Neuf semaines après l’écroulement de l’empire Rawat sous le poids d’un Ponzi Scheme de Rs 23 milliards, les premiers détails des versements bancaires à des tierces parties et le mécanisme de ces opérations de détournement et de blanchiment de fonds sont confirmés officiellement. Ainsi, les Special Administrators de BAI Co (Mtius) Ltd and Related Entities, Mushtaq Oosman et Yogesh Basgeet, se sont lancés dans une série de « reviews on a number of questionable transactions » engagées au préjudice des contributions des clients du groupe BAI en vue d’établir des irrégularités susceptibles de faire l’objet d’enquêtes, soit du Central CID soit de l’Independent Commission Against Corruption (ICAC). L’un de ces Special Assignments complété à ce jour comprend les deals entre Eshan Khodabux, patron du groupe de presse Défi-Plus et la BAI Co (Mtius) Ltd pour une somme de Rs 66,3 millions. Ces transactions ont été effectuées en juin et juillet 2012 et « the transferts originated from BAI Co (Mtius) Ltd, the insurance business », soit l’argent des victimes de l’arnaque Dawood Rawat.
Intervenant, vendredi soir, lors de l’émission sur la MBC1 intitulée BAI – La vérité !, le ministre des Services financiers, Roshi Bhadain, a mentionné des réclamations de Rs 71 M à la presse, sans mentionner de groupes nommément sur ce point précis. Par contre, il a ouvert un boulevard sur le plan du financement politique en faisant état d’un Office Cheque de Rs 10 M émis au nom du MMM en date du 6 novembre 2014 et le versement d’une somme de Rs 750 000 en faveur du député travailliste Mohamed Osman à partir du Policy Holders Common Fund. En début d’émission, le Premier ministre, sir Aneerood Jugnauth, a concédé des « contributions volontaires entre Rs 200 000 et Rs 250 000 » pour le MSM venant de Dawood Rawat lors des différentes campagnes électorales.
Des recoupements d’informations effectués par Week-End de sources concordantes indiquent que les Special Administrators de BAI Co (Mtius) Ltd devaient soumettre incessamment aux autorités leurs Findings sur les liens et transferts bancaires entre BAI, BA Investment, Bramser et Media Metrix avec en toile de fond Ehshan Kodarbux. Le but déclaré de l’exercice est de déterminer « whether policy holders’ money from BAI and investors money from Bramer Asset Management and Bramser Services had flowed into Media Metrix. » Selon les premières indications disponibles, la réponse liminaire à cette question générique est positive.
Un examen des Records confirme qu’une somme de Rs 66,3 M a été transférée au nom du patron du groupe de presse Défi, en trois tranches, soit Rs 16 915 000 le 7 juin 2012, Rs 16 915 000 le 4 juillet 2012 et Rs 32,5 M le 6 juillet. Les Special Administrators sont catégoriques à l’effet que « the transfers originated from BAI Co (Mtius) Ltd, the insurance business » et qu’à aucun moment, Ehshan Kodarbux était un directeur ou un préposé de Media Metrix. Le pattern des transferts bancaires dans les trois cas présente des similarités, soit les fonds sont puisés des contributions des clients d’assurance de BAI Co (Mtius) Ltd pour être crédités sur le compte de BA Investment. La prochaine étape était le virement du même montant de BA Investment au compte de Media Metrix et de cette dernière entité vers Ehshan Kodarbux.
Le tandem Oosman et Basgeet s’est également penché sur une série d’événements intervenant à partir du 6 juillet 2012 avec le versement d’un montant de Rs 32,5 millions par Ehshan Kodarbux sur le compte de Bramser en vue de bénéficier de 3 250 Corporate Bonds A. Le 25 juillet 2014, les archives de Bramser révèlent que ces Bonds furent « redeemeed » pour la somme de Rs 34,8 M payées à l’intéressé avec un Waiver du paiement de l’Exit Fee.
La conclusion est des plus accablantes car les Special Administrators ajoutent que « funding of final redemption originated from new investors’ money as Bramser did not have sufficient funds to finance the redemption of Rs 34,8 million. Such application of new investors’ money to finance exiting investors is observed in a number of other occasions in relation to the Corporate Bond A. »
Sur la base de ces transactions, il est un fait que « consequently, a balance of Rs 66,3 M (excluding interest) is due to Media Metrix by Mr Kodarbux. » À la réception de la teneur de ce Special Assignment, les autorités compétentes devront décider dans les jours à venir de la marche à suivre pour recouvrer les fonds détournés. Aucune des sources officielles approchées n’a voulu commenter les détails de cette « questionable transaction. »
Financement des partis politiques
Par contre, le feu, qui couvait sous les cendres par rapport au financement des partis politiques, surtout en période d’élections, est ravivé. Profitant de son intervention lors de l’émission à la télévision, le ministre Bhadain a présenté aux téléspectateurs le schéma de trois transactions pour une somme de Rs 100 M conclues entre le 6 et le 14 novembre 2014, soit à un mois des législatives du 10 décembre dernier (voir graphique plus loin). Ces Rs 100 M avaient été appropriées frauduleusement par Dawood Rawat avant d’être redistribuées.
« Il y a un chèque de Rs 10 M de BAI au MMM », a déclaré en substance le ministre des Services financiers. Le député travailliste Mohamed Osman devrait se retrouver dans de beaux draps avec son nom mentionné par rapport à une somme de Rs 750 000 lors de cette même transaction mise à exécution à partir des paiements des assurances par des clients de la BAI et des contributions au Super Cash Back Gold (Rs 50 M) ou encore de la collecte illégale de fonds par la société Hennessy Capital (Rs 20 M), qui n’avait pas l’autorisation de la Financial Services Commission. Les Rs 30 M restantes représenteraient des Management Fees imposés à la Bramer Bank pour 2015 et 2016, mais réclamés en avance.
Ces détails émanant des comptes opaques de BAI devraient alimenter davantage la chronique politique. D’ailleurs, le Pm et leader historique du MSM, SAJ, a tenté de minimiser l’impact sur le principal partenaire au sein de Lalyans Lepep. Anticipant le backlash de l’arroseur arrosé, il a préféré prendre les devants pour avouer que « sak eleksyon, Dawood Rawat volonterma ti pe vine kontribué. Zamé li dépasse Rs 200 000 ou Rs 250 000. » En tout cas, une déclaration qui vaut son pesant d’or, dira l’autre.
Toutefois, le gros de ces détournements de fonds en novembre 2014, soit Rs 89 M, est attribué au Chairman Emeritus de BAI, avec un virement en devises étrangères chez Schroders dans l’offshore en Jersey, une firme spécialisée dans le Wealth Management. Compte tenu que cette opération de transferts de fonds détournés a nécessité la participation de Clearing Banks à l’étranger, que ce soit en Europe ou aux États-Unis, dépendant que les placements auraient été effectués en euros ou en dollars américains, Dawood Rawat se place sous le coup d’une Arrestable Offence dans ces juridictions à l’étranger, indépendamment du mandat d’arrêt émis par le magistrat Alvin Joypaul du tribunal de Port-Louis.
Néanmoins, dans l’immédiat, les Special Administrators de BAI Co (Mtius) Ltd doivent faire face à d’autres urgences avec l’approche de l’échéance du 30 juin pour le paiement de la seconde tranche du Super Cash Back Gold. Une somme de Rs 3,9 M doit être réunie au préalable pour honorer ces obligations.
Iframac, une coquille dévidée
Pour la précédente tranche du 15 mai, un montant global de Rs 2,2 MD a été levé avec la vente des Liquid Assets, dont des actions à la Bourse de Maurice (Rs 1,3 MD ), complémentés par des dépôts de Rs 466,2 M, des investissements de Rs 294,7 M au Kenya et la vente de Bank of Mauritius Bonds..
En attendant une décision au sujet des placements de BAI de l’ordre de Rs 4 MD au sein de Britam au Kenya, l’accent est sur les avoirs à Maurice, notamment la clinique Apollo Bramwell dans le Réduit Triangle, Iframac et Courts-Retail.
Pour Apollo-Bramwell, sept repreneurs potentiels sont en lice pour la clinique couvrant une superficie de 24 400 mètres carrés ainsi que tous les équipements et la flotte de véhicules. Avec le calendrier établi, la vente de la clinique Apollo Bramwell, avec Valérie Rawat touchant des salaires mensuels de Rs 1 M, devra être effective à la mi-juillet.
Pour remédier aux problèmes de liquidités et éviter d’entamer la capacité de fonctionnement de la clinique, le ministre des Finances, Vishnu Lutchmeenaraidoo, a avancé une ligne de crédits pour l’achat de médicaments pour les besoins du personnel soignant. La même logique a été appliquée pour Iframac avec des facilités financières avancées pour dédouaner 90 voitures bloquées depuis le début de cette année.
Malgré tout cela, les affaires d’Iframac ne s’annoncent guère sous de meilleurs auspices. Deux des trois enseignes de franchise de prestige, en l’occurrence Daimler pour les voitures Mercedes-Benz et Mitsubishi, ont pris la décision de se retirer momentanément du circuit, préférant identifier des concessionnaires à Maurice autres que le repreneur choisi par les Special Administrators de BAI Co (Mtius) Ltd.
La conséquence logique est que le Price Tag de Rs 1,3 MD pour Iframac pourrait être nettement inférieur. D’ailleurs, les 14 repreneurs intéressés par la relance de cette société du groupe Iframac devront être informés prochainement de la vente d’une coquille dévidée des accords des constructeurs automobiles de renom. Est également lancée la course des groupes mauriciens pour amadouer les Allemands de Mercedes-Benz, les Japonais de Mitsubishi de même que les Français de Peugeot.
Du côté de Courts-Retail, deux prétendants sont sur le point d’entamer un exercice de Due Diligence, qui devra être terminé dans deux semaines en prévision de la soumission des offres de rachat tournant une nouvelle page dans la fin de l’empire Rawat…
Casier judiciaire chargé de Navin Ramgooolam
17 semaines depuis le déclenchement de l’opération Lakaz Lerwa Lion, Navin Ramgoolam aura effectué bientôt une 40aine de va-et-vient au QG du Central CID au point où il commence à faire partie des meubles. Au cours de la semaine écoulée, il a écopé de sa 10e inculpation provisoire dans la 4e enquête criminelle initiée contre lui portant sur les commissions alléguées de Rs 100 M versées par la société Dufry de Suisse dans le cadre du contrat de gestion et d’approvisionnement de la Mauritius Duty Free Paradise Ltd (MDFP).
À ce jour, Navin Ramgoolam, qui a connu 4 arrestations, est confronté à une 10aine de charges provisoires comme suit :
6 février : La première inculpation provisoire de Money Laundering logée contre l’ancien Pm est lourde en espèces car elle porte sur un montant de Rs 4 M en roupies et en devises étrangères, montant découvert en sa résidence de River Walk de même que Rs 220 M, dont Rs 110 M en Never Used Bank Notes de 100 dollars principalement. La deuxième concerne le délit de Conspiracy dans les incidents au bungalow de Roches-Noires le 3 juillet 2011.
Cautions : Rs 200 000 et reconnaissance de dettes de Rs 1 M pour chacune des charges. Cette affaire est renvoyée au 12 novembre devant le tribunal de Curepipe alors que les Rs 224 M ont déjà été confiées à la Banque de Maurice.
16 mai : Nouvelle arrestation de Navin Ramgoolam en relation avec des développements dans la BAI Mega-Financial Scam de Rs 23 MD. Trois inculpations provisoires s’ajoutent, soit entente délictueuse au cours de la période allant de 2010 à 2014 avec des Chief Executive Officers et directeurs de BAI Co (Mtius) Ltd et Bramer Asset Management Ltd pour escroquer la Bramer Property Fund Ltd de Rs 105 M, de Money Laundering de Rs 40 M au préjudice des détenteurs de police d’assurance de BAI sous forme d’un emprunt déboursé de manière frauduleuse par la Bramer Bank pour l’achat du bungalow de Roches-Noires et Forgery dans des documents pour la vente de propriétés immobilières sous le Non-Citizen (Property Restriction) Act, notamment dans le cas d’Iqbal Mallam Hashan, ancien CEO de State Investment Corporation.
Cautions : Rs 100 000 et reconnaissance de dettes de Rs 1 M pour chacune des trois charges.
27 mai : L’ex-Pm est rattrapé par la State Land Saga avec trois inculpations provisoires pour le délit de « Public official using his office for gratification for another person », notamment en faveur du Pandit Suryadeo Sungkur pour une portion de Pas Géométriques à Trou-aux-Biches, de Bahal Gowry pour 7 perches de terrain résidentiel à Vacoas et de l’Acharya Kumar Jha, un ressortissant étranger, pour un terrain de l’État à La-Vigie.
Cautions : Rs 50 000 et reconnaissance de dettes de Rs 500 000 pour chacune des charges.
3 juin : Pour soutenir la demande d’extradition de Nandanee Soornack d’Italie, Navin Ramgoolam récolte deux nouvelles charges dans le scandale des commissions allégées de Dufry (Suisse) de Rs 100 M (2 129 688 euros), représentant une commission de 4,2% sur le chiffre d’affaires de la MDFP, au cours de la période allant d’août 2011 à décembre 2014, soit « using his influence in procuring a contract with Mauritius Duty Free Paradise for the supply of duty free goods » et de Money Laundering du même montant avec la complicité de Nandanee Soornack et de Laurent Obadia, le même ressortissant français qui organise le réseau de défense du fugitif Dawood Rawat en France, à travers Frydu AG et Wigan Holdings.
Cautions : Rs 125 000, montant réduit suite à une motion de Me Showkat Oozeer, et reconnaissance de dettes de Rs 500 000 pour chacune des charges.
Mais rien ne dit que c’est la fin des tracasseries judiciaires pour l’ex-Pm. Car le dossier du contrat jackpot de Rs 10 MD de Betamax pour le fret pétrolier de la State Trading Corporation (STC) est toujours « live » avec l’arrestation de l’ex-vice-Pm, Anil Bachoo, en fin de semaine. Il y a également l’acquisition des Airbus A 350 pour un montant de l’ordre de Rs 40 MD pour le compte d’Air Mauritius, dont le contrat avait été signé à la veille du Nomination Day pour les élections générales du 10 décembre dernier, avec les conclusions de la Forensic Probe du ministère des Services financiers soumises incessamment.
BAI SAGA : Le défi des « questionable transactions »
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