Le Japon a fermement démenti la semaine dernière des informations selon lesquelles il envisagerait l’annulation des Jeux olympiques de Tokyo-2020, déjà reportés l’an dernier à cause de la pandémie. Mais à six mois de l’ouverture prévue, de gros doutes persistent.
Alors que le pays, partiellement sous état d’urgence, fait face à une violente troisième vague d’infections au Covid-19, voici les principales questions qui se posent au sujet d’une éventuelle annulation.
Qu’en disent les responsables?
Le Premier ministre japonais Yoshihide Suga a répété vendredi qu’il était « déterminé » à organiser les Jeux cet été, tandis qu’un porte-parole du gouvernement a assuré qu’il n’y avait « rien de vrai » dans les informations du journal britannique The Times, selon lesquelles le Japon aurait déjà secrètement renoncé à l’événement.
Le président du Comité international olympique (CIO), Thomas Bach, avait lui-même affirmé la veille n’avoir « aucune raison de croire que les Jeux olympiques à Tokyo ne s’ouvriront pas le 23 juillet », admettant cependant qu’un nombre limité de spectateurs, voire un huis clos, restaient des options possibles.
La décision sur la présence éventuelle du public, y compris de l’étranger, doit être prise au printemps.
Qu’en pensent les athlètes?
La pression des athlètes a été vue comme l’élément déclencheur du report en mars 2020, peu avant la décision historique du CIO de décaler les Jeux d’un an.
Cette fois, plusieurs comités olympiques nationaux ont annoncé qu’ils se préparaient à envoyer leurs athlètes au Japon comme prévu, et la championne olympique grecque de saut à la perche Katerina Stefanidi – à la pointe du mouvement des athlètes pour le report l’an dernier – est favorable au maintien des JO cet été, à huis clos s’il le fallait.
La gymnaste américaine Simone Biles espère aussi que les Jeux puissent avoir lieu, « même si cela signifie être dans une bulle ». Le gymnaste japonais Kohei Uchimura a cependant estimé que cela n’aurait de sens que si l’opinion publique nippone, actuellement opposée au maintien des JO cet été, était au diapason.
Combien coûterait l’annulation?
Les organisateurs ont réévalué en décembre le budget des JO à 1.644 milliards de yens (13 milliards d’euros), soit 2,3 milliards d’euros de plus que l’estimation précédente, à cause des coûts du report et des mesures sanitaires.
L’addition totale devrait être encore plus salée, faisant sans doute de Tokyo-2020 les Jeux olympiques d’été les plus chers de l’histoire.
Cependant leur annulation n’affecterait pas vraiment la troisième économie mondiale. Car les infrastructures nécessaires ont déjà été construites et « le coût d’organiser les Jeux est probablement inférieur à 0,1% du PIB » japonais, explique à l’AFP Tom Learmouth du cabinet d’études Capital Economics.
Certains secteurs comme le tourisme et l’hôtellerie-restauration souffriraient d’un manque à gagner en cas d’annulation, même si l’effet dopant des Jeux sur la consommation n’est pas évident, encore plus en période de pandémie.
Quelle est la marge de manoeuvre du gouvernement?
Yoshihide Suga, Premier ministre depuis septembre dernier, a vu sa popularité s’effondrer à cause de son action jugée trop lente et confuse face à la pandémie.
Alors qu’une large majorité de Japonais sont opposés à la tenue des Jeux cette année, une annulation serait un moindre mal sur le plan politique, estime Tobias Harris, analyste chez Teneo Intelligence.
« Le risque politique d’organiser les Jeux et de provoquer ainsi une aggravation de la pandémie me semble plus lourd que celui d’admettre que leur tenue serait trop dangereuse et de travailler avec le CIO sur une solution plus adaptée », juge M. Harris.
Quelles conséquences pour le sport?
Le CIO dispose de considérables réserves financières qui lui ont permis de faire face au report l’an dernier de Tokyo-2020, mais les experts estiment qu’une annulation aurait des conséquences désastreuses.
Beaucoup de fédérations sportives nationales et internationales se retrouveraient en danger financièrement, car certaines dépendent étroitement de l’argent que leur verse le CIO.
Certains athlètes verraient leurs espoirs de participer à des JO anéantis à jamais, et une annulation pourrait aussi affaiblir l’image du mouvement olympique, alors que le nombre de villes candidates était déjà sur le déclin avant même la pandémie.