Du 1er au 15 décembre : 78 Mauriciens ont sollicité l’aide de l’AIHD et 67 souhaitent bénéficier d’un accompagnement
L’Action for Integral Human Development (AIHD), compagnie privée du diocèse de Port-Louis, créée en 2012 avec pour objectif principal de promouvoir et améliorer le bien-être émotionnel de la personne à travers divers axes, programmes, et formations, lançait le 1er décembre dernier sa campagne nationale sur la santé mentale. A ce jour, explique Emilie Rivet-Duval, psychologue et responsable des projets de l’AIHD, « 78 personnes nous ont déjà contactées, via la hotline que nous avons mise en opération » dans le cadre de cette campagne. « De ce nombre, 67 appelants nous ont expliqué que la démarche leur a été bénéfique et qu’ils souhaitent un suivi. »
Cette réactivité, poursuit Emilie Rivet-Duval, « confirme nos appréhensions, et nous encourage surtout dans la voie empruntée, c’est-à-dire d’offrir un appui, serti d’un accompagnement à tous ces compatriotes, qui, d’une manière ou d’une autre, voient leur vie bouleversée depuis l’arrivée du Covid-19, l’an dernier ». Elle précise : « Ce qui remonte, surtout, de la part de la petite équipe de professionnels que nous sommes, et qui s’est engagée dans cette aventure humaine inédite, c’est qu’il y a énormément de souffrances, de douleurs, de tristesse, de peine, d’incompréhension, d’incertitudes et d’angoisses et d’anxiété au sein de la population actuellement. »
Emilie Rivet-Duval fait remarquer : « La crise sanitaire n’a pas uniquement engendré les confinements et les isolements. Il y a tous les bouleversements qui vont de pair, comme la perte d’emploi, l’école, qui est fermée, le deuil engendré par la disparition d’un ou de plusieurs proches emportés par la maladie… »
« Le climat anxiogène qui règne actuellement dans le pays, précise la psychologue, engendre chez les sujets des modifications et des ruptures dans leurs attitudes et comportements. » Prenant l’exemple des écoles fermées, Emlie Rivet-Duval fait remarquer : « Chez les étudiants, cette décision prise par les autorités, sans consultation avec les parties directement concernées, nommément les jeunes et leurs parents, a définitivement des retombées. Ce n’est que dans le temps que l’on arrivera à jauger des dommages causés. Mais ce qui est sûr, c’est qu’on aura une génération, voire plusieurs, qui seront paumés, comme c’est déjà le cas d’ailleurs. Et qui, dans le temps, subiront les séquelles de ces ruptures brutales de leurs habitudes et repères. »
La responsable de projets de l’AIHD est d’avis que « les autorités auraient définitivement gagné à ouvrir le dialogue avec les parties prenantes » dans tous les domaines. « On ne peut pas prendre de décisions au nom des uns et des autres sans les consulter ! »
L’AIHD préconise une meilleure écoute de tout un chacun, dit-elle encore. « De notre côté, ce qu’on fait, c’est d’outiller les personnes qui nous appellent. On les écoute et on leur parle. On les guide sur la manière dont elles peuvent, à leur niveau personnel d’abord, faire un travail sur soi pour comprendre, assimiler et surmonter –dans la mesure du possible, bien entendu – les traumatismes subis. »
Dans ce même ordre d’idées, continue la psychologue, « l’objectif est d’amener chaque personne à agir comme une “resource person” pour son entourage, cellule familiale, voisinage et groupe d’amis ». Cette personne, ainsi armée, « est prête à venir en aide aux autres qui l’entourent ».
L’idée de cette présente campagne, rappelle Emilie Rivet-Duval, repose sur le fait que « depuis 2020, nous observons une plus grande vulnérabilité de la population mauricienne », évoquant ainsi une hausse des risques de suicide, une augmentation des états dépressifs, un important état d’anxiété et un niveau de stress accru… « La situation est définitivement alarmante. » Pour étayer ses propos, la psychologue ajoute : « Des recherches font état d’une augmentation des niveaux de stress et d’anxiété dans la population. Une campagne sur la santé mentale nous a ainsi semblé fondamentale. Cette campagne, d’une durée de dix semaines, propose des outils pour permettre à chacun€ de prendre soin de lui (d’elle) et des autres dans ce contexte fragile. »
« De prime abord, plusieurs appelants nous ont expliqué qu’ils étaient soulagés après avoir bénéficié de l’écoute de nos professionnels. Beaucoup trouvaient “awkward” ce type d’exercice via téléphone, surtout. Mais au final, et on est bien contents justement, de cela, le “response” est plus positif qu’escompté. C’est dans cet esprit que 67 personnes ont à ce jour émis le souhait d’être encadrées et accompagnées par l’AIHD. »
Les professionnels de l’écoute de l’association ont ainsi enregistré des témoignages comme : « Cela m’a fait beaucoup de bien de m’épancher », « mettre en paroles ces souffrances et avoir cette écoute m’ont libéré », « il y avait un tel brouhaha dans ma tête : maintenant, j’arrive à me situer comme il le faut ». Ce sont, estime Emilie Rivet-Duval, « autant de signes que cette campagne était attendue et nécessaire », avant d’ajouter : « Nous sommes ravis de pouvoir offrir ce soutien. »
La campagne de l’AIHD se déclinera sur tout le mois de décembre et de janvier. Une hotline est mise à la disposition de ceux souhaitant solliciter un encadrement de l’AIHD (5450-8888).