MIRANDA RIGHTS & BRUTALITÉ POLICIÈRE : « Vous avez le droit de…(USA) vs « Bous to…(RM) »

L’Ile Maurice est sous le choc avec les cas de brutalité policière, révélés récemment sur les réseaux sociaux par Bruneau Laurette. Les jeunes dans les établissements scolaires n’en reviennent pas. Les plus coriaces d’entre eux n’arrivent pas à croire que des humains peuvent s’adonner à de telles choses sur leurs semblables.

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En 2016, lors d’une conférence du Commonwealth Education Minister Action Group Working, la ministre de l’Éducation, Leela Devi Dookun-Luchoomun dans une déclaration (qu’on peut toujours visionner sur YouTube) précise à quel point la Human Rights Education (HRE) est cruciale pour notre pays. Elle dit comment HRE développe « right attitude, right behaviour and respect of others […] education remains the most powerful means… living in a peaceful environment for a multi-ethnic, multi-racial society ». Au vu de ce qu’on découvre jour après jour, on sait bien que le plus beau programme de HRE, qui serait destiné à nos enfants, ne sera jamais une garantie contre la torture.

Miranda Rights

« Vous avez le droit de garder le silence. Tout ce que vous dites peut-être utilisé contre vous devant les tribunaux. Vous avez le droit de demander conseil à un avocat avant que nous vous posions des questions. Vous avez le droit d’être accompagné d’un avocat pendant l’interrogatoire. Si vous n’avez pas les moyens de vous payer un avocat, un avocat vous sera désigné avant tout interrogatoire si vous le souhaitez. Si vous décidez de répondre aux questions maintenant sans la présence d’un avocat, vous avez le droit de cesser de répondre à tout moment ». À travers le monde, nous connaissons cette formule, qui constitue un avertissement. On l’entend dans des films. Il est récité à tout suspect aux États-Unis comme un type de notification habituellement donnée par la police aux suspects en garde à vue ou lors d’un interrogatoire en détention les informant de leur droit de garder le silence. Ces droits, appelés droits Miranda (Miranda Rights), découlent d’un jugement de la Cour Suprême des États-Unis en 1966 dans l’affaire Ernesto Miranda versus l’Etat d’Arizona.

Le Jugement historique

Le 2 mars 1963, une jeune femme de 18 ans informe la police qu’elle a été forcée de monter dans un véhicule, puis entrainée dans un lieu désert et violée. Les policiers lui font passer un test de polygraphe (détecteur de mensonges), mais les résultats se révèlent non concluants. Cependant, se basant sur la description du véhicule donnée par la victime, la police retrace la plaque d’immatriculation et remonte à Ernesto Miranda qui est fiché comme un « peeping Tom » (« voyeur ») et pour autres délits. Même si la victime n’a pu identifier Miranda lors de la parade d’identification, il est mis en détention et interrogé. Après deux heures il passe aux aveux. Il signe un statement qui débute ainsi : « I hereby swear that this statement I am making is voluntary and out of my own free will ».

Il est condamné pour viol par l’État d’Arizona pour 20-30 ans. Son avocat fait appel mais tombe malade et c’est ainsi que le mouvement des droits civiques (American Civil Liberties Union) vint à la rescousse de Miranda. L’affaire est portée devant la Cour Suprême.
Le 1er mars 1966, le juge en chef Earl Warren donne le jugement dans l’affaire Miranda contre Arizona. La décision est en faveur de Miranda. Il déclare que la personne en garde à vue doit, avant l’interrogatoire, être clairement informée qu’elle a le droit de garder le silence et que tout ce qu’elle dit sera utilisé contre elle au tribunal ; elle doit être clairement informée qu’elle a le droit de consulter un avocat et d’être accompagnée par celui-ci pendant l’interrogatoire, et que si elle n’a pas les moyens, un avocat sera désigné pour la représenter. Mais un an après, le 1er mars 1967, l’État d’Arizona le rejuge, sur la base du témoignage de sa partenaire dont il est séparé. Il est condamné à une peine de 20 à 30 ans de prison. Après sa libération, il commence à vendre des cartes de droits Miranda autographiées pour 1,50 dollar. Le 31 janvier 1976, Miranda est poignardé lors d’une bagarre qui éclate dans un bar du centre-ville de Phoenix.

Impact

Deux études, notamment « The Impact of Miranda Revisited » dans le Journal of Criminal Law and Criminology (Volume 86) par Leo Richard publiées en 1996, et « Point and Counterpoint Miranda Rights » par Paul Ruschmann en 2007 font toujours autorité. Ces deux études indiquent qu’après le jugement, il y a eu plusieurs réactions. Certains trouvaient que les droits Miranda menottaient (« handcuffed ») les policiers dans leur enquête et que le taux de criminalité allait augmenter. Pour Leo Richard, Miranda Rights a bien au contraire ouvert la voie « to more police professionalism by increasing the required level of training and education patrolmen and detectives receive in the law of evidence and criminal procedure, first in the academy and later in advanced and specialized courses on investigatory techniques » (p. 670). L’impact définitif est que Miranda est devenu un verbe : « to be Mirandized » signifie «  to be read your rights ».

Et Nous ?

Sans diminuer la valeur de nos policiers, il est évident que notre système actuel permet, encourage et génère certains policiers qui seraient plus enclins à dire au suspect « bous to… » que « vous avez le droit de… ». Ce que nous voyons ce n’est pas de la brutalité policière mais des sévices de tortionnaires. Fondamentalement, c’est une question de formation. Elle ne s’acquiert pas à coup de séminaires et de cérémonie « koup-riban ». Il y a une réflexion profonde à faire. Entretemps, il est du devoir du législatif de faire voter le Police & Criminal Bill (N0. IV of 2013) dont les objectifs sont : (a) bring together in one enactment, subject to certain exceptions, the provisions which relate to – (i) the exercise by police officers of the powers to stop, enter, search, seize, arrest and detain; and (ii) the treatment and questioning of detainees. Ce projet de loi codifiera les arrestations, enquêtes et interrogatoires et protègera la police et les suspects.

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