Budget Speech – Jour J-7 : Réduire la dette publique et le coût de la vie, les deux priorités de l’heure

Tahir Wahab : « Le pouvoir d’achat de la population a baissé de 20% » Bhavish Jugurnath : « Prices will not stabilize or get down so soon » Shaktee Ramtohul : « Le gouvernement n’a pas appris sa leçon depuis la pandémie » Rajeev Hasnah insiste sur l’indépendance de la Banque de Mauriuce

Invités par l’Accounting and Finance Society (AFS) de l’Université de Maurice et le CFA Institute a un débat sur la situation économique et les priorités budgétaires, économistes et experts-comptables ont exprimé quasiment les mêmes souhaits eu égard au prochain oral du ministre des Finances. Ils se sont appesanti sur le fait que les priorités doivent être de trouver une solution pour réduire le fardeau financier de la population, tout en réduisant la dette publique.

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Bhavish Jugurnath, économiste et expert-comptable, affirme d’emblée que le déficit commercial dépassera 30% du PIB cette année, et ce, pour la première fois dans l’histoire du pays. Il prône une approche ciblée pour les subsides et aides sociales afin de faire face à la flambée des prix. Inquiet devant la montée de l’inflation, il estime que celle-ci pourrait atteindre 15%, ce qui fera grimper davantage les coûts de production des entreprises et pourrait avoir un impact sur l’emploi. « It remains to be seen with high business cost in raw materials, petrol and freight, how many businesses will be able to sustain employment. We have already witnessed huge depreciation of the rupee. This will also result in an increase in business costs », dit-il.

Rajeev Hasnah, économiste et président du CFA Institute (Mauritius), abonde dans le même sens, estimant que le taux d’inflation se maintiendra à deux chiffres jusqu’à la fin de l’année. Intervenant sur le rôle de la Banque Centrale depuis le déclenchement de la crise sanitaire et économique, il prévient que « we have seen the devastating effect of printing of money in Sri Lanka and we hope that this will not be the case in Mauritius ».
Rajeev Hasnah fait comprendre que dans des circonstances exceptionnelles, le gouvernement peut travailler de concert avec la Banque Centrale, mais il émet « a word of caution on synchronicity », car il faut à tout prix maintenir l’indépendance de la Banque de Maurice, selon lui. « There has been a lot of debate on printing money, and we tend to rely on what other countries are doing and replicating this here. Mais, prenons l’exemple des États-Unis, même s’ils continent à imprimer des dollars, les gens vont en acheter. Mais ici, on n’aura pas de Takers pour la roupie si nous continuons d’imprimer de l’argent », prévient-il.

Réduire de Rs 14 le prix du litre d’essence

Tahir Wahab, expert-comptable et directeur du JTC Group, affirme de son côté que la « baisse du pouvoir d’achat de la population est de quelque 20% à cause de l’inflation ». Intervenant sur le prix exorbitant du carburant, il suggère que le gouvernement réduise les droits d’accise et enlève la Covid Contribution afin de pouvoir réduire de Rs 14 le prix du litre d’essence, qui coûterait ainsi Rs 59,90.
De son côté, Shaktee Ramtohul, Business Consultant, estime que le prochain budget peut jouer un rôle majeur pour la communauté des affaires et la compétitivité du pays. Il a longuement évoqué la digitalisation des services publics et les nouveaux secteurs, comme le tourisme médical, l’agro-industrie, les véhicules électriques…
Il demande aussi d’améliorer l’accès aux finances pour encourager les PME et l’énergie verte. Shaktee Ramtohul est d’avis que le gouvernement « n’a pas appris sa leçon depuis la pandémie », car le pays importe toujours 80% de ce qu’il consomme. Et d’insister sur le fait qu’il faut miser sur les nouvelles technologies, notamment pour développer le secteur de l’agro-industrie.

Spectre de la stagflation

Rajeev Hasnah a expliqué que la situation économique locale et internationale est compliquée, avec des répercussions substantielles sur l’inflation et, par ricochet, le pouvoir d’achat avec le spectre de la stagflation, qui se profile à l’horizon. Pour lui, le budget requiert un exercice d’équilibriste entre les différentes priorités économiques et sociales du jour.

Il faut aussi prendre en considération la nécessité d’une Fiscal Discipline dans la gestion des fonds publics. Il poursuit : « Si le gouvernement veut restreindre ses emprunts et commencer à réduire la dette, qui est proche de 100% du PIB, la marge de manœuvre est limitée. Le pays est-il en mesure de soutenir encore un ou deux ans un “high level of debt” ? » Pour lui, les priorités du budget sont : limiter l’impact de l’inflation importée; un plan bien défini pour la Fiscal Consolidation afin de réduire la dette publique; améliorer l’environnement des affaires et développer des secteurs émergents; améliorer la confiance dans l’économie; et des strong Central Bank reserves.

Pour sa part, Bhavish Jugurnath s’inquiète du fait que l’économie locale soit Highly Dependent sur le secteur touristique, et ce, dans un contexte où nos principaux marchés touristiques « have been badly affected with the ukraine crisis ». Il faut, dit-il, développer de nouveaux secteurs à fort potentiel de FDI, comme la Fintech, le Metaverse, la Smart Agriculture, le tourisme médical et un « revamped offshore sector with new product offerings ». Car si le secteur touristique n’apporte pas les dividendes voulus cette année, ce sera difficile d’atteindre un taux de croissance de 6%, selon lui.

Bhavish Jugurnath jette un regard sans concession sur la situation actuelle : « A tourism sector barely keeping its head above water, with foreign direct investment falling to over 40% and a sharp increase in public debt, including an increase of 60% of the external debt. And all this coupled with an unemployment rate of more than 10% of the working population and the risk of galloping inflation. Coupled now with the Ukrain-Russia crisis resulting high petrol, energy and consumption cost. The challenge for the next budget will be to find the equilibrium between reducing cost of living and increasing public debt. » Pour Bhavish Jugurnath également, la priorité de Renganaden Padayachy sera de trouver un équilibre entre la réduction du coût de la vie et de la dette publique.

Attention à la crise sociale !

Il insiste aussi sur le fait que le gouvernement doit soutenir la population, dont le pouvoir d’achat s’est considérablement effrité. Même la classe moyenne doit être aidée, sinon le pays fera face à une crise sociale, estime-t-il. Toutefois, il plaide pour une approche ciblée afin de ne pas mettre davantage de pression sur les finances publiques, avec une « targeted approach to the poor and middle class people ». Cela dans un contexte où les prix « will not stabilise or get down so soon ».

Tout comme Tahir Wahab, Bhavish Jugurnath estime que « the basic consumption basket for food costs has increased by 19% in the last 18 months ». Il explique que la majorité des consommateurs touchent un salaire inférieur à Rs 25 000 par mois et qu’il est difficile – voire impossible – pour eux de faire face à la situation. « With a low income and general increasing cost, the poor and even the middle-income earners to some extent might not even afford to buy the gas. You can imagine what it is for a family having no gas in winter to have a shower. Social targeting is thus very important in this exceptional economic context. » Il propose ainsi un « Household Food and Energy Support that could be run and managed digitally as the current “Energy Support” in France for the most vulnerable and eligible households ».
Tahir Wahab est du même avis. Le focus doit être sur l’humain, dit-il. « C’est essentiel pour éviter une crise sociale, qui pourrait affecter notre économie », ajoute-t-il. Il plaide donc pour des mesures visant à améliorer le pouvoir d’achat. Il souligne qu’une des options du gouvernement serait de réduire considérablement l’impôt sur le revenu, afin que la population ait davantage de « disposable income ». Tahir Wahab insiste également sur la fin du gaspillage des fonds publics. Outre la baisse du prix de l’essence, qu’il préconise, il souhaite des mesures pour solutionner le chômage des jeunes.

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