Le Guide - Législatives 2024

Tout (re)commence pour Emmanuel Macron dans une France divisée

Reconduit à la présidence de la France avec plus de 58,5% des voix, Emmanuel Macron doit affronter dès lundi un pays fracturé politiquement, avec une extrême droite au plus haut et une bataille qui s’annonce féroce pour les législatives de juin.

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Le score de Marine Le Pen (41,4%), qui gagne environ huit points, est historique, l’extrême droite ayant passé pour la première fois la barre des 40%.

La campagne électorale, marquée par la pandémie de Covid-19 et par la guerre en Ukraine, a montré une forte lassitude démocratique. Le niveau d’abstention a atteint dimanche 28%, un record depuis la présidentielle de 1969 (31%), auquel il faut ajouter les bulletins blancs ou nuls (6,5% des inscrits).

« Il y a cinq ans, il y avait 10 millions de voix d’écart entre Marine Le Pen et Emmanuel Macron. Aujourd’hui il n’y en a plus que 5,5 millions », a résumé Mathieu Gallard, directeur d’études à l’institut de sondages Ipsos, sur la radio franceinfo. Et « plus d’un tiers du corps électoral a décidé de ne pas faire de choix ».

Emmanuel Macron, 44 ans, est le premier président français à être réélu pour un second mandat en 20 ans, depuis Jacques Chirac en 2002 face au père de la candidate d’extrême droite, Jean-Marie Le Pen.

Les Français ont choisi de reconduire un président centriste libéral et pro-européen, face à une candidate radicale extrêmement critique de l’UE et plaçant la « priorité nationale » au coeur de son projet.

Sa réélection intervient après un quinquennat jalonné de crises, des manifestations anti-système du mouvement populaire des « gilets jaunes », à la pandémie.

– « Méthode refondée » –

Lors de son premier discours de victoire prononcé devant la Tour Eiffel, Emmanuel Macron a promis une « méthode refondée » pour gouverner la France, assurant que « nul se sera laissé au bord du chemin ».

Il a pris soin de s’adresser à ceux qui l’ont choisi par défaut, « pour faire barrage à celles de l’extrême droite », en soulignant avoir « conscience que ce vote (l)oblige pour les années à venir ».

S’adressant aux électeurs d’extrême droite, il s’est engagé à trouver « une réponse » à leur « colère et désaccords ».

La carte des résultats dessine deux France. L’une a voté Emmanuel Macron: les grandes métropoles, les classes moyennes supérieures et les retraités. Et l’autre, celle qui a choisi Marine Le Pen, plus populaire, qui se sent souvent exclue, particulièrement dans le nord-est et le pourtour méditerranéen.

Avec plus de 60% de voix, Marine Le Pen a par ailleurs réalisé des scores historiques en Outremer, notamment aux Antilles, en Guyane, à la Réunion et à Mayotte (59,10%) sur fond de défiance envers les autorités ou de contestation contre le pass sanitaire.

Mme Le Pen a dit lancer dès dimanche soir « la grande bataille électorale des législatives », prévues les 12 et 19 juin.

Elle a vu dans son score inédit « une éclatante victoire » et la manifestation du « souhait » des Français d' »un contre-pouvoir fort à Emmanuel Macron ».

 

– « Un contre-pouvoir fort » –

 

L’enjeu, pour le Rassemblement national, sera de dépasser le statut d’un parti contestataire qui, comme le souligne le politologue Jean-Yves Camus, « recueille un pourcentage considérable de voix, infuse dans la société mais n’arrivera jamais au pouvoir parce qu’il n’a pas d’alliés ». Le RN compte seulement six députés dans la législature qui s’achève.

Le candidat d’extrême droite éliminé au premier tour Eric Zemmour a appelé « le bloc national » à s’unir mais n’a pu s’empêcher de relever, cinglant, que c’est « la huitième fois que la défaite frappe le nom de Le Pen ».

Le chef de la gauche radicale, Jean-Luc Mélenchon, arrivé en troisième position au premier tour avec 22% des suffrages, a lui aussi promis un dur combat à Emmanuel Macron. « Le troisième tour commence ce soir », a-t-il lancé.

Usé par cinq ans de gouvernement émaillé de multiples crises, il n’est pas certain que le parti d’Emmanuel Macron bénéficie d’un élan porteur pour ces élections à venir. Souvent qualifié de « président des riches », M. Macron a multiplié pendant la campagne les gestes envers l’électorat de gauche.

Mais plusieurs centaines de manifestants, principalement des jeunes se déclarant « antifascistes » et « anticapitalistes », ont protesté dimanche soir contre sa réélection dans quelques villes de France.

A l’étranger, c’est un soulagement pour les partenaires de Paris.

La présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen s’est réjouie de « continuer l’excellente coopération » avec la France, le chancelier allemand Olaf Scholz a salué « un signal fort en faveur de l’Europe ». Le Premier ministre britannique Boris Johnson s’est dit « heureux de continuer à travailler ensemble ».

« Vers une Europe forte et unie! », a déclaré de son côté le président ukrainien Volodymyr Zelensky, qui a félicité Emmanuel Macron, tandis que le président américain Joe Biden s’est dit « impatient de poursuivre » la coopération avec Paris pour « défendre la démocratie ».

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