Plantant le décor à quelques heures d’un échange entre Joe Biden et Xi Jinping, les Etats-Unis ont fait savoir jeudi que la Chine s’exposerait à des représailles si elle devait « soutenir l’agression russe » contre l’Ukraine.
« Nous sommes préoccupés par le fait qu’ils envisagent d’assister directement la Russie avec de l’équipement militaire qui serait utilisé en Ukraine. Le président Biden va parler au président Xi demain, et lui dira clairement que la Chine portera une responsabilité pour tout acte visant à soutenir l’agression russe, et que nous n’hésiterons pas à lui imposer des coûts », a déclaré jeudi le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken.
« Nous voyons avec préoccupation que la Chine réfléchit à apporter à la Russie une assistance militaire directe », a-t-il ajouté.
C’est l’avertissement le plus clair lancé par les Etats-Unis à la Chine depuis le début de l’invasion de l’Ukraine, et il intervient à quelques heures d’une conversation entre les présidents américain et chinois, prévue vendredi à 09H00 heure de Washington (13H00 GMT).
Cet entretien, le quatrième entre les deux dirigeants depuis que Joe Biden est président, vise à « garder les canaux de communication ouverts entre les Etats-Unis et la République populaire de Chine », a affirmé dans un communiqué la porte-parole de l’exécutif américain Jen Psaki.
C’est là une préoccupation constante du président américain, pour qui les Etats-Unis et la Chine sont certes voués à se livrer une concurrence impitoyable, mais en maintenant un dialogue suffisant pour que cet affrontement ne soit pas source de chaos au niveau international.
Les deux dirigeants discuteront de cette « concurrence » entre Washington et Pékin « ainsi que de la guerre de la Russie contre l’Ukraine et d’autres questions d’intérêt commun », a précisé Jen Psaki.
Les Etats-Unis ont donc encore haussé le ton, eux qui avaient déjà jugé « profondément préoccupante » la position « d’alignement de la Chine avec la Russie » face à la guerre en Ukraine, après une très longue rencontre récente à Rome entre le conseiller à la sécurité nationale américain, Jake Sullivan, et Yang Jiechi, plus haut responsable de la diplomatie du Parti communiste chinois.
– « Amitié sans limite » –
Depuis le début de l’invasion russe le 24 février, le régime communiste chinois, privilégiant sa relation avec Moscou et partageant avec la Russie une profonde hostilité envers les Etats-Unis, s’est abstenu d’appeler le président russe Vladimir Poutine à retirer ses troupes d’Ukraine.
Mais l' »amitié sans limite » professée par Pékin et Moscou est mise à l’épreuve par la guerre en Ukraine, le régime du président Xi Jinping semblant avoir été surpris par la résistance ukrainienne à l’offensive russe et par la vigueur des sanctions occidentales.
Au-delà de la question d’une éventuelle assistance militaire à la Russie, Washington ne veut pas que la Chine aide à Moscou à atténuer l’impact de ces sanctions d’une sévérité jamais vues, censées étrangler financièrement et économiquement le régime de Vladimir Poutine.
« La priorité du président Biden (pendant la conversation) sera de demander à la Chine de ne pas donner à la Russie les moyens de compenser les sanctions internationales, et de ne pas envoyer d’équipements pour la machine de guerre russe en Ukraine », a dit à l’AFP Ryan Hass, expert auprès de l’institut de recherches Brookings, et ancien conseiller du président Barack Obama pour la Chine.
Xi Jinping pour sa part « doit arbitrer entre diverses priorités. Il accorde beaucoup d’importance au partenariat avec la Russie, mais il ne veut pas saper les relations avec l’Occident », dont la Chine dépend « pour son accès à certaines technologies de pointe », souligne-t-il.
« Les intérêts de la Chine et de la Russie ne sont pas alignés. Poutine veut dynamiter le système international alors que le président Xi se voit comme l’architecte d’un nouvel ordre international », analyse encore l’expert.
@afp