Ce serait pour être allé informer la police de son intention d’aller manifester contre les augmentations de prix en cascade à Camp Levieux, Rose-Hill, que celui que l’on surnomme l’activiste aurait été arrêté vendredi après-midi. Cette arrestation a provoqué des manifestations dans la localité le soir même et elles ont gagné en intensité au fur et à mesure que la nouvelle était reprise sur les réseaux sociaux, dont l’activiste est un utilisateur connu. La vague s’est amplifiée pour toucher une série de localités à travers le pays. Dans certaines régions, la protestation verbale hurlée s’est transformée en jets de projectiles contre des postes de police ou en pneus brûlés aux carrefours pour bloquer la circulation. La justice déterminera si l’arrestation musclée de l’activiste, son transfert aux Casernes centrales et les accusations provisoires logées contre lui par la police étaient justifiées. Ou si, comme cela a été souvent le cas ces derniers temps, elles seront tout simplement rayées par la cour, obligeant les officiers de police à retourner aux Casernes centrales la queue entre les jambes. Avec la menace que les personnes interpellées demandent des réparations pour arrestation arbitraire, en traînent les exécutants dans le box des accusés, pas les donneurs d’ordre d’en haut. Il est un fait que depuis quelque temps, la police — surtout les hauts gradés qui la dirigent — semble avoir adopté la stratégie de l’arrestation ultra rapide. Il suffit d’une simple plainte — surtout si elle émane d’un ministre, d’un député ou d’un maire — pour que la police se précipite pour interpeller, emprisonner une nuit, avant de traduire en cour avec une accusation provisoire qui va nécessiter le paiement d’une caution pour recouvrer la liberté.
C’est le traitement de choc qui a été réservé à trois conseillers du village de Plaine Magnien qui avaient tenté de poser des questions à deux ministres sur les raisons qui ont provoqué des inondations dans leur région. Hués par leurs mandants et obligés de quitter la réunion sous escorte policière, les ministres ont porté plainte Ce même traitement a été appliqué à un habitant de Vacoas coupable selon la police d’avoir traité le maire de « gopia » lors d’une émission radio en direct au cours de laquelle on a entendu une foule huer le maire et un député MSM de Phœnix. Dans les cas cités, les arrestations ont été effectuées dès que les plaintes ont été logées, bien avant que l’enquête sur les allégations ne démarre. Ce n’est que vendredi que l’animatrice de l’émission au cours de laquelle le maire aurait été insulté — si tant est que le mot gopia soit défini comme une insulte ! — a été convoquée pour donner « son enquête ». Et ce, alors que la personne que la police accuse avait été déjà interpellée, avait passé une nuit au cachot avant d’être traduite en cour et libérée sous caution. Si la police utilise la vitesse grand V pour interpeller et emprisonner, elle prend son temps pour mener les enquêtes et peut même les renvoyer. C’est ainsi que la convocation de l’animatrice de radio a été annulée vendredi, ce qui signifie que l’enquête dans cette affaire n’a pas encore commencé. L’arrestation de l’activiste qui allait vraisemblablement subir le nouveau protocole interpellation, nuit en prison, accusation provisoire, passage devant la cour et paiement de caution pour obtenir la liberté provisoire, a été le déclencheur qui a mis le feu au mécontentement — certains disent la colère — qui habite beaucoup de Mauriciens depuis quelque temps. Un mécontentement provoqué par la manière de faire de la police contre certains, ajoutée à la cascade d’augmentations de prix qui touche tous les Mauriciens.
Vendredi soir, Pravind Jugnauth, intervenait en direct sur sa chaîne télé depuis l’Inde où il se trouve en visite officielle. Une intervention télévisée qui permet de poser la question suivante : à quoi sert le remplaçant si c’est l’absent qui doit intervenir depuis l’étranger pour commenter des incidents locaux ? Juste à couper les rubans pour l’inauguration de ponts ? Intervenant depuis l’Inde, Pravind Jugnauth a déclaré que Maurice étant une démocratie, on pouvait manifester son mécontentement, mais dans le cadre de la loi. Comment respecter la loi quand ceux qui sont chargés de l’appliquer arrêtent ceux qui veulent manifester ? Mais plus grave, le Premier ministre a déclaré que ce sont ceux qui ont provoqué les désordres de Kaya qui sont derrière les manifestations de ces derniers jours. On aura compris la manœuvre du leader du MSM pour opposer ceux qui manifestent — et font du désordre — et les autres. En ce faisant, est-ce qu’il essaye d’éteindre le feu ou est-ce qu’il souffle sur les braises pour l’attiser en suivant sa stratégie de divide and rule ?