La nouvelle est tombée mercredi. La joueuse de badminton, Kate Foo Kune, a été officiellement suspendue par la Badminton World Federation (BWF) de toute compétition pour une durée de deux ans suivant le verdict du Tribunal Arbitral du Sport (TAS) siégeant à Lausanne en Suisse. Ce tribunal confirme la première décision de la BWF à l’effet que Kate Foo Kune « was found to have breached the BWF Anti-Doping Regulations… » lors des Championnats d’Afrique seniors d’avril 2019 au Nigéria !
Conséquence: la Mauricienne n’est plus éligible à une éventuelle participation aux Jeux olympiques de Tokyo, au Japon, reportés pour 2021 en raison de la pandémie de COVID-19.
En somme, le verdict du TAS n’est pas forcément une surprise en soi. Car très peu sont-ils les sportifs de haut niveau à s’en être sortis après un contrôle positif. Parmi les insolites, on retrouve le tennisman français Richard Gasquet (2009), aussi bien que le médaillé olympique du 4x400m américain, le sprinteur Gil Roberts (Rio 2016), testés positifs à la cocaïne avec pour défense, un baiser à une femme ayant consommé cette drogue ! Leurs fédérations internationales s’étant, à l’époque,
montrées indulgentes. Le cycliste espagnol, Alberto Contador, vainqueur du Tour de France en 2007, a également été blanchi. L’histoire de son steak contaminé ayant convaincu la fédération internationale !
Sauf que cela ne marche pas à tous les coups. Et Kate Foo Kune savait pertinemment que, tôt ou tard, la guillotine allait finir par tomber, notamment après les résultats d’analyses. Ses explications n’ont donc pas suffi. Le TAS a estimé que, faute de preuve, Kate Foo Kune ne sera pas blanchie et aura à purger une peine de deux ans, la privant ainsi des Jeux olympiques de Tokyo.
Ce qu’il faut désormais bien mettre en lumière dans cette affaire, que nous qualifions d’ailleurs déjà de complexe, depuis son éclatement, fin juin 2019, c’est d’abord cette décision de la BWF de faire appel, en novembre de l’année dernière, contre une décision de son propre Doping Hearing Panel ! Sans doute une première dans les annales du sport et qui nous force à nous demander pourquoi. Même si diplomatiquement, la BWF avait pris le soin de préciser : « the BWF recognises the Doping Hearing Panel’s thorough and careful work…» tout en soutenant sa démarche de contester devant le TAS : « as it touches upon the interpretation of fundamental principles of the World Anti-Doping Code and Anti-Doping Regulations. »
Pourquoi donc, la BWF a-t-elle décidé d’aller à contre-sens de son Doping Hearing Panel ? N’était-elle pas totalement convaincue de la décision de ce panel ? Cette même instance qui avait pourtant déterminé, « that Ms. Kate Jessika Foo Kune committed an anti-doping rule violation resulting in the disqualification of the results of the tournament », mais qui avait toutefois trouvé que « the player bore no fault or negligence and decided not to impose any period of ineligibility » !
Visiblement donc, la BWF avait des raisons d’aller jusqu’au bout et ainsi, en avoir le coeur net. Et il semble qu’elle n’a pas eu tort de le faire. Car en décidant de référer l’affaire au TAS, la BWF a voulu indirectement questionner une décision de son Doping Hearing Panel. Et avec la décision de la TAS, c’est désormais les travaux de ce panel qui sont remis en question.
Ainsi, des explications sont nécessaires, afin de tirer toute cette affaire au clair. Il s’agira ainsi de déterminer comment ce panel est parvenu à la conclusion que la Mauricienne ne devait pas être sanctionnée. Face à la gravité de la situation d’ailleurs, la BWF gagnerait même à initier une enquête en interne après ce désaveu. Il faudrait ainsi savoir s’il y a eu une éventuelle faute et même déterminer s’il n’y aurait pas eu d’influence à un certain niveau.
L’exemple de la BWF est donc symbolique et mérite que l’on s’y attarde. Car, la démarche de cette fédération de s’assurer que « no stone is left unturned » doit faire école. À commencer par l’Association mauricienne de Badminton (AMB) qui, il faut le préciser, n’a pas toujours joué carte sur table. Elle est même loin d’avoir été irréprochable à l’heure où cette affaire a éclaté fin juin 2019. D’abord par sa décision de ne pas révéler l’information d’un contrôle antidopage positif de Kate Foo Kune et qui était pourtant d’un intérêt national. Ensuite, le fameux résultat de l’échantillon B qui, si notre mémoire ne nous fait pas défaut, n’a jamais été officiellement dévoilé !
Désormais, il faudra assumer les conséquences. Pour Kate Foo Kune comme pour l’AMB. Même si la première nommée n’a cessé de clamer son innocence. Sauf que cette affaire a jeté le discredit sur le sport local et sur le badminton en particulier, deux ans après la radiation à vie de l’ancien président de l’AMB, Raj Gaya, de toutes les instances de la BWF, pour une affaire d’utilisation abusive de fonds.