LETTRE OUVERTE AU PM, PRAVIND JUGNAUTH: Remettons le système éducatif sur les rails au plus vite !

Monsieur Le Premier Ministre,

- Publicité -

Impossible de terminer l’année scolaire en avril 2022. Les cours en ligne – en primaire comme en secondaire – sont inaccessibles pour beaucoup et donc une pédagogie inadaptée, créant plus de dégâts que de bien, en primaire comme en secondaire. Remettons le système éducatif sur les rails au plus vite !

Après concertation avec plusieurs pédagogues, enseignants et parents, je viens par la présente en tant que patriote, vous faire part de notre désarroi concernant l’éducation et nous sollicitons votre sagesse pour que vous intercédiez afin qu’on puisse remettre l’éducation sur les rails au plus vite.
Tout d’abord, permettez-moi de vous dire qu’en ces temps difficiles nous n’avons pas droit à l’erreur et que plus que jamais un leadership fort est requis. Plusieurs vaines propositions d’aide ont été faites par moi-même et tant d’autres personnes connaissant bien le secteur et ayant à cœur l’éducation. Aujourd’hui, nos appréhensions sont multiples mais dans cette lettre j’évoquerai principalement deux choses :
1. Le calendrier scolaire à revoir urgemment ;
2. Les cours en ligne pour les cycles primaire et secondaire inaccessibles, créant des disparités et stressant plusieurs parents et étudiants ; à stopper à tout prix.

Calendrier scolaire

Il faudra revoir le calendrier urgemment pour plusieurs raisons.

Primo : deux trimestres stériles

Il sera difficile, voire impossible de compléter le programme et de maintenir la fin de l’année scolaire à avril 2022. Faisons un petit calcul pour mesurer le progrès dans le programme du premier et deuxième trimestre, pour les élèves qui prendraient part aux examens du SC et du HSC en avril 2022, et pour qui aucun allègement du programme n’est envisageable. La durée d’un trimestre est de douze/treize semaines. Disons vingt-cinq semaines pour les deux trimestres.
25 semaines de travail = 125 jours.
Or, avec le calendrier échelonné, le temps de contact en présentiel a été comme suit :

Trois jours par semaine (6 juillet au 15 octobre)
Premier trimestre : 8 semaines = 24 jours
Deuxième trimestre : 5 semaines = 15 jours
Quatre jours par semaine (18 au 29 octobre)
Deuxième trimestre : 2 semaines = 8 jours

Cela représente 47 jours de travail au lieu de 125, soit 37.6% environ, mathématiquement parlant. Toutefois, la réalité est toute autre chose. Il y a eu de grosses disparités. En plus du calendrier échelonné rendant les deux trimestres non productifs, s’ajoutent les perturbations dues aux fermetures et réouvertures de certaines écoles, des étudiants qui étaient en quarantaine, ainsi que le stress psychologique engendré. Considérant tous ces paramètres, le programme achevé, dans certains cas, est de moins de 20% de ce qui était préconisé. Cela varie certainement d’école en école et les collèges d’élite sont moins affectés.

Secundo : les examens d’avril/mai/juin inadaptés pour Maurice

La ministre de l’Éducation avait été mise en garde depuis juin de l’année dernière des risques de perturbations climatiques pendant le troisième trimestre et la période des examens avec ce calendrier. Ceci s’est malheureusement révélé juste et ce sont les étudiants qui en ont payé le prix.
D’autre part, la ‘Special Consideration’ de Cambridge a été préjudiciable à nos candidats. Les irrégularités concernant l’algorithme qu’aurait utilisé Cambridge auraient suscité des appréhensions dans la ‘House of Lords’ l’année dernière. Je vous prie de prendre connaissance d’un article que j’ai écrit, paru dans la page Forum du Mauricien du 28 août 2021. Il ne faudrait pas que ce problème soit récurrent.

Tertio : les cours en ligne inaccessibles pour beaucoup et donc une pédagogie inadaptée pour les cycles primaire et secondaire

Les cours en ligne laissent aujourd’hui les élèves moins fortunés sur la touche. Nous avons toujours un nombre considérable d’enfants issus de familles défavorisées ; des familles qui luttent quotidiennement pour leur survie et pour qui l’accès quotidien à l’internet ou encore posséder un ordinateur est toujours un luxe. Aussi, dans des foyers avec plusieurs enfants, le partage d’ordinateur et du poste de télévision pour suivre les cours est un réel casse-tête. Nous risquons d’enfoncer ces enfants encore plus dans ce cercle vicieux de la pauvreté et d’abandon, où ils sont toujours surpassés par les riches.
D’autant plus que rien n’a été fait pour les élèves du ‘Extended Programme’. Quel signal envoie-t-on aux petits avec des difficultés scolaires et qui sont dans les conditions sociales précaires ?
Plusieurs propositions ont été émises afin que les cours en ligne soient standardisés et soient rendus accessibles à un plus grand nombre d’étudiants. Mais il semblerait que toutes ces propositions ont été mises de côté et pendant plus d’une année, peu de concret a été fait pour rendre des cours en ligne accessibles.
Dans une lettre adressée à la ministre de l’Éducation le 8 juillet 2021, j’avais fait quelques propositions tout en me tenant à la disposition du ministère pour aider à la réalisation du projet. Brièvement, les propositions étaient :
1. Enregistrer des cours standardisés avec une pédagogie adaptée pour l’apprentissage en ligne pour toutes les matières. Il faut saluer l’effort qui a été fait dans cette direction. Il reste toujours du chemin à faire ;
2. Ces cours devraient être diffusés sur les chaînes de la télévision nationale, mais devraient aussi être téléchargés sur un serveur pour qu’ils soient accessibles à tout moment même en mode offline ;
3. Les enseignants auraient pu complémenter ces cours en ligne selon les besoins spécifiques de chaque étudiant ;
4. Des facilités, comme emprunts à faible taux d’intérêt, auraient dû être rapidement données aux parents pour l’acquisition d’ordinateurs/tablettes. Un package aurait dû être offert, à un prix raisonnable, pour qu’un grand nombre d’élèves ait accès à l’internet. Ceci devrait être gratuit pour les enfants issus de familles à faibles revenus. La procédure actuelle de passer par la sécurité sociale est longue et compliquée, d’où le décrochage de certains.

Quarto : les cours en ligne font énormément de dégâts

Il ne faut pas se leurrer en croyant que le laxisme concernant la prise de décision n’a aucune incidence sur l’éducation. Mal comprendre la pédagogie et l’apprentissage pourrait éreinter l’enfant, le rendant moins performant. La Quantité n’est pas synonyme de Qualité. Il faut être efficace.
En 2020, les enfants ont été contraints à suivre des cours en ligne pendant plus de trois mois, pour ensuite recommencer les cours en présentiel, sans vacances adéquates pour qu’ils récupèrent. Les résultats du deuxième trimestre 2020 ont été catastrophiques puisque la fatigue s’était installée chez l’enfant.
La ministre avait elle-même avoué que les cours en ligne avaient créé des disparités dans l’apprentissage, car tout le monde n’avait pas les mêmes facilités pour suivre ceux-ci ; d’où la nécessité de tout reprendre en présentiel en 2020. Tout porte à croire que le scénario se répétera. En janvier, on demandera de recommencer l’année scolaire. Alors, pourquoi stresser les enfants et les parents actuellement ? We cannot be wise each time after the event!
L’attaché de presse de la ministre avait quant à lui reconnu en substance, l’année dernière, sur les ondes d’une radio que les enfants ne sont pas des vaches à lait qu’on pourrait traire indéfiniment ; ils ont besoin du temps pour récupérer.
Donc maintenir un trimestre non productif jusqu’au 17 décembre équivaut à du surmenage, ne donnant pas assez de temps à l’enfant de récupérer, et ceci pourrait nuire à la santé mentale des étudiants augmentant ainsi les risques de dépression. Je vous invite à lire les publications de Nicole Delvolvé de l’Université de Toulouse et d’Henri Boiraud de l’Université de Bordeaux à ce sujet.
Il ne faut pas non plus exclure le stress actuellement sur les parents qui pensent que la fin de l’année scolaire serait en avril 2021. Il faut à tout prix stopper cela immédiatement. Il faut à tout prix que tout le monde arrive à se poser !
Monsieur le Premier Ministre, en conclusion je vous demanderai d’agir promptement afin d’arrêter l’hémorragie et d’éviter que le système éducatif soit saigné à blanc. On n’arrivera pas à la fin de cette pandémie de sitôt. Il faut qu’on soit prêt à affronter les défis de la nouvelle ère et il est impératif de mettre en place un système d’online learning efficace. Il est clair aujourd’hui que le ministère de l’Éducation a plus que jamais besoin d’aide. Mais il suffit de faire appel et un grand nombre de patriotes, indépendamment de leurs convictions politiques, se tiendront prêts à aider.
Ainsi je me tiens également prêt à servir mon pays, et d’ici un appel, je vous prie Monsieur le Premier ministre d’accepter mes salutations les plus sincères.

Bien à vous,

NISHAL JOYRAM

Ce mardi 16 novembre 2021

- Publicité -
EN CONTINU

l'édition du jour