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Communalisme, ce démon qui nous hante encore et toujours

Le démon ressort des braises qui ne s’étaient jamais éteintes. Le communalisme revient à la surface et hante de nouveau la société. Des messages insultants, menaçants, incendiaires rappellent, ces derniers temps que malgré la volonté générale de vivre en paix quelques têtes brûlées opèrent dans l’ombre pour semer la zizanie. Certains par petitesse d’esprit et manque d’éducation, d’autres pour dévier l’attention des vrais enjeux et pour faire le jeux des politiques.

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Alors que le mécontentement exprimé dans la rues et ailleurs a eu le soutien des Mauriciens indistinctement certains, pour dévier l’attention, ont tenté de donner une connotation sectaire à ces mouvements. Les proches du pouvoir s’éloignent ainsi du vrai débat en invoquant le communalisme à travers des messages incendiaires appelant au retranchement ethnique. Les insultes fusent de tous côtés sur les réseaux, dans l’affaire Dhiren Moher on note aussi des messages aussi menaçant qu’inquiétants. C’est dire l’état d’esprit de certains qui parviennent à semer le trouble au sein d’une société qui aspire au vivre ensemble, à la tolérance. Ainsi ces messages communaux ont été vivement condamnés par la majorité.
Motivations.
Analysant cette situation Jocelyn Chan Low est d’avis que : “Très souvent, il y a des personnes qui se servent du communautarisme comme un outil pour arriver leurs propres fins, souvent financiers. Elles ne sont pas forcément sectaires, elles le font pour avoir des privilèges. Elles ne défendent pas leurs communautés mais leurs intérêts personnelles. Mais la grosse majorité des gens ne se laisse pas influencée. Nous voulons tous d’une société où il y a la paix, où nos enfants peuvent aller à l’école sans craintes. Personne ne veut revivre la bagarre raciale.”
Toujours est-il que, cette petite poignée qui allume la mèche, demeure un danger pour la paix sociale. Comme le fait ressortir Jocelyn Chan Low, ces provocations font souvent réagir négativement. “À mon avis, c’est fait intentionnellement. Il peut y avoir une stratégie pour déstabiliser la montée de mécontentement du peuple.”
La peur de l’autre.
La tension est d’autant plus palpable lorsqu’il y a divergence d’opinions. En panne d’arguments, certains attaquent l’autre en critiquant sa communauté ou sa religion. Ces réflexes peuvent être un moyen de défense, dit la Dr Nirmala Savrimuthu-Carta, psychologue interculturelle. “A Maurice, nous sommes une société dite collectiviste et non individualiste. On se réfère à nos groupes d’appartenance. Les groupes les plus importants pour nous refont surface à travers leurs valeurs propres et leurs différences. C’est là où on aura tendance à adopter la préférence pour l’endo-groupe et parfois la discrimination pour l’exo-groupe. Dans les situations difficiles, nous aurons tendance à aller vers ce qui nous ressemble le plus, suivant nos appartenances. Cela peut être un groupe culturel, religieux ou autre.”
Selon cette dernière cette montée que l’on observe est probablement reliée à la peur. “Le communalisme s’exprime plus en ce moment car il est lié à nos propres peurs. La situation sociétale est fragile et les épreuves font que nous avons un degré d’incertitude plus élevé que d’habitude. Le degré d’incertitude élevé veut dire que nous devons prendre plus de risque. Ce fait nous amène à une peur globale, car nous sommes dans une société où la culture est dotée d’un degré d’incertitude faible. Ainsi, nous nous sentons en danger par rapport a nos propres conditions liées à la vie changeante et pour faire face à cela, nous mettons en place un système de défense qui s’exprime par les émotions négatives que nous projetons sur les autres puisque nous ne pouvons faire face à nos propres difficultés. C’est là où s’amplifient les perceptions négatives déjà existantes. L’un des axes le plus accessible est sur la différence mais la différence en soit n’est pas un problème. C’est surtout la représentation qu’on en fait. Plus on catégorise les personnes, plus grandes seront les représentations en fonction de ces catégories.”
La question est sans doute également identitaire. Comme beaucoup l’ont fait ressortir sur les réseaux sociaux, certains d’entre nous se présentent avant tout comme appartenant à une communauté avant d’être Mauricien. “Selon l’étude que j’ai faite auprès des adolescents en 2010, les critères qui déterminent le plus l’identité mauricienne sont la langue créole, résider à Maurice et les habitudes alimentaires. Selon cette même étude, les critères déterminant la structure de la société mauricienne sont : la religion (38,89%), la couleur de la peau (14,96%) et la classe sociale (14,53%). La nationalité mauricienne c’est ce que nous avons en commun, mais il est plus facile pour se démarquer des autres, donc pour se valoriser, d’accentuer plutôt les différences que les similitudes. Mais c’est difficile à accepter qu’on est tous pareils en réalité, chacun cherchant à être heureux”, dit Nirmala Savrimuthu-Carta.
Système politique.
Par ailleurs, le système politique en lui-même encourage les divisions et le communautarisme. Système que les politiciens semblent nourrir pour arriver au pouvoir. “Il serait intéressant de savoir combien de personnes issues de groupes socio-culturels ont eu des contrats. Les partis politiques les instrumentalisent.” De la même manière, le système exige une certaine représentation de toutes les communautés, une belle intention pour plaire à tout le monde mais qui créé des divisions. “Tout un chacun se sent sous-représenté à plusieurs niveaux. Chacun dit que sa communauté n’en a pas assez. Il y a ce sentiment que, ‘toi tu en as eu plus que moi’.”

MICRO-TROTTOIR

Ali Ellaheebocus

“Contre ce fléau”

“Le communalisme ne doit plus faire partie de notre société. J’ai des amis de différentes cultures avec des personnalités différentes mais cela ne nous empêche pas de nous côtoyer. Je suis tout à fait contre ce fléau. Nous, en tant que jeunes, avons le devoir d’éradiquer toute forme de communalisme car cela n’amène que de la discorde.”

Nathalie Chan

“Ça ne m’étonne guère”

“Ça ne m’étonne guerre cette montée de communautarisme. Il ne faut pas se voiler la face, ça a toujours été présent dans la société même si on veut nous faire croire que nous sommes dans un pays multiculturel sans tension entre les communautés.”

Bimen Govinden

“La pire chose qui puisse exister”

“Le communalisme est la pire chose qui puisse exister dans le pays. Maurice possède une des plus belles richesse qui est l’existence des différentes communautés en son sein, c’est notre patrimoine et notre fierté. Lorsque nous allons à l’étranger, les gens sont émerveillés par notre île et en tant que citoyens mauriciens, nous avons un devoir de préserver notre chez nous et non pas continuer à instaurer le communalisme car cela provoque de la haine, des conflits, de la jalousie et de la discorde.”

B. Lagesse

“Le communautarisme existera toujours”

“Le communautarisme a toujours existé et existera toujours. A l’époque, traiter quelqu’un de malbar, de lascar, de rat blanc ou de baba coltar était une sérieuse insulte. Aujourd’hui, certains de ces mots ont disparu, mais la forme est toujours là. Je prends l’exemple des élections ou bon nombre de citoyens ne votent pas pour une compétence ou pour de la méritocratie, mais simplement pour une appartenance ethnique. La montée en puissance du communautarisme se dissipera, je l’espère, avec une jeune génération visionnaire pour l’avenir de notre petite île.”

Maître Rodney Rama

“Certains pyromanes agissent en faveur du communalisme”

“Malheureusement il existe encore dans la société actuelle certains pyromanes qui agissent toujours en faveur du communalisme et c’est vraiment désolant pour la société de demain, c’est-à-dire pour les jeunes. En tant que citoyen mauricien, je constate que la nouvelle génération a fait preuve d’un mauricianisme exemplaire lors des manifestations du 29 août et du 12 septembre. À travers cet acte de bravoure et de solidarité, elle nous montre la voie dans l’espoir de bâtir une île Maurice meilleure et plus forte que jamais. Les jeunes sont des exemples vivants que le commnunalisme n’a pas sa place au sein d’une société moderne. En nous unissant, nous pouvons graduellement éliminer ce fléau car cela engendre la discorde.”

Virginie Caprice-Agathe

“C’est triste”

“C’est triste de voir cela puisque nous vivons dans un pays multiracia. C’est primordial que la population s’unisse, l’esprit de partage, l’entraide, le respect d’autrui et le vivre-ensemble sont des atouts essentiels pour qu’une société prospère.”

Vicky Ramesser

“Le communalisme ne fait que diviser”

“Le communalisme existe partout où l’on va, c’est la mentalité des gens qui amène à ce que cela continue d’exister au sein de la population mauricienne. Je vis dans une cité et je m’entends très bien avec tout le monde, on vit comme une famille.”

Mehdi Jean-Marie
“Le communalisme n’apporte que de la souffrance”
“Le communalisme n’apporte que de la souffrance. C’est chagrinant de constater qu’en 2020, ce fléau existe toujours et qu’il continue à diviser la population. Là où je vis, nous vivons tous en communauté et nous nous entendons parfaitement bien et le commnunalisme n’existe pas parmi nous. Ma religion ne m’interdit pas de côtoyer mon voisin, au contraire, j’apprends à connaître sa culture et des liens d’amitié se tissent au fil du temps. Le seul moyen de mettre un terme à ce fléau destructeur, c’est apprendre à vivre ensemble, de respecter son prochain quel que soit sa religion.”

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