Le deuxième changement du calendrier scolaire depuis 2020 apporte son lot d’inconvénients, notamment concernant l’âge des apprenants. Des enfants ayant déjà atteint l’âge de 5 ans, et qui devaient être admis au rimaire en juin prochain, devront en effet patienter jusqu’en janvier 2023. Certains auront donc six ans et demi.
Si les parents désespèrent, les enseignants se demandent comment ils géreront des groupes aussi hétéroclites. Dans toute cette affaire, ce sont les écoles privées payantes qui en profitent pour beurrer leurs épinards. Certaines avaient déjà choisi de maintenir l’ancien calendrier scolaire et ont recruté des enfants en Grade 1, aussi bien l’année dernière que cette année.
Alors qu’une nouvelle année scolaire vient de démarrer et que tous les yeux sont braqués sur les examens de School Certificate (SC) et de Higher School Certificate (HSC), les problèmes rencontrés au niveau du primaire et du préscolaire sont passés inaperçus. Mais des parents élèvent la voix aujourd’hui pour parler des contraintes auxquelles ils doivent faire face.
Leurs enfants se retrouvent en effet « bloqués » en maternelle et doivent attendre janvier prochain pour faire leur entrée au primaire. Une maman témoigne : « Mon fils a déjà eu cinq ans depuis septembre de l’année dernière. Il devait entrer en Grade 1 en juin de cette année. Mais avec le changement de calendrier scolaire, il devra dorénavant attendre janvier 2023. Ce qui veut dire qu’il aura déjà six ans et demi », se demande-t-elle.
La crainte de cette mère de famille est que son enfant s’ennuie en maternelle, alors qu’il a déjà atteint l’âge d’être au primaire. « Il s’était préparé à entrer en Grade 1 et attendait ce moment avec impatience. Il est déçu. Dans sa tête, il doit continuer à être avec les petits, alors qu’il est un grand », ajoute-t-elle.
Les parents ne sont pas les seuls à s’inquiéter de cette situation. Les enseignants se posent aussi des questions sur la manière dont ils vont gérer les classes, avec des décalages dans les groupes d’âge. « Lors de sa conférence de presse, la ministre a dit que pour les admissions de janvier 2023, on acceptera les enfants ayant atteint 5 ans jusqu’à décembre 2022. Or, il y aura dans la même classe des enfants qui ont déjà eu 5 ans depuis l’année dernière et qui auront 6 ans ou plus en janvier. Ils ne sont pas sur le même pied d’égalité, que ce soit au niveau de la maturité ou de l’autonomie », confie une enseignante.
La solution serait de regrouper les apprenants en petits groupes, selon leurs profils, afin de faciliter l’apprentissage. « Il reste toutefois le problème de ressources. Une enseignante pourra-t-elle gérer seule trois ou quatre groupes avec des niveaux d’apprentissage différents ? Ce sont les plus jeunes, avec moins de maturité, qui risquent de souffrir de cette situation », se demande-t-on.
Sollicité à ce sujet, un maître d’école est d’avis que le problème risque de se situer surtout au niveau de la capacité d’accueil des écoles. Il rappelle que pour la rentrée 2021-22, la date pour l’éligibilité avait déjà été repoussée de six mois. « Au lieu d’accueillir des enfants ayant atteint 5 ans au 31 décembre 2020, on a accueilli des enfants ayant atteint cet âge au 31 mai 2021. On a dû faire de la place pour accueillir plus d’élèves que d’habitude. Cette fois, avec le nouveau calendrier scolaire, on a étendu de six mois encore. On va donc se retrouver avec des enfants ayant atteint cinq ans en deux ans. On verra comment on va gérer tout cela », rajoute-t-il.
Pour la rentrée de juin 2022, les demandes d’admission avaient déjà été enregistrées en octobre de l’année dernière. Cela concernait les enfants ayant atteint 5 ans au 31 mai 2022. Un nouvel exercice est prévu pour ceux qui auront 5 ans au 31 décembre 2022.
Écoles privées
Ces problèmes survenus avec le nouveau calendrier scolaire font toutefois les affaires des écoles privées payantes. Certaines avaient, dès l’année dernière, décidé de recruter des élèves en Grade 1 en janvier, au lieu de juin. Cette année encore, des parents ont préféré se tourner vers ces écoles et d’encourir les frais, au lieu de garder leurs enfants encore une année en maternelle. Selon Statistics Mauritius, à mars 2020, il y avait 12 030 enfants en Grade 1 dans les écoles privées payantes, contre 52 043 dans les écoles du gouvernement et 18 441 dans les écoles subventionnées.
Les autorités, qui ont eu vent de ces pratiques, ne comptent pas rester les bras croisés. Déjà, depuis quelques années, les admissions sont scrutées au niveau des zones pour les écoles subventionnées afin de vérifier notamment si les Catchment Areas sont respectées. Il se pourrait, dit-on, que des règlements soient élaborés pour mettre fin à ces pratiques, qualifiées de discriminatoires à l’égard de ceux qui sont contraints d’attendre jusqu’à juin 2023, comme on l’avait fait justement pour empêcher les collèges payants de recruter des étudiants en Grade 12 sans cinq credits.
En attendant, les parents souhaitent que le ministère trouve des solutions pour leurs enfants afin que ceux-ci ne se lassent pas de l’école en étant bloqués en maternelle. D’autant que pour certains, cela représente aussi un budget supplémentaire sur une année, qu’ils n’avaient pas prévu. Car la grande majorité des enfants à Maurice fréquentent des écoles préscolaires privées, soit 21 024, contre 5 138 dans les écoles publiques.