Avec la démarche de la Russie de suspendre ses exportations agricoles, il est estimé que le continent africain, surtout, sera durement impacté pour son approvisionnement en denrées essentielles. Or, la cherté de la vie a déjà un goût amer pour les Mauriciens. La pénurie alimentaire latente pourrait-elle alors être une Blessing in Disguise pour le pays ? Saurons-nous rebondir pour innover et lancer de nouvelles stratégies de substitution à l’importation ? À quel point peut-on devenir davantage autonome ?
Éric Mangar souligne qu’il est impératif de trouver des alternatives et pour cela, ajoute-t-il, la recherche est capitale. En effet, l’agronome et directeur du Mouvement pour l’autosuffisance alimentaire (MAA) rappelle que « la hausse du prix du maïs sur le plan mondial affectera l’élevage de volailles et la production d’œufs, nos principales sources de protéines ». Il suggère une meilleure exploitation de nos ressources marines comme les algues et les poissons, riches en protéines. Le cerf, croit-il, est également idéal pour la consommation locale. Cette situation difficile pourrait, note-t-il, être « une opportunité pour nous lancer dans notre propre production locale ».
Ancien Business Development Management de l’AREU, Shyamaparsad Bisnauthsing est convaincu que Maurice peut produire davantage de pommes de terre. « Dans les moments de braise, en 1984-1985, on en produisait même pour l’exportation. » S’il concède qu’il existe un problème d’appauvrissement du sol, « c’est quelque chose qu’on peut corriger », selon lui. Il recommande de « profiter de la période de production optimale pour préserver pour les temps durs ». La culture sous serre est aussi une option intéressante, estime-t-il. Bref, « la gamme de possibilités est énorme ». Sauf que « tous les pays qui ont réussi leur production agricole ont des incubateurs d’entreprise agricole qui soutiennent les entrepreneurs ».
Krit Beeharry, planteur et ex-directeur du National Food Security Committee, fait quant à lui ressortir « qu’une industrie devient solide quand elle ne rencontre pas de compétiteurs venant de l’importation ». Souvent, regrette-t-il, « on a vu des fonctionnaires encourager les planteurs à se lancer dans telle culture et au moment venu, ils ont recours à l’importation et entrent en compétition avec nous ». Pour Krit Beeharry, le problème est que « nous ne disposons pas de suffisamment d’espace pour stocker nos produits ». Or, quand la production est à son apogée, « on aurait pu empaqueter et surgeler pour consommer hors saison ».
D’autres sources de protéines, dit-il, peuvent être trouvées chez le lapin, le canard, le tanrec et le cerf. Mais le gros potentiel insuffisamment exploité demeure, pour lui, « les ressources vivantes marines qui peuvent être sources de minéraux, lipides, glucides, fibres, protéines etc. ».
ÉRIC MANGAR (AGRONOME) : « Une opportunité pour lancer notre propre production locale »
Le monde est secoué par un choc économique sans précédent depuis un demi-siècle. Avec la guerre en Ukraine, on estime que la sécurité alimentaire d’une partie de l’Afrique sera sévèrement impactée. Que peut-on produire à Maurice comme substitut à l’importation ?
Il y a trois facteurs qui nous affectent : le système alimentaire qui est bafoué ; le changement climatique et la guerre en Ukraine. D’autant que Maurice importe 75% de sa consommation alimentaire. Nous sommes donc un peu coincés. Il faudra chercher des variétés qui peuvent s’adapter au changement climatique auquel nous sommes confrontés. Pour cela, la recherche est capitale.
Dans le Sud-Est, par exemple, il y a des variétés de légumes que nous pouvons cultiver mais la salinité est en hausse avec le changement climatique. Il faudra donc chercher des variétés qui soient adaptées à la salinité des diverses régions de l’île. Ce dont nous avons besoin comme apports nutritionnels, c’est de l’énergie, des vitamines, des protéines et des fibres. S’agissant des protéines, le poulet contribue à 40% de nos besoins en protéines. Les prix des produits alimentaires ont augmenté cinq fois en une année à cause du fret qui a triplé, voire quadruplé. Le prix du maïs augmente sur le plan mondial et cela affecte l’élevage du poulet de table, mais aussi la production d’œufs, soit notre principale source de protéines.
Il faut donc impérativement trouver des alternatives. Il est primordial de faire des recherches à ce niveau. Par exemple, les algues ont un taux de protéines très élevé et peuvent être utilisées pour nourrir les animaux. Par ailleurs, il faudra donner du Mixer Grinder aux petits éleveurs pour qu’ils concoctent eux-mêmes les aliments pour les animaux. Ils peuvent planter du maïs à leur compte dans les champs de cannes qui ne sont pas utilisés ou utiliser les algues ou encore les drèches de bière, riches en protéines et en fibres. D’où l’importance des recherches pour trouver des alternatives.
Il vaut mieux donc ne pas compter totalement sur le maïs importé…
La Commission de l’Océan Indien (COI) a un rôle important pour essayer de nous faire avoir du maïs de l’Afrique du Sud. Si nous pouvons en planter à Madagascar, ce serait bien. Il faut commencer à trouver des solutions à ces problèmes. Il faut développer les blocs économiques. Il importe de travailler le partenariat régional pour voir quelles matières premières on peut avoir de la nourriture pour nos bêtes. Les Sud-Africains nourrissent leurs bœufs avec du maïs. Il faut engager les négociations.
Sur le plan local, il nous faut trouver des moyens pour produire autant que possible des légumes. Il est important d’encourager la production de légumes et de fines herbes au niveau des ménages. Là où c’est possible, les familles peuvent élever des canards-manille, des poules et avoir des œufs. À la place du maïs, elles peuvent utiliser du fourrage, des légumes pour nourrir ces volailles.
Si l’espace fait défaut ?
Nous pouvons pratiquer le Vertical Farming. Nous utilisons les surfaces des murs pour planter des légumes filants ou grimpants.
Comment mieux exploiter nos ressources marines vivantes ?
Les poissons sont d’importantes sources de protéines. Depuis 2009, le gouvernement a investi dans six bateaux semi-industriels qui vont pêcher sur les bancs de Saint-Brandon mais ce n’est pas suffisant pour nourrir une population. Le poisson doit pouvoir être accessible à un prix raisonnable. Si c’est à Rs 75 la livre, il faut deux livres au minimum pour une famille et cela revient à trop cher.
Il faudra un système de marketing très rodé. Il faut davantage de bateaux semi-industriels. Le gouvernement doit accorder des prêts financiers pour que les pêcheurs puissent exploiter ces zones territoriales. Un bateau fournit de l’emploi à une quinzaine de personnes. Les pêcheurs peuvent se regrouper en coopératives qui investiraient dans ce secteur profitable.
Avez-vous d’autres idées de production agroalimentaire ?
Le cerf est un animal qui vit dans les forêts. Il n’a pas été affecté par la peste porcine. Le cerf est une viande qui contient moins de cholestérol que les autres viandes et peut remplacer le bœuf par exemple d’autant qu’elle est consommée par les habitants de toutes confessions religieuses à l’exception bien sûr des végétariens. Le cerf se reproduit assez vite et nous pouvons faire un élevage tant extensif (faible densité par hectare d’animaux) qu’intensif (qui peut tendre à l’industrialisation). Il y a aussi la possibilité d’en exporter.
Pour cela, il faut que nous nous en conformons aux normes européennes. Pour la consommation locale, le cerf est idéal. C’est important de pratiquer l’élevage de cabris et moutons car ce sont des bêtes qui ne consomment pas autant de fourrages que les bœufs. Il nous faut une stratégie pour l’élevage des moutons et une stratégie pour celui des cabris. Ils consomment beaucoup de fourrages même si ce n’est pas autant que les bœufs. Ils peuvent être de bonnes sources de protéines pour la population. Il nous faut former des jeunes pour l’élevage de moutons et de cabris. Il importe aussi de former la population en matière nutritionnelle.
En définitive…
Le système alimentaire mondial nous a fait importer des produits alimentaires, pas de bonne qualité. Aujourd’hui que ce système est affecté, cela nous donne une opportunité de nous lancer dans notre propre production alimentaire. Cela nous pousse à revoir nos habitudes alimentaires. Il faut lancer des Community Gardens un peu partout à travers l’île pour planter des fruits à pain, des patates, des bananes. Nous pouvons planter les fruits à pain dans les forêts. Nous pouvons préparer beaucoup de plats à base de farine. C’est à nous de parfaire notre système de marketing pour que tous puissent avoir accès aux produits alimentaires.
Ainsi, si nous ne trouvons pas un bon système de préservation des pommes d’amour, nous ferons face à une pénurie. Il faut éduquer les habitants comment conserver les pommes d’amour, les légumes par temps difficiles. Il faut s’occuper de l’aspect sécu-nutritionnel, soit une nourriture qui réponde à nos besoins en énergies, protides, vitamines, oligo-éléments et fibres.
SHYAMAPARSAD BISNAUTHSING (AREU) : « La gamme de possibilités est énorme »
Le monde est secoué par un choc économique sans précédent depuis un demi-siècle. Avec la guerre en Ukraine, on estime que la sécurité alimentaire d’une partie de l’Afrique sera sévèrement impactée. Que peut-on produire à Maurice comme substitut à l’importation ?
A Maurice, nous ne pouvons pas tout produire. Nous ne pouvons cultiver du blé et de l’avoine, etc. La production agricole diminue d’année en année. Or, pas de production agricole, pas de d’autosuffisance alimentaire. Exemple : la culture de la pomme de terre se fait assez bien à Maurice. Dans les années de braise, en 1984-1985, nous en produisions même pour l’exportation. La production était de 25 000 tonnes par an alors qu’aujourd’hui, elle n’est que de 13 000 – 14 000 tonnes alors que la consommation dépasse les 25 000 tonnes.
Quelles en sont les raisons ?
Les raisons sont multiples. Il y a l’appauvrissement du sol, le climat. Autrefois, nous pouvions entamer la saison de la pomme de terre à partir d’avril et cela se poursuivait jusqu’à novembre avec la récolte en février.
Maintenant, c’est quasiment impossible à cause des conditions climatiques comme les pluies diluviennes. Il y a aussi la main-d’œuvre qui fait aujourd’hui défaut.
L’urgence en temps de crise n’attirerait pas automatiquement de la main-d’œuvre ?
La main-d’œuvre locale ne dure que trois heures. Nous commençons à 6h30 et nous terminons à 10h..
Revenons à ce qu’on peut produire localement…
Nous pouvons produire de la pomme de terre. Je suis catégorique là-dessus. L’appauvrissement du sol est quelque chose que nous sommes en mesure de rectifier. Nous avons détruit la santé du sol. Il y a des millions de micro-organismes dans le sol qui aident à alimenter les plantes en nutriments. Il y a des moyens de corriger la fertilité du sol.
Quand quelqu’un est malade, il va chez le médecin. Mais là, nous ne faisons qu’appliquer des fertilisants. Il importe d’identifier une terre de qualité appropriée pour la production de pommes de terre. L’utilisation d’engrais bio doit être encouragée, ce qui boostera la fertilité de la terre. Il faut aussi davantage de communication entre les producteurs, les aspirants producteurs et les entrepreneurs potentiels.
Outre la pomme de terre ?
Les goûts ont évolué. Nous ne voulons plus manger de manioc, de patate, de fruit à pain. Le fruit à pain, par exemple, est saisonnier. Ce qu’on peut faire, c’est profiter de la production optimale et préserver pour les temps durs.
Les mettre en conserve ?
C’est une option mais au Food and Agricultural Research and Extension Institute (FAREI), nous avons travaillé depuis 2000 sur la conservation d’une multitude de produits. Il y a la réfrigération. Au lieu d’importer des carottes, des petits pois etc., nous pouvons les produire localement. Nous pouvons préserver ce dont on a besoin dans la chambre froide. Pourquoi nous ne pouvons procèder ainsi? Je ne comprends pas. Dans les années 1983, il y avait un Mindset. Il y avait de la volonté de faire des choses…
Quels sont aujourd’hui les nouveaux secteurs alimentaires pouvant constituer un substitut à l’importation, et donc renforcer notre autosuffisance alimentaire ?
Comme je l’ai dit, nous ne pouvons aspirer à l’autosuffisance alimentaire sans production. Si nous sommes limités en terre, en main-d’œuvre et au niveau de la qualité du sol, nous ne parviendrons jamais à atteindre l’autosuffisance alimentaire. Quand nous parlons d’autosuffisance alimentaire, nous parlons d’aliments de base. Certains préconisent un petit potager dans son arrière-cour mais avec un petit potager de 10m2, 20m2. Mais ne sera pas l’autosuffisance alimentaire. Mais cela peut dépanner.
En revanche, la culture sous serre pourrait être exploitée davantage car elle ne requiert pas beaucoup d’espace. Ce serait plus productif et plus rentable. La qualité est aussi meilleure. Si la superficie est petite, on peut mieux préparer le terrain.
Que peut-on produire sous serre ?
Tout une gamme d’aliments. Outre la culture sous serre, nous pourrons envisager la transformation alimentaire. Tout récemment, la pomme d’amour était à Rs 30-Rs 40 au détail. Une occasion de s’engager dans la préservation de la pomme d’amour même si ce sera pas dans un état frais, mais avec des additifs, des conservateurs. La technologie liée à la transformation existe déjà à Maurice mais je ne comprends pas pourquoi nous n’avons pas encore fait ce pas.
Cela pourrait en même temps créer de l’emploi…
Oui. C’est l’industrie agroalimentaire que nous devons créer. Nous produisons beaucoup de choses à Maurice mais, par exemple, la production du lait à grande échelle, nous l’avons essayée mais cela n’a pas marché parce que les Mauriciens sont habitués au lait en poudre. Mais, nous pourrions exploiter mieux la production bovine. Si Rodrigues peut le faire dans un climat sec, pourquoi pas Maurice?
Qu’en est-il des ressources vivantes de l’océan ?
Il y a beaucoup de choses que nous pouvons peut confectionner : les Ready to Eat Products, la préservation en pot ou en boîte. Nous avons connu du succès dans le passé mais aujourd’hui nous préfèrons en importer. C’est là le problème.
Pour résumer, y a-t-il beaucoup de ressources alimentaires qui mériteraient d’être mieux exploitées pour réduire l’importation ?
La gamme d’opportunités est énorme. Tous les pays qui ont réussi leur production agricole ont des incubateurs d’entreprise agricole, c’est-à-dire, des projets d’aide aux aspirants agriculteurs avec une formation agronomique et entrepreneuriale. Nous avons tendance à Maurice à se concentrer sur l’économie des petits planteurs. Nous devons sortir de cela. La production doit être à hauteur d’entreprise.
A l’AREU, à l’époque, avec l’école des fermiers – je ne sais où nous en sommesaujourd’hui – il y avait le Technology Centre. Il y avait des mesures d’incitation. Si quelqu’un voulait se lancer dans un tel produit et qu’il n’avait pas les moyens de payer un consultant, nous l’aidions. Tout cela dépend de la politique agricole du gouvernement. Il y a des personnes qui sont payées pour trouver des solutions à la situation actuelle. Comme on dit, il faut un Driver dans le secteur.
KRIT BEEHARRY (PLANTEUR) : « Il nous faut changer nos habitudes alimentaires »
Le monde est secoué par un choc économique sans précédent depuis un demi-siècle. Avec la guerre en Ukraine, la sécurité alimentaire d’une partie de l’Afrique sera sévèrement impactée. Que pouvons-nous produire à Maurice pour remplacer l’importation ?
Il s’agit de voir quels sont les secteurs où nous sommes autosuffisants et quels sont les autres où nous ne le sommes pas. À part la pomme de terre, l’oignon et l’ail dont nous produisons 80% localement, nous importons les 20% restants sous forme frigorifiée, transformée et semi-transformée. Avant 2014, nous étions presque autosuffisants en pommes de terre et oignons. Malheureusement, beaucoup de facteurs ont découragé les planteurs.
S’agissant du bétail, nous importons plus de 95% de la consommation du pays. Heureusement, en ce qui concerne le poulet, nous sommes autosuffisants grâce à ceux qui ont su tenir cette industrie. Une industrie devient solide quand elle ne rencontre pas de compétiteurs venant de l’importation. Au niveau de la production locale de lait, nous sommes presque à zéro. Nous avons un gros problème de conservation des aliments. Face au changement climatique qui perturbe les récoltes, nous ne disposons pas de suffisamment d’espace pour stocker nos produits. Quand la production est à son apogée, nous aurions pu empaqueter et surgeler pour consommer hors saison.
Récemment, nous avions stocké des carottes pour les temps difficiles mais cela ne se fait pas de manière professionnelle. Il n’y a pas de planification ni de recherches pour déterminer combien de carottes et de quelle manière nous pouvons les conserver. Pour moi, c’est juste une façon de faire croire aux petits planteurs qu’il y a un projet mais que l’expertise n’est pas là.
Quels sont les moyens de préservation dont nous disposons ?
La préservation en chambre froide surtout. Il faut considérer la production et le stockage en termes d’apports nutritionnels (vitamines, protéines, fibres etc.) qu’ont ces aliments. Il importe aujourd’hui d’augmenter notre savoir-faire dans les domaines que nous maîtrisons. Le prix du poulet grimpera puisque les pays s’approvisionnant en maïs de Russie risquent de se tourner vers le Brésil et l’Argentine et les prix flamberont.
Il y avait des plans pour la mécanisation agricole pour la production du maïs mais le prix sera cher. Peut-être pouvons-nous obtenir des subventions sur la culture du maïs. Nous pourrions peut-être chercher d’autres sources de protéines comme le lapin, le canard, le tanrec et le cerf.
Quelles sont les alternatives dans l’immédiat ?
Il faut augmenter la production locale de pommes de terre, sources de glucide qui pourraient demain remplacer le riz en cas de pénurie. Nous disposons de beaucoup d’espace pour cette culture. Nous avons le savoir-faire. Les semences pourraient peut-être poser problème. Nous avons déjà essayé la production locale de semences.
Outre la pomme de terre, nous pouvons nous lancer dans la culture de maïs – même famille que la canne – qui est aussi source de glucide. Il y a aussi le taro, l’arouille et la patate qui rapportent assez vite. Nous sommes aussi bons dans la culture de grains secs. Comme sources de protéines, nous pouvons produire du maïs. C’est d’ailleurs l’occasion de transformer le secteur sucrier. Nous pensons encore que le sucre nous rapportera de l’argent.
Souvent, nous avons vu des fonctionnaires encourager les planteurs à se lancer dans telle culture et au moment venu, ils ont recours à l’importation et entrent en compétition avec nous. Il n’y a pas un Strategic Plan pour distribuer des semences par exemple aux planteurs pour les soutenir.
Le rapport du FAO depuis 2008 avait préconisé que tous les pays soient avant-gardistes s’agissant de l’autosuffisance alimentaire. Chaque pays doit avoir une production minimum de 22% de ce qu’il consomme. Les deux facteurs tenus en compte étaient la guerre et une pandémie ! En 2008, on était autosuffisant à 12-13%. Aujourd’hui, peut-être sommes-nous à 3-4%.
Et les alternatives sur le plus long terme ?
Il faudrait un plan de recherche pour étudier la rentabilité des cultures. En temps difficile, il nous faut changer nos habitudes alimentaires. Nous ne pouvons s’entêter à chercher du riz basmati. Nous pouvons couper le riz lors d’un repas pour le remplacer par la patate douce par exemple. Il faut encourager les jeunes à se lancer dans des vergers. Il n’y a pas un programme solide en ce sens.
Un verger devient rentable à partir de huit ans. Il faut leur donner un salaire pendant ces huit ans, une formation pour qu’ils produisent des tonnes de fruits pour le pays. Il y a une multitude de fruits que nous pouvons cultiver : goyaves de Chine, goyaves blanches, rouges, attes, jacque, cœur de bœuf, etc.
Tout porte à croire que le poulet et les œufs ne seront pas accessibles vu la pénurie anticipée du maïs. Quelles alternatives ?
En Israël, si le producteur produit plus que son quota, il écope d’une amende. C’est fait pour empêcher une surproduction qui pourrait baisser le prix du lait et décourager les producteurs. Israël importe l’herbe de l’Égypte et la conserve mais elle en plante aussi. Le pays n’a aucune pénurie alimentaire car il y a un plan qui n’est pas calculé en termes économiques mais en termes d’apports nutritionnels.
Le mot de la fin…
Il y a un secteur qui représente un potentiel énorme : la mer. Les poissons et les algues constituent d’importantes sources de protéines. Les algues peuvent se substituer au maïs pour nourrir les volailles. Avec les prix des fertilisants en passe de monter en flèche, il sera difficile de produire. Il s’agit des engrais N (azote), P (phosphore) et K (potasse), disponible mer, précisément dans les plantes. Il nous faut pouvoir les extraire à des prix compétitifs.
Notre potentiel, pour moi, ce sont les ressources vivantes dans la mer qui peuvent être sources de minéraux, lipides, glucides, fibres, protéines etc. pour l’humain et pour les animaux. Nous pouvons y trouver les sources de N, P et K. Il nous faut changer notre mode alimentaire. Nous consommons beaucoup de riz pour rien. D’ailleurs, nous sommes un des pays avec le plus fort taux de diabète. Nos économistes n’ont jamais misé sur le secteur agricole, mais davantage sur les secteurs qui rapportent de l’argent.