Avec la réouverture des plages et du lagon dans le sud-est, les activités ont repris. Sauf que les pêcheurs doivent se rendre hors du lagon pour pouvoir opérer, et que la réalité est toute autre. Déjà, pendant la fermeture même du lagon, certains trouvaient les moyens pour braver l’interdiction.
Mais aujourd’hui, la situation s’est aggravée, disent les résidents de ces régions côtières. Les gardes-pêche, qui sont supposés combattre la pêche illégale, se retrouvent, eux, impuissants devant la situation, faute de moyens…
D’emblée, il convient de souligner qu’il ne faut pas mettre tous les pêcheurs dans le même panier. Mais si la majorité essaie de gagner leur vie honnêtement, il y a bien un petit groupe de « fraudeurs », connus de tous, qui fait fi des interdictions. Depuis que les activités ont repris dans le sud-est, suivant la catastrophe du Wakashio, c’est le « festival dans la mer », disent les habitants de ces régions. Car même si le nettoyage du lagon après la marée noire est terminé, la pêche, elle, est toujours interdite dans le lagon. Il a donc été demandé aux pêcheurs de pratiquer leurs activités en dehors du lagon.
Des habitants du sud-est disent leur désarroi devant la situation. « Beaucoup sont en train de pêcher dans le lagon. D’ailleurs, c’était également le cas même pendant l’interdiction. Ils s’y prennent le soir, pour ne pas être vus. Allez voir ce qui se passe du côté de Pointe-du-Diable vers 21h. Parfois, certains prennent le dernier bus pour attendre ensuite sur les lieux. Ils pratiquent la pêche sous-marine jusqu’aux petites heures du matin », raconte ainsi un habitant de la région.
Ce dernier dit avoir déjà alerté les gardes-pêche, mais que ces derniers sont « impuissants » face à la situation. « Les gardes-pêche sont devenus la risée des pêcheurs. Ils n’ont même pas de bateau pour sortir en mer. Allez au poste de Mahébourg voir combien de moteurs sont à terre ! Ils sont hors-service. Les bateaux sont dans un état déplorable. Croyez-vous qu’ils peuvent arrêter les fraudeurs dans de telles conditions ? Certains pêcheurs ont des bateaux beaucoup puis puissants qu’eux. »
Il nous revient ainsi que le service ne compte que cinq bateaux pour les 16 postes de “fisheries” dans le pays. Pire : certains postes n’ont même pas de véhicule pour les patrouilles. « Un jour, je suis parti dans un “fisheries post” pour dénoncer des opérations douteuses en mer, et j’ai été stupéfait de voir qu’il n’y avait que deux officiers sur place. Ils m’ont expliqué qu’il n’y avait que deux officiers par “shift”, par manque de personnel. De plus, ils n’avaient même pas un véhicule pour aller voir ce que je voulais dénoncer. Où allons-nous ? » se demande notre interlocuteur.
Ce dernier qui se dit amoureux de la mer, attire ainsi l’attention des autorités sur la situation. « Si la pêche est toujours interdite dans le lagon, c’est qu’il y a une raison. Comment va-t-on contrôler ces poissons sur le marché ? Si on veut protéger les consommateurs, il faut également des services efficaces et avec les moyens pour agir. » Il nous revient que le Fisheries Protection Service compte également cinq “flying squads”, qui n’opèrent que de 8h à 16h, et que quatre véhicules. « Si on n’a pas les moyens pour combattre la pêche illégale, comment fera-t-on pour combattre le trafic de drogue ? Et dire que le Premier ministre s’est étonné que la drogue soit entrée au pays pendant le confinement ! » Notre interlocuteur lance ainsi un appel aux autorités pour que celles-ci réagissent.