses et les chevaux, et acceptait les défaites comme elle appréciait les victoires. Que sa philosophie hippique soit une inspiration ! Il n’y avait qu’aux courses qu’elle était elle-même : « When the Queen wins a race, she smiles and her face is the same as when she was a little girl. » On peut voir cela sur la photo où elle savoure sa dernière victoire de groupe I dans la Gold Cup de Royal Ascot en 2013, avec Estimate ! Il n’y a que les courses hippiques pour savourer une telle vraie joie !
(Cet édito hommage à la Reine est inspiré et comporte des extraits d’articles de la presse britannique sur la passion de la reine Elizabeth II pour les courses de chevaux et l’élevage…)