Rationnement ?

— Tu peux me dire un coup ce qui lui a pris à ce ministre-là ? Il manque d’occupation ?

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— Quel ministre tu es en train de parler ?

— Mais celui du Commerce, toi. Il peut à peine contrôler les prix dans les supermarchés, où parfois les étiquettes sur les rayons ne correspondent pas au prix à la caisse, et maintenant il veut nous rationner.

— Mais de quoi est-ce que tu es en train de parler ? De riz ration ? Tu manges ça, toi ?

— Tu vas croire toi-même ! Je te parle du rationnement de l’huile comestible, toi. Figure-toi qu’il veut donner deux litres seulement ?

— Ah bon ? Par personne, par famille et pour combien de temps ?

— Ça on ne sait pas. Lui-même ne doit pas savoir, si tu veux mon avis ! Le communiqué a seulement dit qu’on ne pouvait pas acheter plus de deux litres d’huile par personne.

— Mais comment il va contrôler ça ? Il va donner une carte de ration aux consommateurs mauriciens, comme le pass vaccinal ?

— Ça aussi on ne sait pas.

— Mais si tu achètes deux litres ici, qui t’empêche d’acheter deux autres dans un autre supermarché, hein ?

— Tout le monde a fait ça et nous aussi. J’ai envoyé la bonne dans une boutique, mon bonhomme dans un supermarché et les enfants dans d’autres boutiques. On a un buffet rempli d’huile maintenant.

— Au lieu de les inciter à économiser, le ministre a fait les Mauriciens faire des stocks. Mais qu’est-ce que tu vas faire avec cette quantité d’huile là, toi ?

— Ben là, on est sûrs de ne pas manquer d’huile jusqu’à au moins la fin de la guerre. On fait comme on a fait avec les balles de riz. Mais seulement, on a dû jeter du riz parce qu’après un certain temps, il y avait de petites bêtes dedans.

— J’espère que tes bouteilles d’huile ne vont moisir ou devenir rance. Mais tu ne m’as pas dit ce que tu vas faire avec un buffet rempli de litres d’huile…

— Tu sais, faire frire une douzaine de gâteaux piment ou un autre gâteau de l’huile, ça te prend facilement une litre. Et puis, on a besoin d’huile quand on fait la cuisine. Comment tu fais un mine frit, comment tu fais une vindaye ? Avec de l’eau ?

— On dirait que dans ta cuisine, le principal ingrédient c’est l’huile ! En tout cas, moi j’ai bien diminué la quantité d’huile, je te dis. Je mets juste une petite cuillère dans le curry que je suis en train de cuire. Juste pour lui donner du goût, pas pour le noyer dans de l’huile.

— Mais comment tu fais ? Ton manger ne doit pas avoir de goût, toi. Il doit être sec-sec !

— Ne crois pas ça, on mange très bien avec peu d’huile, et en plus, on est en meilleure santé. Je crois que le ministre a raison : il faut inciter les Mauriciens à consommer moins d’huile. C’est pas bon pour la santé.

— Mais c’est tellement bon dans le palais. Un gâteau bringelle ou un pain frit bien frit chaud, chaud avec un petit de satini, il n’y a rien de meilleur. Mais c’est pas le ministre du Commerce qui doit s’occuper de la santé des Mauriciens mais celui, justement, de la Santé.

— Ayo, ne me parle pas de lui, tu vas me faire avoir de l’urticaire. Heureusement que le Covid est en train de diminuer, comme ça on ne le voit plus tous les soirs à la télévision.

— En tout cas, personne n’a compris pourquoi le ministre du Commerce a décidé de faire un rationnement de l’huile comestible, un coup comme ça.

— Peut-être qu’avec la guerre il y a pénurie, rupture de stock ou une affaire comme ça qui l’a poussé à prendre sa décision.

— Menti, les importateurs ont fait une conférence de presse pour dire qu’il n’y avait ni un problème de stock ni un problème de ravitaillement.

— Tu veux dire qu’il a décidé de faire le rationnement sans consulter les importateurs et les revendeurs ?

— Oui, toi. C’est à cause de ça même qu’il a été obligé de backpedal et de retirer son communiqué. Il n’y a plus de rationnement. Tu ne vois pas qu’il manque d’occupation ce ministre-là ?

— À moins que…

—… à moins que quoi ?

— À moins qu’il y ait, derrière cette affaire de rationnement, une affaire de gros contrat.

— Tu as peut-être raison. Je viens de lire dans le journal que le ministère de la Santé a besoin de lancer des tenders pour la fourniture d’huile comestible dans les hôpitaux. Tu crois que le rationnement fait partie d’un plan à cause du tender ?

— Écoute, de la même manière que quand tu mets de l’huile sur le feu ça flambe, de la même manière il n’y a pas de fumée sans feu. Après tout, à Maurice, après les contrats donnés aux petits copains et grands coquins pendant le Covid, on est habitués à des appels d’offres taillés sur mesure, non ?

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