Les élections villageoises du jour se déroulant dans les 130 Village Council Areas de Maurice se distingueront par deux facteurs. D’abord, ce sera la première fois que le dépouillement des bulletins de vote d’un scrutin de cette envergure se déroulera le même jour. Ensuite, un engouement visible pour ces consultations populaires qui, d’habitude, étaient marquées par une certaine indifférence. Une des raisons derrière cette animation notable dans les villages est que le mandat de conseiller de village est rétribué. Jusqu’à la mi-journée, le taux de participation à ces élections sera suivi avec attention vu que les heures des bureaux de vote sont de 7h à 16h non-stop et que les électeurs qui doivent travailler aujourd’hui bénéficieront de trois heures de leurs employeurs respectifs pour aller exercer leur droit civique.
En tout cas, à hier après-midi, la clôture de la campagne électorale dans les principales agglomérations, que ce soit dans le Nord ou dans le Sud, à l’Ouest ou à l’Est, a été marquée par des défilés de véhicules en guise de démonstration de force de la part de certains groupes contestant les sièges à pourvoir. Cette campagne a été également marquée par la présence sur le terrain de certaines grosses cylindrées politiques sur le plan national, à l’image d’Alan Ganoo, qui s’est dépensé sans compter dans la région de Rivière-Noire, croyant pouvoir régler des comptes à d’anciens camarades de parti devenus ses adversaires, pour ne pas dire ses ennemis, suite à son alignement politique avec les élections générales du 7 novembre 2019. Il aura tout promis pour faire élire ses poulains.
Toutefois, au-delà de ces rivalités politiques, le mood de Fair Play semble être respecté, les électeurs sachant très bien qu’une fois les clameurs de ces élections villageoises se seront tues, ils devront cohabiter avec leurs voisins. À ce stade, les spéculations vont bon train quant aux dépenses encourues par certains des candidats pendant la campagne électorale. Le plafond maximal des dépenses autorisées est de Rs 50 000 par candidat avec le délai pour la soumission des Returns of Expenses arrivant à terme le 4 janvier prochain. Mais comme dans toute élection, cette disposition de la loi est rarement respectée.
Ainsi, pour le scrutin du jour, 5 347 candidats sont en lice pour conquérir les 1 170 sièges dans les 130 villages. Pour les besoins du scrutin du jour, la Commission Électorale a fait imprimer 582,150 bulletins de vote pour permettre aux électeurs répartis dans les 1,349 Voting Rooms des 190 Polling Stations d’accomplir leur devoir civique du jour. Goodlands reste le village avec le plus grand nombre de candidats, soit un bulletin comprenant 89 noms et Triolet avec le nombre le plus important d’électeurs, soit presque 20,100, se rapprochant de la plus petite circonscription pour les législatives jusqu’à l’adoption des recommandations de l’Electoral Boundaries Commission.
En ce qui concerne le déroulement du décompte de vote juste après la fermeture des bureaux de vote à 16h, les 130 Returning Officers et leurs plus proches collaborateurs ont animé, hier, des Briefings avec les 9,300 fonctionnaires déployés. Le commissaire électoral, Irfan Rahman, souligne que dépendant du taux de participation, les premiers élus seront proclamés dès le début de la soirée et que « c’est le Returning Officer qui décidera s’il faut interrompre ou non le dépouillement dans la nuit pour reprendre l’exercice demain matin. »
Élections villageoises – Une veillée d’armes marqués par des défilés
Si la campagne a été très courte et plutôt calme dans l’ensemble, le dernier round hier dans les villages a été intense. Cette veille des élections a été marquée par des défilés traditionnels des différents partis un peu partout autour de l’île, dans une ambiance bon enfant, les candidats profitant de la fin d’après-midi pour convaincre les électeurs de voter pour eux. Que ce soit au Nord, à l’Est, au Sud ou à l’Ouest, la journée d’hier a été un rappel pour que les villageois aillent exercer aujourd’hui leur devoir civique. Si certains hésitaient encore quant à pour qui ils voteront, le dernier forcing des candidats hier aura servi à éclairer sur le meilleur choix pour le village.
Des défilés un peu partout à Pamplemousses
Toute dernière mobilisation, démonstration de force. C’était le cas, hier, à la veille des élections villageoises à Pamplemousses où les différents partis en liste ont jeté toutes leurs forces dans la bataille avec l’espoir de convaincre les électeurs. Des défilés de voitures, arborant des drapeaux flanqués des emblèmes des groupes en lice à ce scrutin, ont été organisés à Triolet, Calebasses, Terre-Rouge et Baie du Tombeau. Certains véhicules avec des drapeaux rouges d’où l’on pouvait voir « la clé » du PTr ont même été aperçus à Terre-Rouge. Plusieurs badauds étaient massés aux abords des routes pour exprimer leur solidarité aux candidats. À Triolet, partisans et candidats de Reform Nou Villaz étaient nombreux à arpenter les rues du village en scandant des slogans hostiles à l’égard du gouvernement. Sonnie Gohkool, une candidate de ce groupe apparenté au Reform Party de Roshi Badhain, déplore que « encore une fois, des élections à Maurice seront gangrénées par des tractations communales malsaines même si nous demeurons confiants dans une victoire de nos poulains. »
Ambiance bon enfant dans l’Ouest
Ambiance bon enfant, hier, à Albion dans l’Ouest du pays. À part un mini défilé de voitures dans les principales artères de ce village côtier, rien ne présageait les tant attendues villageoises le lendemain (ndlr : aujourd’hui). Vendredi, par contre, les rues albionnaises étaient bien animées avec le défilé des différents partis.
14h30. Le village d’Albion se réveille. Quelques villageois font leurs emplettes dans la boutique du coin, pendant que les scouts chantent dans la cour de l’église. Ici et là, nous apercevons des banderoles jaunes, blanches… mais les habitants vaquent à leurs occupations. C’est ce que nous confie Eloddy Denis, dont l’époux Mikey Denis, ancien boxeur et médaillé des Jeux des îles 2019, est candidat pour le groupe Travayer Social. « Moi, je me sens particulièrement concernée par ces élections-là, d’une part parce que mon époux est candidat et, d’autre part, car il est important de bien réfléchir avant de donner son vote », nous dit-elle. Elle nous explique qu’à Albion, les gens commencent à comprendre le besoin de voter pour le progrès de leur village. « Aujourd’hui, c’est tranquille. Hier, par contre, les candidats ont défilé. Il y avait de l’ambiance », dit-elle. Au même moment, quelques voitures aux étendards blancs débarquent en fanfare. Une dernière tournée avant le Jour-J.
Pour le village d’Albion, des candidats plus ou moins connus de l’arène politique participeront aux Villageoises: Rishon Bhadain, Nicole Hack et Alain Aliphon, entre autres.
Dans le sud à Surinam, on attend ce dimanche
A Surinam à quelques encablures de Souillac, à la mi-journée, hier, il fallait lever l’œil vers les affiches pour réaliser que les élections c’est aujourd’hui. Mais en fin d’après-midi, après la journée hippique, l’ambiance était un peu différente avec une présence plus marquée des habitants sur la route, bien embêtée que les boutiques ne vendent pas d’alcool.
Rajen que nous interrogeons affirme que le groupe qu’il soutient et affilié aux oranges nationales va l’emporter haut la main mais en vérité, il craint un peu l’abstention qui pourrait jouer un mauvais tour à son équipe et favoriser les groupes adverses, plus proche des rouges. Des jeunes qui parlent bruyamment disent ne pas trop tenir compte de cette agitation inhabituelle et ne sont même pas sûrs d’aller voter tant rien ne semble représenter leurs aspirations.
De l’autre côté du village sur la route menant à Riambel, l’intérêt pour ces élections est plus grande car les habitants de cette localité souffrent depuis l’arrivée du Covid-19 et l’arrêt du flot touristique, ils n’ont rien vu venir et constatent que leur vie est devenue plus amer. Pour qui voteront-ils ? Pour ceux qui peuvent faire changer les choses au niveau national car ce que les villageois ont besoin en ce moment, ce ne sont pas des promesses vides, pas d’infrastructures mais plus de quoi vivre et survivre pour certains. « Nous sommes les oubliés des aides que l’on aux gros et pas assez aux petits » clament Madeleine qui promet de faire entendre sa voie. Là il n’y a ni défilé , ni ferveur, juste de quoi attendre aujourd’hui pour signifier sa colère. Le vote contre.
«Nous irons voter pour ceux qu’on connaît… », disent les villageois de Petit Verger
Hier après-midi, dans le village de Petit-Verger, à Saint-Pierre, comme chaque samedi après-midi, les villageois vaquaient à leurs occupations. Entre les petites courses à la boutique du coin et les sorties en famille, tous avaient pratiquement la même conversation. «To pou ale voter demain ?» D’autant que les traditionnels défilés des différents groupes dans les artères du village poussant même plus loin, jusqu’à Saint-Pierre, attisaient la curiosité.
D’ordinaire très calme, Petit-Verger se retrouve comme les autres villages de Moka sous les feux des projecteurs avec la tenue des élections ce dimanche. Et cette ambiance plaît aux villageois qui discutent entre eux du «meilleur parti» pour siéger au Village Council. Comme Collette qui s’est rendue ce samedi après-midi chez sa voisine pour savoir à quelle heure elle ira voter. Certes, le choix n’est pas encore fait, dit-elle, mais «je voterai pour les individus». La raison : «Bizin dimoun ki nou conner ki pou travail vraiment pou villaz.»
Plus loin, Boodooar s’affaire à placer ses bananes qu’il a mises en vente devant sa porte. Aux passants qui traversent devant chez lui, il rappelle qu’il faut aller voter ce dimanche. Comme Colette, il est fier de ce droit civique qui confère aux villageois de décider de qui placer au Village Council. «C’est enn droit civique. Nou bizin elle vote »,dit-il. Et pour qui votera-t-il ? « Dans sak Group mo pou votre enn enn enn. Parsi mo conne zot tou. Mais mo pou vote pou seki pou bouffer pou Petit Verger», dit-il. Argument que reprend aussi Soorain, une boutique plus loin. Si toute la semaine a été tranquille, dit-il, avec le mouvement des défilés, il y a eu comme un rappel pour que chacun aille effectuer son devoir civique. Et lui aussi il pense voter «enn enn partout. Parski c’est dimoun ki kapav ki bizin metter», estime-t-il.