– La fédération a été invitée à venir s’expliquer le 23 mars sur les points avancés par le club portlouisien qui conteste les conditions autour de cette assemblée
– Un dossier aussi envoyé à l’ICAC, avec documents à l’appui, afin que toute la lumière soit faite sur cette affaire
Les élections prévues pour ce mercredi 9 mars par la Fédération mauricienne de judo (FMJ) et avalisées par le ministre des Sports, Stephan Toussaint, suivant une rencontre avec le président de la fédération, Josian Valère, lundi, n’auront finalement pas lieu. Le juge en chambre, Denis Mootoo, a émis un ordre d’interdiction contre ces élections, vendredi, en attendant d’écouter les explications de la fédération le 23 mars. Un huissier de la Cour Suprême a, dit-on, servi cet ordre, vendredi, à la fédération. Ce développement, précisons-le, fait suite à la demande d’injonction du vice-président de Cassis Fraternel Judo Club, Joseph Mounawah. Ce dernier a retenu les services de Me Uttam Hurnauth, avocat et Me Rajendra Appajala, avoué.
Contacté, Me Uttam Hurnauth a confirmé la nouvelle à Week-End. Joseph Mounawah indique ainsi : « Nous sommes amplement satisfaits de ce développement. Comme nous l’avons toujours dit, il faut que le Tribunal arbitral du sport se prononce d’abord sur notre plainte avant la tenue de ces élections. Le juge en chambre a écouté les points avancés dans notre demande d’injonction avant d’émettre cette ordre. Nous avons confiance en la justice », déclare-t-il.
Le moins que l’on puisse dire, c’est que cette affaire a pris une tournure importante avec la décision de la Cour. Surtout après la décision du ministère des Sports de permettre à la FMJ d’aller de l’avant avec son assemblée élective. Cela, en dépit du « rappel », envoyé deux jours plus tôt par Cassis Fraternel Judo Club, faisant suite aux mêmes récriminations d’il y a plusieurs mois ! Ce qui est cependant grave, c’est qu’en dépit d’être parfaitement au courant de la situation, le MAJSL n’a rien trouvé à dire comme en témoigne sa décision de laisser la FMJ « carry on » avec ses élections de ce mercredi !
Comme s’il était normal, pour une fédération, de fonctionner comme bon lui semble ! Comme s’il était normal qu’une fédération n’ait pas de compte bancaire pendant deux ans ! Et qu’on n’ose surtout pas affirmer, au MAJSL, qu’on n’était pas au courant ! Une correspondance en date du 24 décembre 2020 en fait mention ! Au cas contraire, peut-on nous dire si la FMJ et ses internationaux ont bénéficié d’un soutien financier de l’Etat pendant ces deux ans ?
Complaisance inexpliquée
Ce qui est malheureux et très dangereux surtout, c’est que ce qui est dit par la FMJ semble faire office de parole d’évangile ! Sinon comment peut-on uniquement se satisfaire de la « garantie donnée par Josian Valère », lundi, que des mesures seront prises pour remédier à la situation ? Si le président de la FMJ a bien affirmé cela, comme l’indique une source au MAJSL, c’est qu’il concède qu’il y a des problèmes ! Pourquoi aussi le reconnaître maintenant, mais pas au cours des trois dernières années ? C’est justement cette question que le ministre Stephan Toussaint aurait dû poser au lieu de faire preuve, une fois encore, de ce qui pourrait être qualifié de complaisance inexpliquée.
Fort heureusement, l’injonction logée en Cour Suprême, lundi, a obtenu une meilleure considération qu’au MAJSL. Au vu de l’acceptation de la demande d’injonction de Cassis Fraternel Judo Club par la Cour, tout porte à croire que des zones d’ombre seraient abordées avant d’aller vers des élections.
La question qu’il faut se poser est de savoir pourquoi Joseph Mounawah conteste-t-il les conditions autour de l’organisation de ces élections ? Les raisons sont très simples. Il y a d’abord ce qui est considéré comme « l’exclusion » de 18 clubs ! 12 clubs membres ont vu leur demande de renouvellement être systématiquement refusée, tandis que les six nouvelles demandes d’affiliation sont demeurées en souffrance au cours de ces trois dernières années !« A ce jour, la fédération ne nous a pas informés de la raison officielle de ce refus », déplore Joseph Mounawah.
Où est le nouveau format d’affiliation ?
« Ce qui est révoltant, c’est que le ministère des Sports nous a demandé de refaire notre demande de renouvellement et d’affiliation selon un nouveau format de la fédération. Je me suis personnellement déplacé pour m’enquérir auprès de la fédération. À deux autres reprises, d’autres clubs sont partis et à chaque fois, on nous a dit que le format n’était pas prêt », déplore Joseph Mounawah. Pour lui donc, les élections de ce mercredi ne peuvent se tenir étant donné surtout que 18 clubs constituent une majorité. Est-ce donc ce qui fait peur à la FMJ, d’où son refus d’accorder ces affiliations ? Surtout quand on sait que Stephan Toussaint avait déclaré, à l’Assemblée nationale, le 26 octobre 2019, que cette fédération avait 16 clubs affiliés au 26 janvier 2019 ?
Cassis Fraternel Judo Club a également porté plainte à l’ICAC, avec dossiers à l’appui. Il est ainsi précisé que la FMJ a tenu ses élections le 26 janvier 2019 et que le Security Bond a été signé le 29 janvier, soit trois jours plus tard. Ce club estime que, selon la Registrar Act, la FMJ avait un délai de 14 jours pour déposer ce document très important au Registrar of Associations ? Ce qui n’aurait pas été fait, selon Joseph Mounawah.
Selon les documents dont dispose le club portlouisien, le Security Bond est arrivé au Registrar of Associations le 18 novembre 2019. Faute d’avoir pu respecter les procédures, la FMJ est donc restée sans compte bancaire pendant deux ans. Une correspondance en date du 24 décembre 2020 le confirme. Dans ces conditions, comment la FMJ a-t-elle approuvé son bilan financier pour l’année 2019/20 et 2021/21 ? La FMJ a-t-elle, au-delà de cette date, pu avoir accès à son compte bancaire ? Si tel n’est pas le cas, alors comment a-t-elle réceptionné les frais d’affiliation qu’elle évoquait dans sa convocation du 25 janvier en marge de l’assemblée générale annuelle du 8 février au dojo de Grande Rivière Nord Ouest ?
2600 “Estimated judokas” selon la FIJ !
L’autre fait qui suscite des interrogations demeure le nombre de licenciés recensés à la FMJ. Combien sont-ils au juste ? En se basant sur les chiffres disponibles sur le site de la Fédération internationale de judo (FIJ), il est indiqué, sur la page de Maurice, que cette fédération compte 2600 “Estimated judokas”. Or, dans sa réponse au Parlement le 26 octobre 2021, Stephan Toussaint a, selon les informations données par la FMJ, parlé lui de 231 licenciés ! Il avait précisé: “As regards part (c) of the question, I am informed by the Federation that the number of licensees for 2021 is 321”. Troublant, n’est-ce pas ?
Dans la plainte déposée à l’ICAC, Cassis Fraternel Judo Club fait aussi référence aux Competition Fees qui figurent sur les règlements des championnats nationaux de septembre 2020. Un chiffre de Rs 50 est indiqué. Les judokas ont-ils eu à payer cette somme ? Si oui, comment la FMJ a-t-elle procédé en prenant en considération qu’elle n’avait pas de compte en banque à cette époque ?
Ce qui est sûr, c’est que les points avancés méritent une longue réflexion. Malheureusement, tel n’a pas été le cas au MAJSL qui a traité ce dossier avec beaucoup de légèreté. Et ça, c’est très inquiétant, non seulement pour l’avenir du judo, mais pour le sport en général !