«Tou Korek Lakaz Mama» et le scandale de Rs 80 M : zones d’ombre au menu de l’ICAC

  • Le dénommé Naeck installé comme Registrar du Pharmacy Board en catimini le 22/XI, avec la titulaire mutée à l’hôpital Bruno Cheong
  • Ce Top Gun de la Santé porte plusieurs chapeaux : Principal Pharmacist, Head of Procurement, Registrar of Pharmacy Board, Head of Pharmacy Inspectorate et Principal Pharmacist of Pharrmacovigilance Unit
  • Les doses de Molcovir de 200 mg avec la date de péremption de juillet 2022, déjà distribuées dans des hôpitaux, soit 50 000 par établissement, Hyperpharm Ltd, pharmacie opérant au No 8, dans un exercice de Restrictive Bidding pour un montant de Rs 120 millions le 8 octobre

L’Independent Commission Against Corruption (ICAC), qui a pris la décision d’initier une enquête Proprio Motu dans le scandale du contrat de Rs 79,8 millions octroyé à CPN Distributors Ltd, pourrait se retrouver avec un mandat plus complexe. C’est du moins ce qui découle des éléments compromettants qui émergent du côté du QG du ministère de la Santé. Tout semble indiquer que cette enquête sous les dispositions de la Prevention of Corruption Act devrait s’articuler autour du mécanisme mis en place pour contourner les procédures d’appels d’offres sous la Public Procurement Act, avec un recours abusif au Restrictive Bidding. Avant le scandale de Molcovir, des informations glanées par Le Mauricien de sources concordantes indiquent qu’un précédent contrat de Rs 120 millions en date du 8 décembre a vu l’inclusion de la pharmacie Hyperpharm en limitant au strict minimum les soumissionnaires potentiels. En attendant les conclusions de ces enquêtes, le ministère des Finances, qui a décrété un Stop Order pour le paiement de ce contrat alors que des doses de Molcovir, importées par CPN Distributors Ltd, ont déjà été distribuées, soit à raison de 50 000 par hôpital.

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Dans l’immédiat, outre la Senior Chief Executive à la Santé, Dalida Allagapen, techniquement Accounting Officer du ministère, deux autres Top Guns détiennent les secrets de cet Insider Dealing présumé pour fournir la version générique de Molnupiravir au prix astronomique de Rs 79.92 l’unité. D’abord, le Deputy Permanent Secretary à la Santé, le Dr Ramasawmy, envoyé en première ligne pour consigner des dépositions dans ce scandale. D’ailleurs, ce haut fonctionnaire avait signé la Letter of Award de ce contrat, dont les procédures ont été complétées en moins de 24 heures ce 7 décembre.

Toutefois, la genèse de cette affaire pourrait remonter à l’installation du Principal Pharmacist Naeck en tant que Registrar du Pharmacy Board en date du 22 novembre dernier alors que l’urgence de s’approvisionner en ce médicament se faisait sentir à la santé avec la pointe de la cinquième vague de contamination au Covid-19. La titulaire à ce poste stratégique au ministère de la Santé avait été transférée séance tenante à l’hôpital Bruno Cheong à Flacq.

Des spécialistes de ces rouages à la Santé soutiennent que les procédures établies imposent invariablement une demande au Pharmacy Board venant de tout pharmacien s’apprêtant à importer des médicaments pour la mise en vente dans le circuit local. Cette étape, qui comprend une analyse de toutes données pharmacologiques, prend entre deux et trois mois. Il n’est un secret pour personne que des importateurs déplorent souvent la longue attente pour l’obtention de l’accord du ministère pour faire venir un médicament.

Le délai aurait pu être long dans le cas de l’importation de ce médicament crucial dans le traitement du Coronavirus. D’abord, il s’agit d’un nouveau médicament sur le marché. Ensuite et surtout, la société CPN Distributors Ltd de Montagne-Longue n’a obtenu son permis de Wholesaler de médicaments qu’en juillet dernier.

Dans de telles circonstances, le Pharmacy Board aurait eu intérêt à s’engager dans un exercice de Scrutiny plus élaboré avant d’accorder la permission pour l’importation d’un million de doses de ce médicament générique pour le marché local. Et c’est là que l’ICAC devra résoudre ce casse-tête de la nomination d’un Nouveau Registrar du Pharmacy Board pour éclaircir le mystère de la connexion Chuttoo à la Santé.

Le 22 novembre, une directive interne est mise en circulation au ministère annonçant la nomination du Top Gun Naeck à ce poste stratégique. Dans son Statement de rattrapage à l’Assemblée nationale, vendredi soir, le ministre de la Santé, Kailesh Jagutpal, avait indiqué que ce même haut fonctionnaire avait fait état à la même époque des cinq producteurs de Molnupiravir en Inde.

Ce transfert subit de la Registrar du Pharmacy Board à l’hôpital de Flacq a intrigué plus d’un au ministère. Mais à cette époque, aucune explication n’avait été Forthcoming. Mais ce qui est davantage incompréhensible est que le nouveau Registrar se voit attribuer d’autres aussi lourdes responsabilités au sein du ministère. Ainsi, il est également Principal Pharmacist, Head of Procurement, Registrar of Pharmacy Board, Head of Pharmacy Inspectorate et Principal Pharmacist of Pharmacovigilance Unit. En principe, ces responsabilités auraient dû être réparties entre quatre hauts fonctionnaires de la Santé au nom de la bonne gouvernance et pour atténuer les risques potentiels de conflits d’intérêts dans ces Policy Decisions.

La Preliminary Investigation de l’ICAC, qui sera entérinée lors de la réunion du Board du jour, devra déterminer si ce changement à la tête de cette instance est en relation avec des Bearings sur le contrat de Rs 79,8 millions à CPN Distributors Ltd suite à une Pro Forma Invoice du 7 décembre.

Les faits indéniables dans la Molnupiravir Saga de l’opération « Tou Korek Lakaz Mama », devant être versés dans le dossier à charge de l’ICAC, se déclinent comme suit :
Le 30 novembre, le CPN Distributors Ltd reçoit sa commande de 1 million de doses de Molcovir d’un fabricant de l’Inde avec le formulaire de déclaration douanière, signé de Hammad Samtally, Custom Broker de Ramnauth Fast Track Services Ltd. À cette date, aucun accord officiel pour l’écoulement de ce médicament n’existe entre cette société et le ministère de la Santé et aucune démarche entreprise en vue de fixer le prix pour la vente sur le marché local.

Le 6 décembre le ministère alloue le contrat pour l’achat de 800 000 doses du générique de Molnupiravir 200 mg à Mauritius Pharmacy Ltd des Seegobin.

Le 7 décembre, CPN Distributors Ltd transmet un mail à la Senior Chief Executive du ministère avec copie à la Pharmacy Procurement Unit, sous la responsabilité du même Naeck pour faire part de son stock d’un million de doses de Molcovir. Le même jour dans l’après-midi, Cr l’ICAVPN Distributors Ltd reçoit le contrat pour l’achat du médicament « on the basis of emergency » et la Letter of Award est signée du Dr Ramasawmy, Deputy Permanent Secretary.

Le volet international de ce deal pourrait également intéresser l’ICAC. Les milieux pharmaceutiques à Maurice tant du privé que du public avancent que le laboratoire Merck (Merck Sharp and Dohme), fabricant du médicament Molnupiravir 200 mg a, à ce jour, donné un Voluntary Agreement à cinq laboratoires indiens pour la fabrication de ce médicament. Ces laboratoires indiens sont Cipla Ltd, Hetero Pharma, Sunpharma, Emcure et Dr Reddy’s Laboratories.

Le fournisseur de Molcovir à CPN Distributors, Optimus Pharma, serait toujours en attente du Licensing de Merck. Mais ce médicament est disponible depuis mercredi dernier dans nos cinq hôpitaux régionaux.

En effet, depuis mercredi dernier le ministère a distribué des doses de Molcovir de 200 mg aux cinq hôpitaux régionaux, soit 50000 par établissement. Des sources bien informées confirment que la date de péremption de ce médicament vendu par CPN Distributors Ltd est juillet 2022. Toutefois, la commande de 800 000 doses passée par Mauritius Phamacy a été fabriquée par le laboratoire Emcure et le ministère en prendra livraison le 15 décembre. Dans les milieux concernés on laisse entendre que la date d’expiration du stock de la Mauritius Pharmacy Ltd est dans dix-huit mois, soit vers avril-mai 2023.


Valayden consigne une déposition sur le scandale Molnupiravir

C’est en fin d’après-midi hier que Rama Valayden a logé une déposition au CCID sur le scandale d’achat de Molnupiravir. « Dimanche, j’ai envoyé une lettre au commissaire de police pour donner des renseignements sur cette affaire et je l’ai confirmé dans ma déposition », dit-il.
Il estime qu’il y a “conspiracy” dans ce cas et a demandé à la police de prendre possession des images CCTV du Procurement Department du ministère de la Santé au bâtiment Emmanuel Anquetil. « Ces images CCTV ont une vie temporaire et elles arrêteront d’être sauvegardées le 4 janvier. La police doit vérifier les va-et-vient qui ont eu lieu sur place ces derniers jours. » L’avocat a également remis aux enquêteurs des photos de certains membres du personnel de la Santé qui pourraient les aider.
Par ailleurs, il a une nouvelle fois réclamé la démission du ministre Jagutpal. « Si li pa demisione ziska vandredi, mo pou dimann bann kamarad inn ler pou al manifeste kot sa bann minis-la pou fer zot ale. » Rama Valayden a demandé à l’opposition parlementaire et extra-parlementaire d’accentuer la pression sur le gouvernement.

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