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Arbres endémiques : Maurice est un très mauvais élève

Le nouveau rapport State of the world’s trees rédigé par Botanic Gardens Conservation International place Maurice deuxième au classement du taux le plus fort d’espèces d’arbres menacés avec un pourcentage de 57 % juste derrière Madagascar avec ses 59 %. Si ce rapport interpelle par ses chiffres, le constat réel est encore pire. En effet moins de 50 % des espèces d’arbres endémiques et indigènes mauriciens ont pu être évalués dans ce rapport contrairement au 93 % de Madagascar.

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Maurice s’est souvent targué d’être un exemple à suivre en matière de conservation de ses espèces endémiques et indigènes. Les success stories en matière de sauvegarde d’espèces endémiques sous grande menace d’extinction à l’instar de la crécerelle de Maurice, du cardinal de Maurice, de la grosse cateau verte entre autres, ont largement contribué à cette très bonne réputation en la matière au niveau international. Mais la situation, comme le démontre le rapport State of the world’s trees, est très préoccupante. Il fait état que Maurice est le deuxième pays au monde derrière Madagascar avec le plus fort tôt d’arbres menacés. On parle ici d’arbres de pas moins de 2 mètres des hauteur, ce qui exclut ainsi les fougères, les orchidées, les granulés et herbes entre autres.

Maurice, potentiellement premier sur la liste.

Ce constat, déjà affligeant, n’est pourtant pas le reflet de la réalité actuelle de notre biodiversité qui est sans le moindre doute encore pire. Quand on fouille un peu plus, on apprend que moins de 40 % de nos arbres endémiques ont été évalués pour ce rapport – soit 65 sur 173 – contrairement au 95 % de Madagascar. Puisque 100 % des arbres endémiques évalués sont sous la menace de l’extinction, le calcul est vite fait. Si nous avions pu compter autant de pourcentage d’arbres endémiques que Madagascar, il est clair que nous serions en tête de cette liste loin devant Madagascar. Le manque de moyens mis à la disposition des assesseurs et le manque de vision des autorités peuvent expliquer l’évaluation réduite de ces espèces.

Si le dernier rapport State of the world’s trees est un ‘eye opener’, il n’est pas pour autant une surprise. En effet, il ne fait que souligner la réalité de l’état catastrophique de notre biodiversité que beaucoup d’écologues et de botanistes ne cessent de clamer depuis de nombreuses années et que Scope a souvent relayé. “Ça démontre que, malgré tout ce que nous faisons, notre flore et notre faune sont sérieusement menacées et la situation s’empire”, dit Vikash Tatayah, directeur de la Mauritian Wildlife Foundation. “On est plus intéressé à Maurice à prétendre que les choses vont bien alors que les choses vont mal. Il y a un déni de la vérité que nous constatons souvent dans des ateliers de travail”, s’insurge lui Vincent Florens, écologue.

Perte de 100 hectares de forêts par an.

Plusieurs papiers scientifiques en donnaient déjà une bonne idée de la situation comme le Long term forest trees decline rédigé par Vincent Florens en 2017 qui stipule que 1 arbre indigène sur 2 (avec un tronc de diamètre de 10 cm ou supérieur) a disparu dans les zones protégées en 68 ans depuis les années 30 jusqu’au années 2000. Le pire est que cette collection de données ne concerne que les forêts les mieux préservées du Parc National qui ne sont qu’un tiers des forêts de Maurice. On imagine facilement que la dégradation est encore plus rapide dans ces autres forêts. De même, Maurice est d’ailleurs dans le top 3 des pays avec le plus fort taux d’extinction chez les plantes selon un papier scientifique réalisé par Am Humphreys publié en 2019 et qui s’intitulait Nature ecology and Evolution. Sans compter que les forêts indigènes ont connu une diminution de plus de 20 fois dans un très court terme.

Cette détérioration progressive et rapide est le résultat directe d’une politique axée sur le développement bien trop souvent au détriment de l’environnement. La destruction d’ébéniers noirs à Chamarel pour l’élargissement d’une route tout récemment en est un exemple bien flagrant. Ce type de projet, responsable en grande partie de la perte de quelque 1000 hectares de forêts par an, a grandement contribué au déclin des espèces de plantes et qui fait que quelques-unes sont aujourd’hui chiffrées à seulement quelques individus. À titre d’exemple la Badula ovalifolia n’a que deux individus connus dans la nature, ou encore l’Hyophorbe amaricaulis qui est tout simplement la plante la plus rare au monde dont le seul spécimen se trouve au Jardin botanique de Curepipe.

Les espèces envahissantes en partie responsables.

Il faut aussi savoir que la situation est exacerbée par l’invasion dans les forêts mauriciennes des espèces exotiques qui mérite une attention particulière. On parle là aussi bien d’espèces d’arbres que d’animaux. Les plantes exotiques comme le goyavier de Chine, le ravenal, le privet ou le tecoma sont en compétition directe avec les espèces endémiques et sont responsables de leur diminution alors que les animaux exotiques tels que les singes, sangliers et les rats détruisent les plantes, leurs racines ou leurs fruits les empêchant ainsi de se propager.

La solution est d’améliorer les choses à plusieurs niveaux. Avant tout, il faut que les autorités concernées mettent plus de moyens et de volonté dans la protection de nos espèces endémiques et indigènes. Ce qui se traduira en l’amélioration et la multiplication des mesures de conservation. “Maurice investit très peu dans les assessments mais aussi dans la mise en place des projets pour protéger l’environnement. Il faut mobiliser plus de fonds pour que l’on puisse avoir de meilleurs résultats”, souligne Vincent Florens. “Il faut plus de propagation des plantes endémiques, diversifier leurs localisation, trouver de nouvelles méthodes en se faisant aider par les institutions internationales mais aussi un meilleur contrôle des espèces envahissantes”, fait ressortir, pour sa part, Vikash Tatayah. Mais tout ceci passe par une meilleure collaboration entre les acteurs concernés. “Il faut que nous mettions la tête ensemble pour protéger nos espèces. Il ne faut plus que la protection de certaines espèce soit la chasse gardée de certains”, souligne Vincent Florens.

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