Le Radar Operator de la NCG se fait remonter les bretelles par le Chairman, l’ancien juge Hamuth, lui demandant « d’arrêter de raconter des histoires »
Fin des audiences de la Court of Investigation hier après plus d’un an de travaux
Le constable Jugarnath, qui agissait comme Radar Operator de la National Coast Guard au poste de Pointe-du-Diable a été confronté pour la troisième fois à ses contradictions et incohérences. Cet officier de police était de service le jour du naufrage du vraquier MV Wakashio, dans la soirée du samedi 25 juillet 2020 au large de Pointe-D’Esny.
Il est venu hier en cour avec une nouvelle version pour expliquer les incohérences notées dans les relevés téléphoniques. Il devait ainsi expliquer que ce jour-là, il avait oublié son téléphone portable chez lui et avait pris celui de son épouse par erreur. Face à cette version, évoquée pour la première fois, après ses deux précédentes auditions, le Chairperson, l’ancien juge Abdurafeek Hamuth, lui a fait comprendre qu’il inventait des histoires pour se tirer d’affaire.
L’officier de la NCG s’est attiré de vives critiques sur son rôle et le monitoring du navire dans les eaux de Maurice. L’officier avait ce jour-là pris la relève du constable Sujeebhun, qui était en poste depuis le matin. Le témoin a ainsi expliqué qu’il devait prendre son poste à 21h40, mais qu’il y était « depuis bien avant » et s’occupait d’autres tâches.
Mais confronté aux deux appels de son numéro de téléphone portable au poste de la NCG de Pointe-du-Diable, le Radar Operator, qui déposait pour la troisième fois, est cette fois venu avec une toute nouvelle version. Il a ainsi expliqué que le jour du drame, il avait oublié » son téléphone portable chez lui et avait pris celui de son épouse par erreur .
Il expliquera ainsi que ces deux appels provenaient de son épouse, la première fois pour l’informer qu’il avait oublié son téléphone et la deuxième pour lui demander s’il avait mangé. L’ancien juge Hamuth l’a cependant tout de suite interrompu pour lui faire remarquer que c’était la première fois qu’il venait avec cette version. Visiblement agacé par cette situation, le Chairperson lui a alors lancé qu’il ne dit pas la vérité et qu’il « invente une histoire pour se tirer d’affaire ».
« Do not argue »
L’ancien juge Hamuth est par ailleurs revenu plusieurs fois sur les entrées consignées dans le Diary Book et qui, a-t-il fait remarquer, étaient « assez incohérentes » avec la chronologie des événements de cette nuit-là. L’officier a ainsi indiqué qu’il ne savait pas que le navire s’approchait des côtes, car le radar démontrait que le bateau était Underway.
« Is it not that a ship which is not moving appear underway on your radar. Is there a problem with your equipment? From 19h25 to 22hrs, the ship was not moving and you find this normal », a demandé l’ancien juge Abdurafeek Hamuth. Ce à quoi l’officier n’a pu répondre.
Ce dernier s’est aussi fait taper sur les doigts plusieurs fois pour avoir haussé le ton lors de ses explications. Le Chairperson devait lui demander « not to argue ». L’ancien juge Hamuth, au bout de son audition, a déclaré que le PC Jugarnath et son collègue, le PC Sujeebhun, n’étaient pas au courant de ce qui se passait avec le MV Wakashio le jour des faits.
Lors de son audition, hier, le PC Sujeebhun s’est contenté de dire qu’il ne se rappelait pas des appels effectués ce jour-là et qu’il ne se souvenait uniquement que du moment où le frère du PC Jugarnath est venu lui rendre son téléphone portable au poste de Pointe-du-Diable.
Ainsi, après plus d’un an, les travaux de la Court of Investigation ont pris fin hier. L’ancien juge Hamuth en a profité pour remercier les avocats pour leur patience ainsi que les membres de la presse pour leur couverture et leur objectivité ». Le panel se consacrera désormais à la rédaction du rapport.
La Court of Investigation mise sur pied pour déterminer les circonstances ayant mené au naufrage du vraquier MV Wakashio sur la côte de Pointe-d’Esny le 25 juillet 2020 a démarré ses travaux le 19 janvier 2021. C’est dans la salle d’audience No 2 de l’ancienne Cour suprême, rue Pope Hennessy, que se déroulent ces travaux. Le président, l’ancien juge Abdurrafeek Hamuth, et ses assesseurs, Jean-Mario Geneviève, Marine Engineer et Marine Surveyor, ainsi que Johnny Lam Kai Leung, Marine Surveyor, auront ainsi la tâche de déterminer les raisons du naufrage, ceux qui ont une part de responsabilité concernant la tournure des événements, avec, entre autres, les causes du déversement d’hydrocarbure dans le lagon, qui a affecté l’écosystème marin et paralysé la côte sud-est pendant des mois, ainsi que l’étendue des dégâts causés à l’environnement.
Le président et ses assesseurs devront aussi se prononcer afin de savoir si les pratiques et procédures du pilotage des navires qui entrent dans les eaux mauriciennes ont été respectées et si le suivi et la surveillance des navires dans nos eaux territoriales ont été suivis.