Jibraan, 16 ans, meurt de la Covid : « Mo’nn perdi mo lame drwat », pleure son père

L’adolescent, doublement vacciné de Pfizer, ne souffrait d’aucune comorbidité

Il faut arrêter de croire que Covid ne touche que les personnes âgées. Personne n’est invincible face à ce virus mutant. Et le décès de Jibraan Chatharoo, 16 ans, vient malheureusement nous le rappeler. Cet adolescent, scolarisé au collège Abdul Razack Mohamed, à la rue La Poudrière, Port-Louis, a succombé dans la nuit de vendredi à samedi au coronavirus. Son père et ses deux sœurs Nawsheen et Afreen sont inconsolables. « Mo’nn perdi mo lame drwat », pleure Nawshaad Chatharoo.

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Douleur et incompréhension animent la petite famille Chatharoo domiciliée à la rue Pagoda, Plaine-Verte. Avec le soutien de l’Al Ihsaan Islamic & Funeral Center, elle a enterré, samedi, le fils unique de la famille, Jibraan. Il n’avait que 16 ans et devait prendre part aux examens de SC à la fin de l’année. « Mo nepli konpran momem. Mo na pa kone ki finn arive. Mo nepli konpran narye », confie douloureusement son père. Son fils dit-il, jouissait d’une bonne santé. « Zame li finn al kot dokter. Ki li lopital ou swa dan prive. Li pa ti malad zame » affirme-t-il.

Lundi dernier, Jibraan a repris le chemin de l’école. Il en était heureux. D’ailleurs, pour lui, l’éducation passait avant tout. « Il avait une vision et il savait que pour cela, il devait passer l’étape de la scolarité », dit son père. Pendant le confinement, il s’était beaucoup appliqué à suivre les cours en ligne. Et pas seulement. Jibraan, du haut de ses 16 ans, avait une âme de protecteur envers ses deux petites sœurs âgées de 12 et 15 ans. « Il était un jeune homme débrouillard. Limem ti vey lor so de ser », dit Nawshad Chatharoo, confiant qu’il y a deux ans, il a perdu son épouse. Ainsi, lorsque c’était nécessaire, l’adolescent préparait le repas de ses sœurs.

« Mem pou mwa ousi, seki li kwi li gard pou mwa kan mo sorti travay mo gagne », poursuit le père, ajoutant que même si pris par ses leçons, Jibraan se faisait un devoir d’aider la famille. D’ailleurs, depuis le confinement, et avec l’école à la maison, il s’était davantage rapproché de ses deux sœurs, qu’il chérissait plus que tout, dit son père.

C’est ainsi, heureux de retrouver les bancs de l’école, que Jibraan a entamé la rentrée scolaire lundi dernier sans aucune crainte. « Zame li ti absan lekol. Mem lapli, mem nimport ki levennman », relate son père. D’ailleurs, pour ne pas être pénalisé, Jibraan avait effectué ses deux vaccins Pfizer contre le Covid. Le premier jour d’école s’était très bien passé, avait-il raconté à son père, lui confiant également que suivant la décision du gouvernement de reporter les dates, il aura plus de temps à consacrer à ses révisions pour prendre part aux examens de SC à la fin de cette année. « Li ti ena bon rezonnma », dit son père.

À son retour à la maison le deuxième jour de la rentrée, Jibraan confie à son père qu’il avait mal à la tête. « Je pensais que parce qu’il avait fait du sport à l’école, il ne se sentait pas bien. Comme la douleur persistait, j’ai préféré l’emmené à l’hôpital, pour avoir le cœur net. Mo dir les nou fer enn test parski nou pa kone », explique Nawshad Chatharoo. Si le test PCR de Jibraan est négatif au Covid, c’est celui de son père, qui n’a pourtant aucun symptôme, qui se révèle positif. Le lendemain matin, Jibraan informe ainsi son collège qu’il doit se mettre en auto-isolement. Il propose aussi à son père, puisque lui est négatif, qu’il se rende à la boulangerie pour s’approvisionner pour les jours qui viennent. L’adolescent se rend également à la boutique du coin pour quelques courses. « Il était prévoyant. Il m’a dit qu’il ne faut pas qu’on manque de quoi que ce soit pendant ces dix jours d’auto-isolement. »

Intubé aux soins intensifs

La journée de mercredi se passe très bien. Dans la soirée, père et fils se retrouvent dans la même pièce, à quelques mètres de distance cependant. « Mo ti pe alonze lor lili. Jibraan ti lor enn matla pli lwin. Li ti lor so portab », explique son père. Mais soudain, dit Nawshad Chatharoo, il entend un bruit du matelas. « Mo tann matla fer pouf, kouma dir li pe tonbe », raconte l’habitant de Plaine Verte. Lorsqu’il regarde dans la direction de Jibraan, il voit son fils en train de raidir le corps. « Mo degaze, mo deboule, mo sot lor lili, mo trap li, mo anpes li aval so lalang. Mo krie so ser, mo dir krie so mawsi pou ki amenn li lopital », raconte douloureusement Nawshad Chatharoo.

À l’hôpital, Jibraan est pris de vomissements et se plaint de douleurs à la tête. Pris en charge par le personnel, il est soumis à un test PCR avant d’être admis. Test qui se révèle positif au Covid. L’adolescent est alors admis dans une salle d’isolement. Il enverra quelques messages à son père pour réclamer quelques effets personnels et pour expliquer son état de santé. « Li ti pe dir latet fer mal bokou ek li pe gagn vomi mem », dit son père. Vendredi matin, aux alentours de 9h45, l’hôpital demande à Nawshad Chatharoo de s’y rendre et on l’explique que Jibraan avait fait une nouvelle crise et qu’il serait transmis aux soins intensifs où il est intubé. Après une attente jusqu’à midi, on permet à son père de le voir en ICU et on lui dit que l’état de Jibraan est critique et qu’il faudra l’envoyer à l’hôpital ENT pour des soins.

Jibraan est transféré à l’hôpital ENT vers 15h. Dans la soirée, un médecin informe Nawshad Chatharoo que son fils est dans un état très critique. Affolé, le père de l’adolescent et ses proches ne ferment pas l’œil de la nuit. À 6h30 hier, le téléphone sonne et la mauvaise nouvelle est annoncée à Nawshad Chatharoo. « Pran kouraz, li nepli la ! » Un véritable choc pour ce père qui n’arrive pas à comprendre ce qui s’est passé. « Mo nepli konpran narye. Mazine mo’nn perdi mo madam inn gagn 2 an, aster mo pe perdi mo lame drwat. Li mem ti tou dan lakaz », pleure ce père qui s’en remet à Dieu. « Mo zanfan pa ti ena okenn komorbidite. Li ti fini fer so de vaksin Pfizer. Travay Bon Dieu ou pa kone. Ou bizin aksepte. Kitfwa li ti bizin li kot so mama laba », dit-il.

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