Le processus de la décolonisation de Maurice, avec l’archipel des Chagos en toile de fond, entame cette semaine un tournant. En effet, au plus tard jeudi prochain, le gouvernement devra soumettre à la Special Chamber de l’International Tribunal for the Law of the Sea (ITLOS) des arguments scientifiques aussi bien que politiques pour contrer les revendications des Maldives suite au différend quant à la délimitation des frontières maritimes au nord de l’archipel.
L’enjeu géopolitique porte sur une superficie maritime d’au moins 4 800 kilomètres carrés faisant partie de la zone économique exclusive. Après l’échéance de jeudi, les autorités des Maldives disposeront d’un délai expirant le 15 août pour répondre aux prétentions de Maurice avec l’adjudication officielle de la Special Chamber de l’ITLOS devant intervenir au plus tard au début de 2023.
Dans le contexte du pleading stage devant ces instances des Nations unies, les conclusions de la mission scientifique du Bleu de Nîmes du 8 au 22 février de cette année dans les parages de Blenheim Reef au nord de l’archipel des Chagos revêtent toute leur importance géostratégique. Mais à ce jour, aucune information sur la teneur de ce rapport officiel ou encore aucun détail des documents à être déposés n’ont transpiré en public.
Lors de la première séance de l’Assemblée nationale de cette année, répondant à une interpellation du député du PMSD Richard Duval, le Premier ministre, Pravind Jugnauth, avait soutenu, entre autres, que « in the context of the preparation of its reply, Mauritius considered it necessary to undertake a scientific survey of Blenheim Reef which took place from 8 to 22 February 2022. The purpose of the survey was to collect crucial data which can assist the Special Chamber of the International Tribunal for the Law of the Sea in the maritime delimitation exercise. »
Toutefois, à une interpellation supplémentaire, le Leader of the House n’a pas voulu donner la moindre indication sur les findings des deux surveyors étrangers ayant effectué le voyage à bord du Bleu de Nîmes avec un price tag de l’ordre de Rs 50 millions. D’autre part, il était entendu entre les parties concernées que tous les documents à être portés à la connaissance du bench de la Special Chamber de l’ITLOS restent sous le sceau du secret jusqu’à ordre de cette instance.
Des sources autorisées avancent qu’indépendamment de la littérature scientifique autour de Blenheim Reef, un banc de récif au cœur de l’océan Indien, la présence du quadricolore de la République de Maurice sur ce point particulier, mais surtout l’empressement du Royaume-Uni de le faire enlever de même que ceux sur Peros Banos et les îles Salomon constituent une carte maîtresse dans le dossier de Maurice pour convaincre la Special Chamber de l’ITLOS de la pertinence de la demande de Maurice pour une délimitation des frontières maritimes en sa faveur.
Avec la décision de l’ITLOS au début de l’année prochaine, Maurice devra parachever le processus de décolonisation aux Nations unies à New York avec la délimitation de la frontière maritime au sud de l’archipel de Chagos avec le Royaume-Uni, comme partie adverse, déjà mis en position de hors-jeu avec les attendus de l’Advisory Opinion de la Cour Internationale de Justice de La Haye en date du 25 février 2019, confirmant de jure que l’archipel des Chagos a toujours fait partie intégrale du territoire de la République de Maurice.
Affaire à suivre avec ou sans l’apport des journalistes étrangers…